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Un million de dollars au coeur du procès Stern

La thèse du meurtre pour l'argent est également soutenu par le procureur général Daniel Zappelli.
Daniel Zappelli a exclu mardi la thèse du meurtre passionnel.
Cécile B. a tué Edouard Stern pour le million de dollars, a plaidé mardi l'avocat de la famille Me Bonnant. Le procureur général Daniel Zappelli soutient le même scénario. La défense, elle, estime que le banquier avait poussé sa meurtrière "à bout".

"Dans ce dossier, on se trouve aux antipodes du meurtre
passionnel", a expliqué mardi aux douze jurés de la Cour d'assises
de Genève le procureur général Daniel Zappelli. Selon lui, Cécile
B. a tué son amant Edouard Stern pour l'argent.



Certes, a admis le magistrat dans son réquisitoire, dans cette
histoire il y a du sexe. "Mais ce n'est pas à cause du sexe qu'a
été tué le banquier français". Edouard Stern avait été découvert
mort dans son appartement genevois le 1er mars 2005, vêtu d'une
combinaison en latex utilisée dans les milieux sadomasochistes.

Presque un assassinat

Daniel Zappelli n'a pas non plus nié que Cécile B. et Edouard
Stern ont éprouvé de l'amour l'un pour l'autre. Mais dans ce
dossier, "ce n'est pas l'amour qui a tué, mais la haine et
l'argent". Pour lui, il n'a pas manqué grand-chose pour que
l'amante du banquier soit jugée pour assassinat.



Cécile B. sait ce qu'elle fait. Elle n'est pas schizophrène, a
relevé Daniel Zappelli, et elle ne souffre pas d'un dédoublement de
la personnalité. "Sa place n'est pas dans une cellule capitonnée,
mais dans une cellule tout court", a asséné le procureur dans son
réquisitoire.



Le banquier Edouard Stern, de son côté, avait également ses
travers, a concédé Daniel Zappelli. "Il n'était pas le salaud que
veut nous dépeindre la défense, ni l'ange que nous a décrit Cécile
B.". Pour l'accusation, il était un homme "exceptionnel" avec ses
qualités et ses défauts, comme tout le monde.

"Le million!"

Aux yeux de la partie civile, son acte
a été motivé par l'intérêt. Pour preuve, les écoutes téléphoniques
de la police qui montrent une femme directive, méthodique et
impatiente, après avoir abattu le banquier de quatre balles le 28
février 2005. Sa voix contraste alors avec celle, «gémissante» et
«lacrymale», entendue pendant les quatre années d'instruction et au
procès.



Devant une salle pleine à craquer et où de nombreux pénalistes
genevois se sont mêlés au public, l'avocat de la famille d'Edouard
Stern, Me Bonnant, a démontré la duplicité de Cécile B. dominant un
homme follement épris. Car elle ne tue pas Edouard Stern lors de ce
qu'elle a décrit comme une descente aux enfers ou lorsqu'elle a
enfin l'argent. Elle le tue lorsqu'il veut le récupérer quand bien
même elle avait promis de le rendre. "Ce million, c'est le seul
sujet. Ce million est central. Le million! Le million! Le
million!", a martelé Me Bonnant.



Et l'avocat d'insister sur l'aptitude de Cécile B. à mentir et à
manipuler son entourage. Le million est la seule obsession d'une
femme qui n'a pas travaillé pendant 20 ans, qui appelle sans cesse
son banquier et qui va jusqu'à envoyer le 11 mars 2005, via son
avocat, une lettre aux enfants de la victime les menaçant d'en dire
plus sur la vie sexuelle de leur père s'ils ne lâchent pas le
million.

La défense maintient la thèse du crime passionnel

"Cécile B. n'a pas tué Edouard Stern pour un million", a de son
côté rétorqué la défense. Elle l'a tué pour une accumulation
d'événements. "Ce n'est pas le dernier coup de hache qui fait
tomber l'arbre, c'est la répétition", a déclaré Me Pascal Maurer,
l'un des deux avocats de l'accusée. "Edouard Stern est un chasseur.
Ce qu'il aime c'est la traque (...). Cécile B. est un beau gibier:
un gibier humain", a-t-il clamé.



Me Maurer a brossé le portrait d'un "manipulateur" pervers,
amateur de relations sexuelles multiples avec des hommes et des
femmes, que Cécile B. "rabattait" pour lui, à sa demande.



La défense plaide le "crime passionnel" qui, s'il est retenu, est
passible d'une peine minimum d'un an et d'un maximum de dix ans de
prison. Sans cette circonstance atténuante, un meurtrier encourt à
Genève une peine d'emprisonnement de cinq à vingt ans.



agences/sbo

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Notion de crime passionnel

L'autre avocat de la famille Stern, Me Catherine Chirazi, a ensuite livré aux jurés de Genève un cours de droit sur la notion de "crime passionnel", pour déminer le terrain sur lequel campe la défense de Cécile.

S'il est retenu, le "crime passionnel", au terme du Code pénal du canton de Genève, est passible d'une peine minimum d'un an et d'un maximum de dix ans de prison.

Sans cette circonstance atténuante, un meurtrier encourt une peine d'emprisonnement de cinq à vingt ans.

"La jurisprudence est très exigeante" pour retenir le crime passionnel, a prévenu Me Chirazi pour qui Cécile B. était mue par "une seule obsession: l'argent".

Plaider le meurtre par passion, c'est dire qu'il n'y a pas d'autre solution que de tuer pour se sortir d'une situation qui met sa propre vie en danger, c'est dire qu'un homme raisonnable aurait ressenti la même violence dans cette situation, a expliqué de manière didactique Me Chirazi à l'attention du jury populaire. Dans le cas de Cécile B., il n'en est rien.

Le procureur général a rappelé que l'article 113 du code pénal relatif au meurtre passionnel «ne s'applique que dans des cas exceptionnels». Pour que l'auteur d'un meurtre puisse bénéficier de cet article, il faut qu'il ait agi sous le coup d'une émotion violente ou dans une situation de profond désarroi.