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Les athlètes olympiques coûtent des millions chaque année en Suisse

La délégation suisse durant la cérémonie de bienvenue au village olympique de Rio, le 2 août 2016. [Keystone - Laurent Gillieron]
La délégation suisse durant la cérémonie de bienvenue au village olympique de Rio, le 2 août 2016. - [Keystone - Laurent Gillieron]
L'investissement financier dans le sport de haut niveau a doublé au cours des 20 dernières années. Une condition nécessaire, mais pas suffisante pour briller aux Jeux olympiques d'été, comme le montre une enquête data de SRF.

Les sportifs d'élite suisses sont financés en majeure partie par des fonds de loterie, que Swiss Olympic a pour mission de réallouer à discrétion aux fédérations sportives. Le montant de ces contributions a presque doublé au cours des 20 dernières années, pour atteindre en 2014 un point culminant à 27,6 millions de francs, montre l'enquête de SRF Data.

Il est déterminé que les fédérations de sports d'été reçoivent 65% de ces ressources et celles de sports d'hiver 35%. En 2005, les fédérations suisses participant aux Jeux d'été ont ainsi reçu 9,6 millions de francs. Pour les Jeux de Londres en 2012, cette contribution est montée à presque 12,7 millions.

La fédération suisse de gymnastique est la mieux lotie, selon des chiffres communiqués très récemment par Swiss Olympic. Entre 2014 et 2016, elle a touché près de 4,7 millions de francs, soit 13,5% de la somme totale partagée entre les 16 disciplines d'été. Suivent le cyclisme (3,8 millions, 11%) et l'athlétisme (près de 3,2 millions, 9%). En queue de peloton figurent la fédération de canoë ( 417'000 francs, 1,2%) et les lutteurs (390'000 francs, 1,1%).

Disparités entre promotion et performances

Si l'on compare les financements alloués aux différents sports avec leurs performances aux derniers JO, on constate de fortes disparités. L'aviron, par exemple, est l'une des disciplines d'été où la Suisse obtient généralement ses meilleurs résultats mais n'a reçu que 4,5% des financements. Les cyclistes, qui ont réalisé le quart de tous les classements en top 8* depuis 1992, n'ont reçu que 11% des fonds.

A l'inverse, la Suisse ne réalise que des performances moyennes en gymnastique par rapport aux autres disciplines: les gymnastes n'ont réalisé que 4,6% des classements en top 8 au cours des derniers Jeux d'été. C'est pourtant sur cette discipline que l'accent est mis financièrement.

"Si une fédération connaît peu de succès, elle recevra bien sûr moins d'argent", explique Ralph Stöckli, responsable chez Swiss Olympic. Toutefois, d'autres critères sont pris en compte, comme l'intérêt que les médias et le public accordent à une discipline. L'importance de la concurrence internationale joue aussi un rôle.

Le "prix d'une médaille" a augmenté

Entre 1992 et 2000, les résultats des athlètes suisses aux Jeux d'été ont suivi quasiment parfaitement la courbe de progression des investissements financiers. En huit ans, les contributions financières ont augmenté de plus d'un tiers (quelque 5 millions de francs); le nombre d'athlètes suisses classés parmi les 8 premiers* aux Jeux olympiques d'été a augmenté proportionnellement (+36%).

Mais depuis le tournant du XXIe siècle, les courbes des investissements et des résultats aux JO d'été sont nettement décorrélées. Si les fonds de loterie continuent d'affluer dans les caisses de Swiss Olympic les performances suisses, elles, stagnent. Un écart record a été constaté en 2012: alors que les financements n'avaient jamais été aussi hauts, la Suisse ne s'est classée que 10 fois dans le "top 8", soit un ratio de 0,41%. Son pire résultat depuis 1992.

Il devient de plus en plus difficile pour une nation de faire la différence aux Jeux olympiques, d'une part, parce que l'éclatement de certaines zones comme les Balkans ou l'URSS a multiplié les pays concurrents. D'autre part, parce que tous les pays prenant part aux JO misent davantage financièrement sur leurs athlètes qu'auparavant. Ce faisant, ils contribuent à faire s'envoler le "cours de la médaille".

S. Brüggemann, P. Düblin, T. Grossenbacher, M. Morell (SRF) / P. Turuban

*Pour mesurer les performances de la Suisse aux JO, SRF Data a calculé le rapport entre le nombre de fois où des athlètes suisses se sont classés parmi les 8 premiers, et le nombre possible de classements dans le top 8. Cette méthode a été préférée à une valeur absolue (comme le nombre de médailles par exemple) parce qu'elle permet de faire des comparaisons dans le temps.

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