En Suisse en 2015, plus de 402'000 personnes ont plus de 80 ans, soit 5% de la population totale. Et ils seront près de 690'000 en 2030, une augmentation de près de 70%.
En 2060, le nombre de personnes âgées de plus de 65 ans aura doublé par rapport à aujourd'hui, passant d'un peu plus de 1,5 million de seniors à 2,98 millions, selon les projections de l'Office fédéral de la statistique (OFS).
Des chiffres qui posent question par rapport au système d'assurances sociales, voté en 1948 alors que l'espérance de vie n'était que de 65 ans, mais qui offrent aussi des perspectives de développement économique à bon nombre de secteurs.
"Il y a 30 ans, le parcours type était du genre: je travaille toute ma vie, je suis fidèle à une entreprise, j'attends la retraite et quelques années après, hélas, on décédait. Aujourd'hui, avec l'espérance de vie et la santé à la retraite, on a envie de voyager, de faire des choses. La perspective de vie, c'est encore 30 ans à la retraite. C'est énorme, il faut en profiter", constate Blaise Willa, le rédacteur en chef du magazine romand des 50 ans et plus "Générations", dans TTC lundi.
Marché suisse frileux
Si des start-ups commencent donc à s'intéresser de près à ce marché de la "silver economy" - en référence aux tempes grises de ces nouvelles cibles marketing - le marché est encore très peu développé en Suisse. Les grandes surfaces comme Migros et Coop n'en sont qu'à la réflexion pour de nouvelles gammes de produits destinés uniquement aux seniors, relève l'émission TTC.
"Dans beaucoup de pays, la Chine, les Etats-Unis ou la France, il y a eu des politiques publiques qui se sont mises en place. En France, ça a commencé en 2013, c'est à ce moment que le mot "silver economy" est apparu. La réflexion s'est faite sur les transports, la sécurité, le commerce, l'alimentation et cela a abouti à une loi qui a été votée fin 2015 au Sénat français", explique Frédéric Serrière, conseiller en stratégie sur le vieillissement démographique auprès de dirigeants.
En Suisse, on se préoccupe encore beaucoup de la question du financement des retraites, au niveau fédéral, avec le projet Prévoyance 2020 par exemple, mais peu de l'adaptation concrète de la vie pour ces seniors qui deviennent toujours plus vieux.
"Le marché est assez frileux. Il y a des PME ou des start-ups qui se disent qu'il y a là une success story à faire; on voit ainsi des produits émerger, mais on ne peut pas encore dire que les grands groupes soient très présents. Par contre, à partir de 2022, le marché va fortement progresser et le grand pic sera pour 2040", note encore Frédéric Serrière.
Plus riches
Si les seniors deviennent de telles cibles marketing, c'est aussi parce qu'ils sont devenus plus aisés et dépensent davantage. Les ménages de retraités de 65 à 74 ans affichent en moyenne un revenu mensuel de 6431 francs (voir le tableau ci-dessous).
Et alors qu'un couple de jeunes actifs dépensera 438 francs par mois en loisirs et culture, un couple de retraités investira quant à lui 598 francs dans ce domaine.
Au niveau suisse, le revenu mensuel d'un couple de retraités reste toutefois plus faible que celui d'un actif. Et il décroît au fur et à mesure que l'âge avance.
Mais à Genève ou Zurich, selon la statistique genevoise de 2010, les contribuables à la retraite possèdent en revanche une fortune bien plus importante que les actifs. Ainsi, alors qu'ils représentent 24% des ménages fiscaux, les 65 ans et plus détiennent 49% de la fortune nette.
Des chiffres que l'Office cantonal de la statistique genevois explique aussi par une durée d'épargne plus longue, un héritage plus fréquent et le capital du troisième pillier. La génération des 65 ans et plus est aussi celle qui a cotisé toute sa vie au deuxième pilier et le touche par conséquent entièrement. Elle a ainsi un grand pouvoir d'achat et a l'habitude de consommer.
Marketing ciblé
Certains marchés, plus directement liés au monde des seniors comme celui des opticiens, ont compris l'importance de développer des produits, mais aussi une manière de parler à ce public.
Le marketing s'adapte. Nous avons Lara Gut pour les jeunes et Bernard Russi pour les plus anciens.
Chez Visilab, les publicités visent divers publics à l'aide de différents messages. Les retraités représentent en effet 50% du chiffre d'affaires de l'entreprise.
"Aujourd'hui finalement, ce qui a le plus évolué, c'est le marketing. Au lieu d'avoir un marketing généraliste, il est adapté", relève Daniel Mori, président de Visilab.
"C'est une tendance qui se développe depuis 4 ou 5 ans, conclut un publicitaire romand dans TTC. Les secteurs les plus porteurs pour l'instant sont les vacances, les assurances ou les marques de sport."
sbad