Publié

Une nouvelle génération prend peu à peu la relève au Kremlin

Maria Vorontsova, fille de Vladimir Poutine et membre du présidium de l'Association russe pour la promotion de la science, participe au Forum économique international de Saint-Pétersbourg (SPIEF) à Saint-Pétersbourg, le 7 juin 2024. [AFP - OLGA MALTSEVA]
Maria Vorontsova, fille de Vladimir Poutine et membre du présidium de l'Association russe pour la promotion de la science, participe au Forum économique international de Saint-Pétersbourg (SPIEF) à Saint-Pétersbourg, le 7 juin 2024. - [AFP - OLGA MALTSEVA]
Pendant longtemps, Vladimir Poutine a voulu tenir ses filles à l'écart de la scène publique, mais aujourd'hui, elles apparaissent au grand jour. D'autres membres de la famille font également l'objet d'une plus grande attention et sont promus à des postes élevés. Fabian Burkhardt, spécialiste de la Russie, explique à SRF les raisons de ce changement de génération et les risques qu'il comporte.

D'après Fabian Burkhardt, "on assiste actuellement à un changement générationnel régulier mais lent. Nous l'observons en Russie depuis un certain temps déjà. L'élite autour de Poutine est de plus en plus âgée. Du point de vue du régime, il est normal que la génération suivante accède à des postes de haut niveau par "rotation". Aujourd'hui, on parle presque de petits-enfants".

Pendant longtemps, les deux filles du président russe Vladimir Poutine n'ont joué aucun rôle dans la vie publique. Le chef du Kremlin a même essayé de les tenir à l'écart. Il y a quelques semaines, les deux femmes ont cependant fait des apparitions remarquées au Forum économique de Saint-Pétersbourg. Et elles ne sont pas les seuls "descendants" à entrer dans la valse du pouvoir.

Mais pour quelles qualifications ces personnes sont-elles choisies, en dehors de leurs liens familiaux? Fabian Burkhardt répond au micro de SRF que "la plupart d'entre elles ont une certaine expérience de l'administration ou des grandes entreprises publiques".

Maria Vorontsova, membre du présidium de l'association russe pour la promotion de la science, participe au Forum économique international de Saint-Pétersbourg (SPIEF) à Saint-Pétersbourg, Russie, le 7 juin 2024. [REUTERS - Marina Mamontova]
Maria Vorontsova, membre du présidium de l'association russe pour la promotion de la science, participe au Forum économique international de Saint-Pétersbourg (SPIEF) à Saint-Pétersbourg, Russie, le 7 juin 2024. [REUTERS - Marina Mamontova]

"Il existe ainsi des parcours de carrière qui passent par des relations personnelles, et pas seulement familiales" ajoute-t-il. "Certains s'élèvent grâce à leurs performances et à leur loyauté. Il n'est pas acquis que vous puissiez vous maintenir pendant de nombreuses années dans ce réseau de relations où des groupes d'élite s'affrontent."

Une élite vieillissante

Si ce changement de génération se produit aujourd'hui, c'est que l'élite actuelle est âgée, selon le spécialiste de la Russie. "Je dirais que c'est la raison la plus importante".

"Plus une personne est importante dans l'élite, plus elle est âgée", ajoute-t-il. "Les deuxième et troisième générations sont en train de monter en grade. Je ne vois pas Poutine préparer délibérément la transition vers le post-poutinisme. Ce serait trop risqué".

Toujours selon Fabian Burkhardt, "ces relations personnelles et familiales ne fonctionnent que tant que le grand chef les protège. Dès que le maître perd sa position, la bataille pour les ressources et les postes commence".

Ainsi, "si Poutine entamait ce processus [de passation de pouvoir] maintenant, les conflits au sein de l'élite risqueraient de s'intensifier", confie-t-il. "Il s'agit donc d'un processus lent qui a reçu une impulsion importante cette année. Mais il ne s'agit pas d'une préparation consciente de l'après-Poutine".

Un manque de confiance de Poutine

Vladimir Poutine tente donc de placer ses proches et ses loyalistes à des postes centraux. Pour Fabian Burkhardt, c'est en partie par manque de confiance envers son administration.

"La loyauté totale est importante pour Poutine. Elle peut être démontrée par les relations familiales, mais aussi par la proximité personnelle avec Poutine ou avec des acteurs importants". Par exemple, "le nouveau ministre de la Défense Beloussov n'a aucun lien de parenté avec Poutine, mais il a passé beaucoup de temps avec lui. Les anciens gardes du corps de Poutine ont également fait carrière sans liens familiaux".

Cependant, ceux qui n'ont pas de telles relations sont "perdants". Fabian Burkhardt parlait préalablement de l'élite supérieure, soit un maximum de 200 à 300 personnes. Et "au niveau ministériel ou inférieur, [...] il s'agit non seulement de loyauté, mais aussi de performance. La nomination d'un plus grand nombre de personnes ayant des liens familiaux suscite la convoitise. Et cela crée des perdants qui doivent alors trouver d'autres moyens de gravir les échelons. Un processus qui peut conduire à des conflits", conclut l'expert, expliquant que cette restructuration du pouvoir est risquée pour Vladimir Poutine.

Propos de Fabian Burkhardt recueillis par Christina Scheidegger (SRF)

Adaptation française: Julien Furrer (RTS)

Publié

Regarder au-delà des frontières linguistiques avec "dialogue"

Cet article est initialement paru en allemand sur le site de la chaîne publique de Suisse alémanique SRF et a été traduit par la rédaction de "dialogue". Vous pouvez lire l’article original sur SRF News.

"Dialogue" est une offre de la SSR qui propose des débats ainsi qu'un échange de contenus afin de créer des ponts entre les personnes de toutes les régions linguistiques et les Suisses de l'étranger.