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"La Suisse n'a pas respecté les règles de l'entraide judiciaire avec les USA"

La décision du Tribunal pénal fédéral est imminente dans la bataille juridique autour des noms d'employés de banque livrés aux Etats-Unis
La Suisse aurait court-circuité les règles de l'entraide judiciaire en livrant les noms d'employés de banque aux Etats-Unis / 19h30 / 2 min. / le 6 février 2013
Robert Zimmermann, référence suisse en matière d'entraide judiciaire internationale, estime que la procédure entre Berne et Washington a été court-circuitée dans l'affaire de la livraison à la justice américaine des noms d'employés de banque suisses.

Confronté au cas des banques suisses qui ont livré près de 10'000 noms d'employés aux Etats-Unis, l'expert suisse en matière d’entraide judiciaire internationale Robert Zimmermann est catégorique: "La procédure d'entraide a été court-circuitée, c’est du jamais vu dans l'histoire de la Confédération", a-t-il déclaré à la RTS mercredi.

Robert Zimmermann rappelle le précédent de 1983. A l'époque, l'Américain Marc Rich, réfugié en Suisse, avait accepté de livrer les noms de clients et d'employés de ses sociétés actives dans le négoce de matières premières au Département de justice américain. Saisi de l’affaire, le Conseil fédéral interdira cette livraison de données, intimant à Marc Rich de respecter la procédure d'entraide.

"Une Suisse affaiblie"

Trente ans plus tard, le Conseil fédéral cède aux demandes américaines, "un précédent extrêmement dommageable pour la Suisse qui a bâti sa réputation au fil des décennies par son respect du droit et des lois", commente Robert Zimmermann. L'expert déplore encore le fait que la Suisse, "qui s'était toujours attachée à coopérer avec les Etats-Unis, dans le cadre strict des traités", s'en trouve affaiblie.

Recours déposé

L'affaire est loin d'être close puisque l'ex-chef juriste de la banque HSBC Eric Delissy a fait recours au Tribunal pénal fédéral (TPF) contre les décisions de HSBC, de l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (Finma) et du Conseil fédéral, s'opposant notamment au classement de sa plainte par le Ministère public de la Confédération (MPC).

Si le recours d'Eric Delissy est accepté - la décision du TPF à Bellinzone est attendue dans les prochaines semaines - le MPC devra ouvrir une enquête contre les responsables de HSBC pour espionnage économique au profit d’une puissance étrangère (art. 273 du Code pénal suisse), puis ce sont les responsables de la Finma et le Conseil fédéral qui pourraient devoir répondre de la livraison de données bancaires aux Etats-Unis.

Nicolas Rossé/cab

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Enquête en cours

La commission de gestion du Conseil national a ouvert en novembre 2012 une enquête sur la transmission des données des employés de banques suisses aux autorités américaines.

Le but est de vérifier l’"opportunité et la pertinence des procédures adoptées par le Conseil fédéral".

Rappel des faits


Condamnée aux Etats-Unis, UBS a livré des milliers de documents bancaires au fisc et au Département de la Justice américains.

Grâce à ces documents, les Etats-Unis ouvrent une enquête en 2010 contre 11 banques suisses.

Face aux pressions américaines croissantes, cinq banques suisses (Julius Baer, Credit Suisse, HSBC, banques cantonales de Zurich et de Bâle-Ville) livrent des noms de clients aux Etats-Unis.