Le pouvoir est dans la rue, les étudiants réclament une révolution et sont prêts à la faire. Occupation des bâtiments universitaires, blocage de la machine économique par des grèves : la France est paralysée.
Ces événements enclenchés par la jeunesse étudiante parisienne de gauche vont gagner l'ensemble du pays pour constituer l'un des mouvements sociaux majeurs de l'Histoire du 20e siècle en France.
Chapitre 1
Sous les pavés, la plage
Mai 1968, l'équipe de l'émission phare de la Télévision Suisse Romande (TSR) Continents sans visa est à Paris pour rencontrer la jeunesse estudiantine, à l'origine du mouvement de protestation contre le pouvoir gaullien et la bourgeoisie. L'équipe, emmenée par le réalisateur Alain Tanner et le journaliste Jean-Pierre Goretta, filme au coeur des convulsions.
Occupations d'universités et d'usines, manifestations et revendications, le résumé de la situation et des événements qui constituent le point de départ de la plus grande vague de contestation du siècle dernier.
Chapitre 2
Comment penser librement à l'ombre d'une chapelle
Quelques mois après les événements de Mai 68, la contestation continue à l'université de Nanterre. Mais qui sont ces étudiants à l'origine d'un conflit social qui a marqué un tournant définitif vers la modernité ? Comment pensent-ils et organisent-ils la révolte contre l'ordre établi et la mise en place d'un idéal ?
En cours de travaux pratiques d'ethnologie, les étudiants parisiens discutent de la valeur de l'enseignement qui leur est dispensé à l'université de Nanterre. Pendant que certains d'entre eux écoutent leurs camarades avec attention, cigarette aux lèvres, d'autres se bécotent consciencieusement. Dans les mois qui suivent Mai 68, c'est tout le système universitaire que les étudiants veulent repenser. A leur façon.
En 1969, des étudiants de tendance trotskiste aident des ouvriers à rédiger un tract. Dans l'idéologie de ces jeunes militants, la force révolutionnaire c'est le prolétariat. Et pour changer la société, c'est donc sur lui qu'il faut s'appuyer. Du côté de la lutte ouvrière, on estime que le fossé entre ouvriers et étudiants est appelé à diminuer. La démocratisation des connaissances est en marche.
Chaque mercredi entre 19h30 et 22h, c'est l'heure du cours de psychanalyse freudienne selon Lacan à Nanterre. Très suivi, ce cours propose une séance de questions réponses avec l'enseignant, une méthode interactive jusque là inédite à l'université. Dans l'auditoire, faisant partie d'une minorité peu visible dans le paysage estudiantin de l'époque, une jeune femme de 19 ans revendique le fait de ne pas être politisée.
La révolution de mai 68 touche aussi les plus jeunes. Au lycée de garçons Henri IV, institution centenaire et traditionaliste, les élèves militent. Distribution de presse contestataire, organisation de comités d'action et rassemblements, ces adolescents suivent le mouvement lancé par leurs aînés dans les universités et font preuve d'une conscience politique aiguisée. Dans les lycées, les méthodes d'enseignement évoluent aussi.
Chapitre 3
CRS = SS
KEYSTONE - RUE DES ARCHIVES/AGIP
Le 24 mai, le général de Gaulle reprend l'initiative par un discours très attendu mais conspué par les manifestants qui se sont rassemblés devant la gare de Lyon. "La chienlit est au micro, le pouvoir est dans la rue" ou "De Gaulle, ta gueule" sont des slogans scandés par les manifestants qui écoutent la retransmission du discours. La rupture entre la tête de l'Etat et la rue est consommée.
Durant la nuit suivante, les CRS et les étudiants s'affrontent au quartier latin avec une violence encore jamais atteinte depuis le début du mois. Les étudiants montent des barricades, la police réplique avec du gaz lacrymogène. Les affrontements sont violents, ils feront 7 morts et des centaines de blessés entre mai et juin 1968.
Pour Continents sans visa, Alain Tanner et Jean-Pierre Goretta sont dans la rue.
Chapitre 4
La chientlit, c'est lui
Le 30 mai, au lendemain du départ subit du Général de Gaulle pour Baden-Baden, près d'un million de personnes manifestent sur les Champs-Elysées leur soutien aux institutions. En tête du cortège, André Malraux, vivement salué par la foule, et Michel Debré, un des rédacteurs de la Constitution de la Ve république.
Cette manifestation suit l'annonce à la sortie du conseil des ministres de la dissolution de l'Assemblée nationale. Son impact, allié au discours volontariste du Général de Gaulle, marquera fortement les consciences: l'heure du retour à l'ordre a sonné.
Quelques jours après les manifestations de Mai 68, François Mauriac défend le Général de Gaulle, le seul selon lui à même de sauver le pays du chaos contestataire.
Le 13 février 1969, Georges Pompidou accorde une interview exclusive à la TSR et revient sur les événements de Mai 68 qui ont déstabilisé la France.
Chapitre 5
Je suis venu, j'ai vu, j'ai cru
Daniel Cohn-Bendit est une figure emblématique de la contestation de Mai 68. Fondateur du Mouvement du 22 mars, instigateur de l'occupation et de la grève de la Sorbonne, ses qualités d'agitateur finiront par le faire expulser de France.
Du 31 août au 3 septembre 1968, Daniel Cohn-Bendit participe au Congrès anarchiste international de Carrare qui doit jeter les bases d'une internationale anarchiste. "Dany le rouge" y fait une intervention remarquée mais peu appréciée.
Chapitre 6
Ne perdez pas votre vie à la gagner
KEYSTONE - RUE DES ARCHIVES/AGIP
En plein Mai 68 à Paris, Jean-Pierre Goretta et Alain Tanner rencontrent des ouvriers grévistes des usines Renault de Billancourt. Cet extrait de Continents sans visa capte ce moment intense de la vie socio-politique française.
Les ouvriers revendiquent une amélioration substantielle de leurs conditions de travail. Ils évoquent tour à tour la pénibilité de leur labeur en usine et des salaires qui ne permettent pas de vivre décemment, ou encore des pensions de retraites insuffisantes qui poussent les ouvriers à ne jamais s'arrêter de travailler. Ils sont mécontents et ils sont motivés à obtenir ce qu'ils demandent. "On bouffera peut-être des pavés, mais on tiendra le coup jusqu'au bout !"
La ténacité des ouvriers leur donnera gain de cause. Les 25 et 26 mai, les syndicats et le gouvernement négocient les accords de Grenelle qui prévoient notamment une augmentation de 35% du salaire minimum et de 10% des salaires réels.
Chapitre 7
L'imagination au pouvoir
La révolution de Mai 68 a laissé des marques dans les rues parisiennes. Les activistes ont utilisé les murs comme moyen de propager les idées libertaires. Quelques slogans deviendront célèbres comme «Défense d’interdire» ou «Sous les pavés, la plage».
Diffusé sous le titre Ecrit sur des murs, Temps présent rappelle ici que la liberté, quand elle est réprimée, se répand sur les façades.
A l'université de Vincennes à Paris, des étudiants gèrent de façon autonome un atelier de sérigraphie. De cette imprimerie artisanale sortent des centaines d'affiches au ton contestataire et revendicateur et au style visuel emblématique de Mai 68.
Bien avant les réseaux sociaux et Internet, les affiches constituent le meilleur relais pour transmettre le message de la revendication.
C’est dans le complexe universitaire de Nanterre La Folie qu'a pris naissance le mouvement de contestation étudiante qui a déferlé sur la France au mois de Mai 1968.
Un an après les événements, une équipe de reportage de l’émission Le Point revient sur les lieux. L’ambiance est toujours électrique, à en croire la présence de fourgons de police en faction à 500 mètres des bâtiments universitaires. Dans cet étrange no man’s land de banlieue, la vie bouillonne entre débats d’idées et insouciance.
Chapitre 8
Ce n'est qu'un début, continuons le combat !
Trente ans après Mai 68, que reste-t-il du vent de révolte qui a soufflé sur la France ? Quels souvenirs et quel héritage de cette vague massive de contestation ? En mai 1998, l'émission Faxculture interroge des anonymes.
Mai 68, c'était il y a 50 ans. Et aujourd'hui, où en sommes-nous dans nos revendications sociales et nos idéaux de société ?