C'est à la fin du 19e siècle que le physicien allemand Ernst Abbe montre pour la première fois que le plus petit objet théoriquement observable doit avoir une taille au moins supérieure à la moitié de la longueur d'onde de la lumière qui l'éclaire. En dessous de cette taille d'objet, la lumière ne peut plus transporter l'information de l'existence même de l'objet. Traduisons pour plus de clarté:

La lumière du soleil est constituée de radiations dont la partie visible (la lumière blanche qui se décompose en arc-en-ciel lorsqu'elle passe au travers de gouttes de pluie) a des longueurs d'onde qui s'étendent d'environ 350 nanomètres (violet) à environ 800 nanomètres (rouge sombre).

La partie la plus intense de la lumière du soleil a des longueurs d'onde d'environ 500 nanomètres (couleur cyan). Si de la lumière à 500 nanomètres atteint un objet de 500/2 = 250 nanomètres (principe de Abbe), nous pouvons théoriquement le voir, puisque la lumière transporte l'information de son existence!

250 nanomètres, c'est 0.25 micromètre, c'est-à-dire un objet de ¼ de millième de millimètre! Personne ne peut voir un objet aussi petit à l'œil nu, mais le principe de Abbe dit qu'en théorie, un objet plus petit ne pourra pas être vu.

Parallèlement, l'œil humain est capable de voir, dans des conditions normales d'éclairage, des objets doit la taille est supérieure à environ 250 micromètres, c'est-à-dire ¼ de millimètre; ceci est dû à la taille des cellules qui captent la lumière et qui tapissent notre rétine (dans des conditions très optimales d'éclairage et de contraste, l'œil humain peut en principe distinguer des objets aussi petits que 70 micromètres, mais c'est un cas limite).

En conséquence, puisque notre œil peut voir des objets aussi petits que 250 micromètres, mais que la lumière du soleil (500 nanomètres) peut "voir" des objets aussi petits que 250 nanomètres, alors pour que notre œil puisse voir ces objets minuscules, il faut utiliser un microscope capable d'agrandir 1000×. C'est le principe de base du fonctionnement du microscope dit "optique", qui ne fait rien d'autre que d'agrandir l'information véhiculée par la lumière visible au travers de lentilles grossissantes vers notre œil: 1'000× 250 nanomètres = 250 micromètres, que l'on voit!

Pourquoi utiliser des électrons dans un microscope électronique ? Simplement parce que si on souhaite voir à l'œil des objets nettement plus petits que 250 nanomètres (ceux que la lumière visible à 500 nanomètres "voit "), il nous faut de la lumière dont la longueur d'onde est nettement plus petite que 500 nanomètres.

Dans la colonne d'un microscope électronique, on accélère (par exemple à 60'000 Volts) des électrons à très haute vitesse (proche de la vitesse de la lumière dans le vide); lorsque les électrons circulent dans la colonne en direction de l'objet de très petite dimension à visualiser, ces électrons sont caractérisés par des longueurs d'onde très petites, de l'ordre de …0.005 nanomètre (ce sont donc des ondes bien plus petites que la lumière visible du soleil). Comme le principe de Abbe est valide pour la lumière visible et pour la lumière invisible, l'onde de 0.005 nanomètre générée dans le microscope électronique peut ainsi véhiculer l'information de l'existence d'objets aussi petits que 0.005/2 = 0.0025 nanomètres, c'est-à-dire beaucoup plus petit que les tailles des atomes!

Pour que notre œil puisse voir des objets aussi petits que 0.0025 nanomètre, le microscope électronique devrait donc en principe être muni de lentilles qui permettent d'agrandir l'objet jusqu'à ce qu'il soit visible, c'est-à-dire jusqu'à ce qu'il apparaisse au moins aussi gros que 250 micromètres (la résolution de l'œil). Le facteur d'agrandissement nécessaire dans un microscope électronique devrait donc être de 100 millions de fois, puisque 100'000'000× 0.0025 nanomètre = 250 micromètres!

Cependant, pour des raisons techniques, le facteur d'agrandissement des microscopes électroniques conventionnels atteint rarement plus de 1'000'000×; en conséquence, les objets les plus petits observables par l'œil dans un microscope électronique ont des dimensions proches de 0.25 nanomètre dans le meilleur des cas.

Un problème supplémentaire est que lorsque les électrons véhiculent en direction de notre œil l'information de l'objet éclairé au travers des lentilles grossissantes du microscope électronique, c'est avec une lumière dont la longueur d'onde (environ 0.005 nanomètre) ne fait pas partie des ondes visibles par l'œil. Pour pouvoir finalement visualiser cette lumière invisible à l'œil, il faut utiliser un détecteur qui transforme l'information invisible en information visible. Le principe le plus simple consiste à utiliser (dans un microscope électronique à transmission) une plaque fluorescente, ou (dans un microscope électronique à balayage) un écran cathodique.

La plaque fluorescente reçoit les ondes des électrons (de l'ordre de 0.005 nanomètre) et les convertit en lumière (verdâtre) visible par l'œil; il suffit alors de prendre une photographie de l'écran fluorescent pour obtenir une image de l'objet analysé. Dans l'écran cathodique (similaire aux écrans de télévision de la génération qui précédait les écrans plats), les électrons sont dirigés contre la paroi interne de l'écran, constituée de matériaux qui convertissent cette lumière invisible en lumière (blanche) visible par l'œil.

Pour conclure, la lumière blanche permet de voir, au travers d'un microscope optique qui agrandit jusqu'à 1'000×, des objets aussi petits que 250 nanomètres (un quart de micromètre), tandis que la "lumière" des électrons permet de voir, au travers d'un microscope électronique qui agrandit jusqu'à 1'000'000×, des objets aussi petits que 0.25 nanomètre (1000× plus petits que dans le microscope optique).