Le Carnaval des Bolzes
Le carnaval a une longue tradition à Fribourg. Depuis le Moyen Âge, on festoie dans les rues de la ville notamment dans le quartier de l'Auge situé en Basse-Ville de Fribourg. Des cohortes de gamins se déguisent et se retrouvent dans les rues pour fêter carnaval. L'Auge est alors un quartier populaire ou l'on parle le bolze, un mélange de suisse allemand et de francais. Pour les habitants de la "Basse", le carnaval est un exutoire, l'occasion de rappeler aux autorités d'en-haut qu'ils existent. Les gosses de bourgeois de la "Haute" qui s'aventurent dans le quartier n'ont qu'à bien se tenir. A carnaval, les rôles sont inversés, du moins le temps de la fête.
A la fin des années 60, un groupe d'habitants de l'Auge, soucieux d'occuper les enfants du quartier durant les jours de congé et d'apaiser les rivalités entre la Haute et la Basse-Ville, organise des ateliers de fabrication de masques. Un cortège est mis sur pied dans la foulée, en 1968 le Carnaval des Bolzes est né.
Avec les années, l'organisation du carnaval prend de l'ampleur. Sa préparation mobilise une population de passionnés profondément attachés à cette tradition. En 1973, l'équipe de Temps présent s'immerge au coeur de cette célébration pas comme les autres.
Les Rababous de l'Auge
Durant carnaval, tout est permis, ou presque. L'ordre établi est bouleversé. Chacun se promène grimé. Les conventions et les règles sociales sont oubliées... pour un temps.
Dans le quartier de l'Auge, huit jours avant carnaval, les enfants se métamorphosent en petits Rababous. Dans des simulacres de bagarres, cachés sous des masques, les adolescents du quartier profitent de l'occasion pour régler leurs comptes à coup de bas rembourrés. Nous sommes en février 1963.
Un quartier en fête
Février 1969, tout le quartier est en fête, Carrefour assiste au grand cortège ainsi qu'à l'exécution du Grand Rababou, une immense poupée de paille et de chiffons, rendue coupable de tous les maux du quartier. A l'origine, le Rababou était un voleur de bois qui allait chaparder dans les forêts de la Haute pour chauffer les maisons de la Basse. Petit à petit, il devient une sorte de bonhomme hiver fribourgeois dont la mise à mort prend alors une portée symbolique.
L'annulation du carnaval
En 1974, le Carnaval des Bolzes est annulé en raison des difficultés financières des habitants de l'Auge. Ceux-ci se sentent oubliés, en signe de protestation ils décident de suspendre l'organisation des festivités.
C'est seulement en 1977, après trois ans de silence que le carnaval sera à nouveau célébré par les Bolzes avec la collaboration des habitants du quartier de la Neuveville. Enseignant, cofondateur de la manifestation, Bruno Cesa est au micro de la Télévision Suisse Romande (TSR) pour le grand retour du Carnaval des Bolzes. C'est l'occasion également de rencontrer Marcel Kessler, artisan du Grand Rababou.
Le Grand Rababou
Préparer carnaval ce n'est pas rien. A Fribourg, ce sont les enfants du quartier qui décorent le Grand Rababou. C'est ensuite déguisés qu'ils défilent dans les rues de la ville. La fête se poursuit avec le procès de la marionnette géante et sa mise à mort. Au cri de "Ouh bouh Rababou", cette dernière est brûlée, emportant avec elle l'hiver et ses maux.
Aujourd'hui le Carnaval des Bolzes attire des milliers de visiteurs venus de toute la Suisse et rassemble dans le quartier de l'Auge, les habitants de la Basse comme de la Haute-Ville.
Salomé Breguet pour Les archives de la RTS