Derrière chaque médicament, il y a des milliers de cobayes humains qui en testent l'efficacité et les effets indésirables. Ces essais cliniques sont indispensables mais en Occident les volontaires se font rares et les règles éthiques deviennent de plus en plus strictes. Les grandes sociétés pharmaceutiques vont donc puiser dans l'immense réservoir humain de l'Est et du Sud. Particulièrement en Inde où les tests médicaux sont nettement plus rapides et meilleur marché qu'en Europe. Temps présent a enquêté entre Lausanne, Genève, Bombay et Delhi.
Les géants pharmaceutiques délocalisent de plus en plus les tests de nouveaux médicaments. Enquête entre la Suisse et l'Inde.
Jeudi 11 décembre 2008 à 20:05.
Avant d'avaler un médicament, peut-on savoir qui l'a testé et dans quelles conditions éthiques ? Malgré quelques progrès, ça reste très mystérieux. D'autant plus que les essais médicaux se pratiquent désormais à l'échelle planétaire : les multinationales de la pharmacie délocalisent de plus en plus leurs recherches cliniques dans les pays de l'Est et du Sud, là où les tests peuvent être menés plus facilement, plus rapidement et à moindre coût. Le champion mondial en la matière, c'est l'Inde qui a pour objectif avoué de devenir le plus grand centre planétaire des essais médicaux. Pour attirer les multinationales de la pharmacie, elle se vante de leur offrir des millions de volontaires pour leurs tests cliniques. Le gigantesque réservoir indien est attractif : on y trouve des patients qui souffrent de toutes de sortes de maladies, qui sont vierges de tout traitement médicamenteux et qui n'ont pas d'autres moyens d'accéder à des soins que de participer à des tests. Résultat : le business de la recherche clinique, associé au tourisme médical, est en plein essor. Mais les règles éthiques de base ne sont pas appliquées aussi rigoureusement qu'en Europe. Beaucoup de patients sont mal informés sur leurs droits et sur les médicaments qu'ils testent. D'après divers spécialistes, les contrôles des commissions d'éthique sont souvent déficients et les garde-fous insuffisants.
En mettant à disposition leur corps, les innombrables cobayes indiens prennent donc des risques pour leur santé mais sans forcément en tirer profit : l'immense majorité de la population n'a pas les moyens de s'offrir les médicaments que teste l'industrie pharmaceutique en Inde. Et les maladies dont souffrent les pauvres, la malaria ou la « fièvre noire », sont totalement négligées par les chercheurs occidentaux.
Rediffusion le vendredi 12 décembre 2008 à 01h50 et lundi 15 décembre 2008 à 09h45 et 14h15 sur TSR2.
Générique
Un reportage d'Eric Burnand et Romain Guélat
Image : Catherine Schwyzer
Son : Benoît Crettenand
Montage : Catherine Kala