Orna Donath a brisé un tabou. Son étude a été l'une des plus commentées ces 12 derniers mois. Depuis sa sortie, des milliers de femmes ont osé s'exprimer publiquement.
Sur Twitter, le hashtag #RegrettingMotherhood (Regretter la maternité) continue d'être alimenté en permanence d'articles, de témoignages ou de gens qui s'en offusquent:
Une émotion humaine
Dans l'émission Tout un monde, sur RTS la Première, Orna Donath se dit elle-même surprise face à l'énorme écho qu'a reçu son étude. Mais pour elle, ce n'est pas un effet de mode. "Je ne pense pas que le phénomène soit nouveau. C'est une émotion humaine qui a toujours existé." La réflexion, elle, ne fait que commencer.
Au début des années 2000, une étude menée aux Etats-Unis affirmait que 97% des mères de familles sondées estimaient que les avantages d'être parent primaient sur le coût et le travail que cela impliquait. Mais rien ne prouve qu'une partie des sondés n'a pas caché la vérité.
Pour Orna Donath, il faut aujourd'hui que la parole se libère. "Je ne suis pas en train de glorifier les femmes qui ont des regrets. Je veux seulement que ce sentiment soit enfin considéré comme légitime. Je souhaiterais qu'à l'avenir, de plus en plus de femmes osent dire qu'elles regrettent d'être une mère, même si elles aiment leurs enfants.
Débat houleux en Allemagne
C'est en Allemagne que l'étude a suscité les débats les plus houleux "J'ai donné mon premier interview en Allemagne au printemps 2015. Plus d'un an plus tard, je constate que le débat n'est toujours pas clos. Au contraire, il reste très vif".
La sociologue en a conscience: elle a touché à un puissant tabou culturel: "Il n'y a pas un seul pays au monde où le fait de dire qu'on regrette d'être une mère sera considéré comme quelque chose de légitime."
"Etre mère en Allemagne n'est pas facile"
A Berlin, la journaliste de la RTS Blandine Milcent confirme la résonance médiatique de l'étude, avec beaucoup d'interviews d'Orna Donath dans la presse, mais aussi plusieurs livres parus sur le même thème, comme "le mensonge de la mère heureuse". "La société allemande était prête à en discuter, parce qu'être mère en Allemagne n'est pas très facile", analyse-t-elle.
Ce n'est pas comme en France, où vous pouvez boire un verre de champagne durant votre grossesse, raccourcir le temps d'allaitement et retourner au travail et à la vie d'adulte trois mois après avoir accouché.
Selon Blandine Milcent, la mère est toujours considérée en Allemagne comme le centre de la famille, la référence qui va permettre à ses enfants de se développer normalement. "Il ne faut surtout pas interrompre sa relation avec les enfants jusqu'à ce qu'ils soient en âge de rentrer à l'école. Travailler à plein temps pour une femme est encore assez mal vu, surtout lorsque les enfants sont encore petits", explique la journaliste.
fme
Le stress de la mère parfaite, une cause possible de la baisse démographique
Selon Blandine Milcent, la difficulté des mères en Allemagne est peut-être l'une des raisons pour laquelle elles ne font pas beaucoup d'enfants. "Les choses ont un peu changé avec des pères plus présents qu'autrefois, mais être mère en Allemagne reste particulièrement culpabilisant: on ne peut être que cela; on n'a pas le droit de faire autre chose et en plus, il faut être une mère parfaite", explique la journaliste.
Organiser les activités musicales et sportives des petits, leur faire des programmes les week-ends, sans oublier les anniversaires qui sont une source de stress intense. Bref, se sacrifier en permanence peut s'avérer épuisant. Par conséquent, quand des femmes disent qu'elles regrettent, elles trouvent un écho particulier en Allemagne.