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La présidentielle russe marquée par d'"importantes irrégularités"

De nombreux cas de bourrage des urnes ont été dénoncés par l'opposition russe et des ONG. [Tatyana Zenkovich]
De nombreux cas de bourrage des urnes ont été dénoncés par l'opposition russe et des ONG. - [Tatyana Zenkovich]
L'OSCE a dénoncé lundi une présidentielle russe "biaisée" marquée par d'importantes irrégularités. Le scrutin a été largement remporté Vladimir Poutine.

L'élection présidentielle russe remportée dimanche par Vladimir Poutine a été marquée par d'importantes irrégularités lors du décompte des voix après une campagne "clairement biaisée" en faveur du Premier ministre, ont indiqué lundi les observateurs électoraux de l'OSCE.

"Le processus s'est détérioré lors du décompte des voix et a été évalué négativement dans près d'un tiers des bureaux de vote en raison d'irrégularités de procédures", a déclaré l'OSCE dans un communiqué.

"Il y a aussi eu des cas de bourrages d'urnes. Dans 27 décomptes observés (sur 98, ndlr), les bulletins de vote n'ont pas été montrés à toutes les personnes présentes et ils n'ont pas été comptés un par un de manière transparente", a déploré l'organisation.

Un scrutin "biaisé"

"Bien que les candidats à l'élection présidentielle russe ont été en mesure de faire campagne sans entrave, les conditions ont été clairement biaisées en faveur d'un candidat, le Premier ministre Vladimir Poutine",  a estimé l'OSCE dans son rapport préliminaire, soulignant que les ressources de l'Etat avaient été mobilisées pour soutenir Vladimir Poutine.

"Cette élection a montré qu'il y avait un net vainqueur avec une majorité absolue, évitant un second tour. Cependant, le choix des électeurs était limité, la concurrence électorale n'était pas équitable et il manquait un arbitre indépendant", a ajouté l'OSCE, en référence à la commission centrale électorale. Vladimir Poutine a remporté le scrutin avec près de 64% des voix, selon des résultats quasi définitifs.

Candidat gênant écarté

Par ailleurs, "les conditions trop restrictives d'enregistrement des candidatures ont empêché l'émergence d'une réelle compétition", a déploré l'OSCE.

L'opposant démocrate Grigori Iavlinski a vu sa candidature rejetée par la commission électorale centrale au motif d'irrégularités dans la collecte de ses deux millions de signatures de soutien, une décision considérée par ses détracteurs comme un moyen d'écarter un candidat gênant pour le pouvoir.

L'OSCE a également critiqué le fonctionnement des web-caméras installées dans les bureaux de vote, une mesure proposée par Vladimir Poutine après les fraudes dénoncées par l'opposition et des observateurs aux élections législatives de décembre dernier remportée par son parti Russie unie.

Le jour de la présidentielle, "les caméras n'ont pas capturé les éléments importants du décompte et donc les attentes liés à la retransmission en ligne n'ont pas été satisfaites", a relevé l'OSCE. "Le principe d'une élection est que l'issue devrait être incertaine. Ce n'était pas le cas en Russie", a estimé l'OSCE.

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agences/dk/hof

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Nombreuses fraudes dénoncées

Dès dimanche, les représentants de certains candidats, des opposants, les organisations russes de surveillance électorale ainsi que des médias indépendants ont affirmé avoir recensé quantité de fraudes.

Le site control2012.ru, mis en place pour comptabiliser les infractions constatées, avait comptabilisé lundi près de 6000 cas de violation de la législation électorale.

Ce site recensait notamment 132 cas de bourrage d'urnes et 329 cas de "transport massif d'électeurs", une technique qui permet à un groupe de voter plusieurs fois dans différents bureaux grâce à des autorisations frauduleuses.

Golos, une association financée par des fonds occidentaux, a affirmé lundi que selon ses propres estimations, Vladimir Poutine avait obtenu non 64% mais 50,26% au premier tour.

La commission électorale a de son côté indiqué avoir reçu 178 plaintes sur le déroulement de l'élection, selon l'agence Ria Novosti.

Nombreuses arrestations

Environ 550 manifestants et plusieurs dirigeants de l'opposition ont été interpellés à Moscou et à SaintPétersbourg lundi soir au cours de manifestations pour contester la victoire la veille de Vladimir Poutine à la présidentielle.

Le blogueur anticorruption Alexeï Navalny, le chef du Front de gauche, Sergueï Oudaltsov, la militante écologiste Evguenia Tchirikova et le dirigeant du mouvement Solidarité, Ilia Iachine, ont notamment été embarqués par la police à l'issue d'une manifestation autorisée place Pouchkine à Moscou.

Des réactions entre soutien affirmé, réalisme et prudence

Le président chinois Hu Jintao a rapidement félicité lundi Vladimir Poutine.

En dépit d'une défiance traditionnelle, la Chine et la Russie se sont rapprochées récemment dans leur très ferme opposition à toute condamnation du régime syrien, bloquant l'une et l'autre le vote d'une résolution à l'ONU.

La chancelière allemande Angela Merkel a transmis ses voeux de succès à Vladimir Poutine dans ses nouvelles fonctions, a annoncé son porte-parole. Le ministre allemand des Affaires étrangères Guido Westerwelle a quant à lui annoncé vouloir renforcer le "partenariat stratégique" avec la Russie.

A Londres, un porte-parole du Premier ministre britannique David Cameron a estimé que le résultat de l'élection était "décisif", en dépit de "problèmes" identifiés par l'OSCE.

Réaction beaucoup plus mesurées du côté de Paris et de Bruxelles. La France a "pris note" des résultats du scrutin et étudie "le rapport préliminaire" de l'OSCE, a déclaré le ministère des Affaires étrangères. Même son de cloche du côté de l'Union européenne.

Les Etats-Unis ont appelé la Russie à enquêter de manière "indépendante" sur d'éventuelles irrégularités dénoncées par l'opposition russe et la mission d'observation de l'OSCE. Washington s'est aussi dit "prêt à travailler" avec Vladimir Poutine une fois les résultats validés, selon le département d'Etat.