Le personnage
Jusqu'ici Mariette Paschoud n'avait jamais caché ses positions politiques très à droite. Elle signait régulièrement des articles dans Le Pamphlet, un périodique aux idées ultra-conservatrices dirigé par son époux Claude Paschoud. Elle était également connue pour son engagement dans le Service complémentaire féminin, où elle officiait en tant que capitaine. En 1985, face aux caméras de la TSR, elle exhortait les femmes suisses à rejoindre les rangs de l'armée.
Les faits
Dans un reportage diffusé la veille de la mise à pied de l'enseignante, l'émission Temps présent revient sur les différents moments de l'affaire. En janvier 1986, Mariette Paschoud rédige dans Le Pamphlet un article élogieux sur la thèse d'Henri Roques, un auteur révisionniste français. A l'époque, seul un journaliste de la Gazette de Lausanne, Philippe Barraud, réagit à cette publication.
Le deuxième acte de l’affaire se joue fin juillet 1986. Henri Roques tient à Paris une conférence de presse. Le journal Libération en fait ses gros titres. Sur une photo publiée par le quotidien, Mariette Paschoud s'affiche aux côtés de l'auteur révisionniste auquel elle est venue apporter publiquement son soutien. Le correspondant à Paris du journal 24 heures relaie l'événement. Le scandale éclate. Les prises de position de Mariette Paschoud déclenchent une vague d’indignation dans toute la Suisse romande.
Figures du révisionnisme historique
L'affaire Paschoud ne représente ni un fait divers, ni un cas isolé. Derrière l’enseignante vaudoise se profile une constellation de personnages douteux, professant des idées d’extrême droite et animés par un profond antisémitisme. Avant Henri Roques, des auteurs comme Paul Rassinier ou Robert Faurisson ont alimenté la machine révisionniste. Dès la fin de la deuxième guerre mondiale, des voix ont contesté la gravité et parfois même la réalité du génocide perpétré contre le peuple juif. Par petites touches ou à grands traits, en usant d’arguments biaisés et d’une rhétorique retorse, elles cherchent à distiller le doute dans les consciences.
En Suisse, le Vaudois Gaston Amaudruz peut être considéré comme un précurseur du négationnisme. En 1949 déjà, il niait l'existence de l'Holocauste dans son ouvrage Ubu justicier au procès de Nuremberg. En 2000, ce militant néonazi sera même condamné à de la prison ferme pour propagande raciste et déni de la Shoah. Autre figure romande du négationnisme, Aldo Ferraglia, qui fut condamné en 1997 pour avoir diffusé en Suisse le livre de Roger Garaudy Les mythes fondateurs de la politique israélienne. Interview des deux hommes dans cet extrait de ce Temps présent.
Epilogue
Suite au scandale suscité par ses prises de position négationnistes, le Conseil d’Etat interdit dans un premier temps à Mariette Paschoud d’enseigner l’histoire. Mais les élèves de ses classes de français protestent et boycottent ses cours.
Le Conseil d’Etat finit par la suspendre définitivement de tout enseignement. Arguant son droit à la liberté d’expression, Mariette Paschoud recourt jusqu’au Tribunal fédéral où elle est déboutée en décembre 1987. L’Etat de Vaud ne l’ayant ni officiellement blâmée ni licenciée, elle sera replacée dans une poste administratif qu’elle occupera jusqu’à sa retraite.
Sept ans après l'affaire Paschoud, les Suisses acceptaient en votation l'introduction d'une norme pénale antiraciste permettant de poursuivre l'incitation à la haine raciale et la négation des crimes contre l'humanité.
Sophie Meyer pour RTSarchives