La venue d'une délégation officielle emmenée par le numéro 2 de l’armée birmane, dévoilée par la RTS, suscite la polémique et a été dénoncée par Amnesty Suisse car les militaires sont accusés d’être impliqués dans la répression violente contre les Rohingyas, minorité musulmane contrainte à l’exil au Bangladesh.
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Interrogé jeudi dans l'émission Forum, l'ambassadeur Paul Seger rappelle d'emblée que la Suisse a condamné à plusieurs reprises l'utilisation de la force et les déplacements forcés de populations birmanes, en soulignant le respect du droit international et le droit humanitaire.
Nous poursuivons les mêmes objectifs qu'Amnesty mais nous avons un rôle différent.
"La visite n'est pas du tout un acte de consentement, bien au contraire", insiste le diplomate. "A l'instar de tout le monde, nous voulons que la situation humanitaire s'améliore et que les droits de l'homme soient respectés. Nous poursuivons exactement les mêmes objectifs que, par exemple, Amnesty International. Mais nous avons évidemment un rôle différent. Et c'est notre rôle d'essayer de chercher des solutions pour éviter la répétition d'une telle tragédie. Et nous pensons qu'une solution utile est précisément un dialogue ouvert et critique."
Un dialogue plus important que jamais
Pour l'ambassadeur, un tel dialogue est même plus important que jamais. "La situation est très grave, et je pense que la meilleure façon d'essayer de changer les choses, d'influencer un changement, est de les faire venir, de les exposer pendant plusieurs jours à des questions comme le respect des droits de l'homme, les principes humanitaires, la démocratisation des forces armées, le respect des minorités… C'est un dialogue qui prend un certain temps."
Il ne suffit pas de dialoguer seulement avec les gens avec qui on est d'accord.
Confronté à la polémique, Paul Seger précise que le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) a songé à annuler cette visite. "Evidemment nous avons mûrement réfléchi (…) Je dirais même que cela aurait été probablement la solution la plus confortable, la plus facile, d'annuler. Mais si la Suisse est vraiment honnête, avec son rôle particulier de tradition humanitaire et de dialogue, il faut engager précisément des gens comme l'armée birmane à un tel dialogue. Il ne suffit pas de dialoguer seulement avec les gens avec qui on est d'accord."
Ils savaient qu'ils devaient s'attendre à un dialogue très ouvert, très critique.
Les autorités birmanes avaient du reste été clairement informées au préalable du fait qu'il ne s'agissait pas d'une visite de complaisance. "Ils savaient qu'ils devaient s'attendre à un dialogue très ouvert, très critique, sur ces questions", précise le diplomate.
L'ambassadeur en poste en Birmanie souligne encore que le dialogue, sur place, n'est possible que lors d'audiences qui durent entre 20 et 30 minutes. "Maintenant, nous avons l'occasion de confronter, d'exposer une délégation importante pendant cinq jours à ces questions-là. C'est une occasion unique à ne pas rater."
Propos recueillis par Chrystel Domenjoz et Sylvie Belzer
Texte web: Olivier Angehrn