- Manger du poisson et surtout du saumon, poisson gras plein d'oméga 3, c'est bon pour la santé ! Un message qui n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd, nous en consommons de plus en plus, mais avec la surpêche, les mers se vident, alors l'homme a inventé l'aquaculture : le problème, c'est que l'aquaculture conventionnelle n'est vraiment durable non plus. Alors, l'aquaculture bio est-elle une partie de la solution ?
- Et si vous aimez le saumon fumé, ne manquez pas notre dégustation, vous verrez quels sont les meilleurs rapports qualité-prix, il y a de grosses différences!
Le bio, ça marche aussi sur l'eau
De nos jours, près de la moitié des
poissons et des fruits de mer que nous consommons provient de
l'aquaculture et d'après les spécialistes, avec la demande du
marché mondial et l'épuisement progressif des mers, ce n'est pas
près de changer.
Revers de la médaille, A Bon Entendeur vous en a déjà parlé,
l'aquaculture standard pose des problèmes de pollution, de
contamination par des produits chimique, de pêche intensive pour
nourrir les poissons élevés en batterie ! C'est assez absurde !!
Aujourd'hui, des alternatives existent, comme l'aquaculture BIO,
reste à savoir si c'est vraiment l'une des meilleures solutions,
pour votre santé et pour l'environnement..
Nichée entre la lande et l'océan, Meitheal Eisc Teo est une ferme
à saumons irlandaise, située dans le Connemara. C'est une
exploitation bio, labellisée Bio Suisse, et dont une partie de la
production est vendue en supermarché en Suisse. Le lieu paraît
idyllique, il n'a pas été choisi par hasard.
Joe O'Laoi, de Meitheal Eisc Teo,
explique en quoi le choix des sites d'élevage est important dans
l'aquaculture: « Nos saumons doivent nager très fort ici, parce
qu'il y a beaucoup de courant et leur chair est donc très ferme.
C'est un endroit parfait pour élever des saumons, parce que nous
sommes déjà très au large dans l'Atlantique, ce qui explique les
courants, et puis il y a plusieurs baies. Nous pouvons élever
différentes générations sur différents sites, mais aussi laisser
des endroits en jachère quelque temps. C'est vraiment un très bon
site.»
L'exploitation est bio, mais ça ne se voit pas à première vue.
Dans chaque filet, ce ne sont pas moins de 30'000 saumons qui sont
nourris au canon à croquettes. Ils vivent de 26 à 32 mois au total.
La récolte est possible pratiquement toute l'année. L'entreprise de
Joe O'Laoi respire l'efficacité.
Le but d'une aquaculture, ce n'est rien d'autre que de produire
très efficacement des protéines et des lipides marins pour le
marché mondial, en élevant des espèces de poissons qui plaisent aux
consommateurs que nous sommes, comme le saumon.
Tony Farrell, de l'Université de Colombie-Britannique au Canada
est convaincu que ce mode de production est là pour durer. « Nous
vivons une situation ou la plupart des stocks de poissons sauvages
dans le monde sont soit considérés comme surexploités, soit à leur
limite maximale d'exploitation. Et si l'on prend en compte
l'accroissement de la population mondiale, il faut nous rendre à
l'évidence : pour continuer à manger des poissons dans le futur,
nous devons arrêter de pécher des poissons sauvages et nous nourrir
de poissons d'aquaculture., Mais nous aurons besoin d'une
aquaculture intelligente et pas d'une aquaculture dont les méthodes
détruisent aussi les poissons sauvages. Il nous faut mettre en
place une aquaculture dont les méthodes sont en harmonie avec les
poissons sauvages.»
Les risques de
l'aquaculture
Si Tony Farrell rêve d'une une aquaculture intelligente, comme il
dit, c'est que ces dernières années, les fermes marines
conventionnelles se sont taillées une sale réputation de pollueuses
chimiques et de bouillons de culture aquatiques.
La biologiste Alexandra Morton pense, et elle n'est pas la seule,
que les parasites et les maladies qui prolifèrent dans les filets
des aquacultures sont un grave danger pour les saumons sauvages et
donc pour les autres espèces de la région qui en dépendent. «Les
fermes marines violent les lois naturelles qui permettent au saumon
sauvage de survivre. Le saumon est un nomade, il bouge tout le
temps. Ceux qui sont malades sont laissés en arrière et n'infectent
pas le reste de la population. En automne, quand les saumons du
Pacifique remontent les rivières pour y déposer leurs œufs, ils
meurent tous et cela rompt le cycle des maladies. Au printemps,
après leur éclosion, les bébés saumons ne rencontrent pas les
pathogènes de leurs parents. Mais aujourd'hui, tout l'hiver, les
agents pathogènes prolifèrent dans les fermes marines et , au
printemps, lorsque les petits gars montrent le bout de leur nez,
ils rencontrent sur leur chemin des milliards de poux de mer, ainsi
que les virus et les bactéries de leurs parents. Les saumons
sauvages ne sont pas bâtis pour résister à cela et cela met en
danger leur survie. »
Il existe un autre problème qui,
lui, rend l'aquaculture traditionnelle peu durable, c'est la
nourriture des poissons. C'est que, pour produire un kilo de
saumon, il faut classiquement de 2 à 5 kilos de poisson frais,
souvent pêchés dans les mers du Sud, au risque de vider les océans
à terme. Alexandra Morton milite pour l'élevage de poissons
végétariens, seul moyen de production durable. « Si vous voulez
vraiment élever des poissons, alors il vous faut élever des
poissons végétariens, qui mangent des légumes, comme ils le font
depuis 10'000 ans en Asie. Cela marche très bien. Vous nourrissez
vos poissons avec des légumes, vous utilisez les rejets des
poissons pour faire pousser plus de légumes. Vous en vendez une
partie et vous utilisez le reste pour nourrir à nouveau vos
poissons et vous êtes dans un cycle. C'est ce genre de cycle qui
permet la vie sur terre. Un écosystème, c'est toujours un cycle,
tout est réutilisé. Mais ces fermes marines ici, c'est comme une
blessure ouverte: vous envoyez de la nourriture, cela provoque des
rejets qui créent des montagnes de rejets que j'ai étudiés et dans
lesquels rien ne vit. L'énergie ne fait que se dissiper, elle ne va
nulle part, elle ne fait pas partie d'un cycle. »
Le tableau brossé par Alexandra Morton est assez sombre, à se
demander s'il est vraiment possible d'élever des poissons
carnivores de manière plus durable?
L'aquaculture : une pêche
d'avenir ?
René Benguerel en est pourtant persuadé: cet ingénieur zurichois a
évalué les labels de certification de l'aquaculture pour le WWF.
Pour lui, le bio résout d'hors et déjà une partie de ces problèmes.
«Premièrement, la densité d'élevage est beaucoup plus faible, les
poissons ont beaucoup plus de place et ils sont donc moins
vulnérables aux parasites et aux maladies. Deuxièmement, la
nourriture des poissons doit être bio, et c'est très important :
une partie d'origine végétale, comme du mais bio ou du soja bio et
puis des poissons provenant de pêcheries certifiées durables.
Ensuite, il y a les produits chimiques. On peut utiliser des
produits chimiques en aquaculture bio, mais seulement d'une manière
très limitée et tous les produits toxiques et persistants sont
bannis à 100%. Pour finir, du côté des traitements et des
médicaments, en bio, vous devez utiliser des solutions alternatives
et n'utiliser des médicaments classiques qu'en dernier
recours.»
Retour en Irlande, dans notre exploitation labellisée Bio-Suisse,
pour apprendre que 30'000 saumons par cage, en fait, ce n'est pas
énorme, par rapport à leurs collègues de l'aquaculture
traditionnelle. Selon Joe O'Laoi, ces chiffres n'impliquent pas une
surpopulation. « La densité d'élevage est obligatoirement basse, de
10 kg par mètre cube., alors que nos assurances acceptent jusqu'à
25 kg et que les Norvégiens montent probablement à 40-50 kilos»
Quant aux croquettes, malgré leur aspect peu ragoûtant, elles
sont en fait totalement bio. Elles sont à base de déchets de
poissons provenant des usines de transformation. Les meilleures
parties du poisson sont destinées à la consommation humaine, les
morceaux qui restent, comme la tête par exemple, sont utilisés pour
fabriquer ces croquettes. Joe O'Laoi précise que « cette matière
première doit provenir d'un stock de poisson durable et d'une
pêcherie certifiée durable » et que «les céréales et végétaux à
l'intérieur doivent être sans OGM. »
Des poux sur les écailles
Reste les parasites, là, pas de miracle, il y en a. Joe O'Laoi ne
nie pas le problème, mais affirme que des méthodes simples
permettent d'en réduire le nombre. «Nous avons des poux de mer,
parce que les poux de mer vivent naturellement sur les poissons,
mais nous devons en gérer le nombre en maintenant des sites vides
un certain temps, en séparant les générations et avec nos basses
densités d'élevage. On fait de notre mieux , avec ces techniques,
mais aussi par une collaboration entre nos vétérinaires et les
autorités de certification ». L'usage de médicaments est pour sa
part limité. « Notre licence nous oblige à rester en-dessous de
certains niveaux de contamination, alors il nous faut les traiter
».
René Benguerel pense que dans ce domaine aussi, le bio améliore
les choses : «C'est clair que vous avez des poux de mer sur les
saumons bio comme sur les saumons conventionnels, mais la
différence, c'est que dans l'élevage bio, les fermes doivent être
placées en dehors des trajets de migration des poissons sauvages.
En plus, avec les basses densités d'élevage, vous avez bien moins
de problèmes de poux qu'en conventionnel. »
Quant aux fameux rejets des poissons et à la nourriture qui
pourraient s'accumuler dans le fond de la baie, Joe O'Laoi dit
réussir à les gérer sans trop de problème. «Les courants sont très
forts ici, donc les rejets, s'il y en a, sont dilués et emmenés.
Nous vérifions le fond de nos baies. Nous sommes contrôlés tous les
ans par le gouvernement qui envoie des plongeurs au fond, alors on
doit être certains que tout est en ordre. S'il y avait des
problèmes, ce qui n'est pas le cas actuellement, nous serions
obligés de laisser le site vide jusqu'à ce que cela soit réglé.
Nous n'avons pas eu de problème ces dix dernières années. Le fond
de nos baies est propre. »
L'aquaculture bio aujourd'hui représente seulement 1% de
l'aquaculture mondiale. C'est dire le chemin qui reste à faire pour
mettre en place une aquaculture vraiment durable à l'échelle de la
planète, en imaginant que cela soit possible.
Entretien avec Luc Mariot, journaliste auteur de
l'émission
En plus,
question durabilité : on peut faire encore mieux que le bio actuel
grâce à la polyculture. Pour faire simple, disons qu'il s'agit de
régler le problème des rejets des poissons en les faisant consommer
par un autre élevage. Cette polyculture est une idée ancienne déjà
pratiquée de manière traditionnelle en Asie. En Europe, on cherche
le moyen de réaliser cette méthode à large échelle.
La polyculture, une piste à défricher pour l'aquaculture
En Vendée, dans une
station de l'IFREMER, l'Institut Français de recherche pour
l'exploitation de la mer, le chercheur Jérôme Hussenot tente depuis
des années d'imaginer une aquaculture plus durable et moins
dommageable à l'environnement.
Au centre du problème, le fait qu'un tiers seulement de l'azote et
du phosphore contenus dans la nourriture des élevages est
transformé dans la chair du poisson. Le reste part dans l'eau. « Il
s'agit de réduire l'impact de ces éléments sur l'environnement en
essayant de les revaloriser et d'associer des espèces afin de
récupérer la plus grande partie de cet azote et de ce phosphore
».
Départ sur l'île d'Oléron, à la ferme marine de Douhet, la plus
grande écloserie à dorades de France.. On produit ici chaque année,
par ponte naturelle, 25 millions d'alevins qui vont ensuite
engraisser dans des aquacultures de toute l'Europe. Une telle
quantité de poissons provoque des rejets importants, notamment sous
forme de nitrates très polluants. Et ça commence déjà au stade
larvaire.
L'idée, encore au stade
expérimental, c'est d'utiliser les anciens bassins ostréicoles à
côté de l'exploitation pour retraiter naturellement les rejets en
élevant d'autres espèces comestibles. Les eaux usées passent
d'abord par ce canal très peu profond ou la lumière du soleil
élimine les bactéries. Ensuite, les eaux entrent dans le réseau de
claires ostréicoles pour le lagunage. On peut y mettre des algues,
des huitres, des crevettes, ou même des dorades. Ces êtres vivants
vont utiliser les nitrates pour leur croissance.
Reste à trouver des débouchés à ces productions comestibles, c'est
primordial, puisqu'il faut obligatoirement les récolter pour sortir
un maximum de nitrates du milieu.
Le directeur Jean-Sébastien Bruant estime par exemple qu'une
production commerciale d'algues comestibles pourrait atteindre ici
100 tonnes par an et donc financer un emploi permettant l'entretien
de ces lagunes. La protection de l'environnement serait donc
rentable pour l'entreprise.
Le fait d'associer plusieurs cultures pour préserver
l'environnement s'appelle de l'aquaculture multitrophique intégrée
et c'est possible aussi pour les saumons. Ce type de système est
déjà testé en mer dans plusieurs élevages à travers le monde, par
exemple dans la Baie de Fundy au Canada.
Selon Jérôme Hussenot, « l'élevage de saumon associé à d'autres
espèces est une solution pour l'aquaculture. Les moules poussent
par exemple deux fois plus vite dans les lieux d'élevage de saumon
et ce, avec une bonne qualité sanitaire et gustative ». Il relève
toutefois que ce type de solution doit être expérimentée avec
prudence, « la surproduction de moules [dans ce cas] pouvant
baisser les prix et déstabiliser toute la filière ».
Et en Irlande, dans notre ferme bio ? On nous a répondu que dans
les baies d'élevage, les gens du coin pêchent des coquillages et
des poissons toute l'année, ce qui contribue aussi à nettoyer l'eau
autour de la ferme.
Est-ce que l'avenir de l'aquaculture en mer passe forcément par la
polyculture, pour limiter l'impact sur l'environnement. ? Certains
n'y croient pas et penchent plutôt pour des systèmes totalement
fermés, comme il en existe pour l'élevage des crevettes, mais ça
coûte très cher en investissements et il n'est pas sûr que cela
soit mieux au niveau énergétique.
Nous allons passer maintenant au fumage, méthode de conservation
du poisson au départ , mais qui est aussi un plaisir gustatif ou du
moins qui devrait l'être. ABE a décidé de déguster.
Manger des protéines marines avec de la fumée
Le salage, puis le
fumage des poissons et des viandes, c'est à la fois une méthode de
conservation et un plaisir gustatif connu depuis la nuit des temps.
Mais aujourd'hui, plus question d'exposer les produits à la fumée
d'un feu au fond d'une grotte. Camille Knockaert de l'IFREMER
connaît tout des méthodes actuelles utilisées par l'HOMO
INDUSTRIALIS pour fumer son saumon.
« La méthode traditionnelle, chez le petit artisan, consiste à
confiner et exposer le saumon à de la fumée qui vient d'un feu
placé au-dessous ». Le problème de cette méthode traditionnelle,
c'est la maîtrise des températures suivant la saison, comme le
saumon est censé se fumer à froid, fumer toute l'année était
difficile, alors on a imaginé dès le début du 20ème siècle, de
séparer la production de fumée de l'enceinte de fumage et de les
relier par un tuyau. On va chauffer par pyrolyse des copeaux de
bois ou faire tourner une turbine contre une bûche pour produire de
la fumée.
Il existe même aujourd'hui une méthode industrielle de fumée sans
feu. La fumée liquide est atomisée dans une cellule, produisant un
brouillard de fumée. L'avantage de cette méthode, c'est sa facilité
d'utilisation à large échelle, sans risque d'incendie. Mais la
qualité du produit final dépend de bien d'autres paramètres que le
fumage, suivant les coûts de production que l'on veut
pratiquer.
Pour mieux comprendre le rapport entre la qualité du saumon et
sa méthode de production, Camille Knockaert nous décrit deux
extrêmes: « Le saumon le plus cher à produire n'a jamais été
congelé. Il est salé au sel, puis séché avant d'être fumé. Le
saumon le moins cher à transformer est fait à partir de produits
congelés, ce qui permet à l'industriel d'optimiser ses achats.
Ensuite, le sel n'est pas réparti sur le saumon, mais injecté sous
forme de saumure directement dans le produit. En terme de poids, le
produit gagne 10% à la sortie d'usine, alors que l'autre méthode
lui en fait perdre. Enfin, le saumon est recongelé ». D'après
Camille Knockaert, cette dernière méthode peut dénaturer quelque
peu le goût du produit final, mais sa production est optimisée et
le prix devrait donc être plus bas.
Le saumon: le test
On l'aura
compris, difficile de déterminer la qualité gustative d'un saumon
en regardant le paquet, d'où l'idée d'une petite dégustation façon
« A Bon Entendeur ». 10 saumons fumés de l 'Atlantique et du
Pacifique, trouvés sur le marché romand. 9 achetés en supermarché
et le dernier chez un grossiste genevois spécialisé dans les
produits de la mer. Nous avons installé nos 5 experts, un
restaurateur, un pêcheur, une diététicienne, un journaliste et un
poissonnier, dans une salle à température contrôlée de chez LUCAS
Poissons à Carouge.
Saumon sauvage SOCKEYE du
Pacifique
Möwenpick
99 fr. 50 le kilo
Note : 1.86 / 5
Saumon sauvage SOCKEYE du
Pacifique
ALMARE SEAFOOD
Aldi
39 fr. 90 le kilo
Note : 2.3 / 5
Canada Wild Salmon FINE FOOD
Coop
90 fr. le kilo
Note : 2.59 / 5
Saumon Chinook d'élevage de
Nouvelle-Zélande
Migros Sélection
139 fr. le kilo
Note : 3.1 / 5
Saumon M-Budget
Migros
26 fr.le kilo
3.27 / 5
Saumon fumé bio d'Ecosse
Globus
165 fr. le kilo (le plus cher du test)
3.29 points / 5
Saumon Bio irlandais
COOP NATURAPLAN
103 fr. le kilo
Note : 3.37 / 5
Saumon bio écossais
Migros
98 fr. le kilo
Note : 3.5 / 5
Saumon fumé irlandais de CT
Océane
Manor
87 fr. 50 le kilo
Note : 3.57 / 5
Saumon label rouge d'Ecosse
GASTROMER
55 fr. le kilo
Note : 3.91 / 5