Tenir sa droite, rouler en file indienne, ne pas se faufiler entre les voitures à l'arrêt. En 1962 à Genève, dans une circulation moins dense qu'aujourd'hui, le code de (bonne) conduite des deux-roues a deux objectifs: veiller à leur propre sécurité et ne pas entraver la fluidité du trafic.
L'ASPIC
Attention, danger! En 1978, la ville du bout du lac compte quelque 72'500 cyclistes et déplore plus de 4'800 accidents. Il est temps d'agir pour améliorer le sort des adeptes de la bicyclette: une première pétition est lancée en 1979 pour la création de pistes cyclables. Les explications de Marie-Thérèse Imboden.
Dans la foulée, l'ASPIC, association pour l'intérêt des cyclistes, voit le jour en 1980, présidée par Madame Corinne Goehner-da Cruz. Et elle aura du pain sur la planche car pédaler en ville est très risqué. Les activistes du vélo se disent pourtant confiants.
Les autorités ont compris que le moment est venu de se pencher sur le problème.
En effet, le maire de Genève Claude Ketterer a bien compris et veut faire avancer le dossier épineux: il nomme en 1986 une Madame "Deux Roues" en la personne de Marie Tecklenburg Bonnard, architecte urbaniste et ...cycliste chargée d'être un véritable aiguillon. Celle-ci résume bien les enjeux de son travail sous le feu des voitures, des transports publics et même des piétons.
Les cyclistes continueront cependant à être victimes du manque de considération des automobilistes et manifesteront à plus d'une reprise leur ras-le-bol, comme ici, en 1988.
Feu vert aux pistes cyclables
L'initiative déposée en 1985 demandant la réalisation d'un réseau cyclable complet en ville de Genève est plébiscitée en votation par 82% des voix le 4 juin 1989. Après un travail de longue haleine mené par un bureau d'études de la place, c'est fait, les aménagements destinés aux vélos fleurissent dans la cité: 35 km de pistes cyclables sont mis à disposition de la petite reine, pour la somme de 5 millions de francs. Reste la grogne de certains automobilistes...
1992, année de la bicyclette! Les pratiquants du biclou seront amenés à tripler selon les prévisions. Il faut dire que l'automobiliste genevois se retrouve plus souvent qu'à son tour coincé dans les bouchons. Au point que certains d'entre eux paraissent vouloir choisir une certaine vélocité. En un clin d'oeil amusé, le test...
Mais quoi qu'en disent les mauvais esprits, la bécane a plein d'atouts en sa faveur.
La promotion du vélo
Dès 1986, une initiative de l'ASPIC en collaboration avec d'autres associations pro-vélo propose des vélos gratuits en libre-service. 200 bicyclettes peintes en rose sont mises à disposition des habitants à Genève. Malheureusement les "vélos roses" finiront rapidement au fond du Rhône.
Pourtant cette action refleurira avec la naissance bien des années plus tard, en 2002, de "Genèveroule" qui cumule deux missions: la promotion de la petite reine et l'insertion professionnelle.
Se déplacer de manière commode, faire du sport et le plaisir d'être à l'air et de ne pas polluer.
La bicyclette a ses défenseurs à Genève, parmi eux Gilles Petitpierre, alors conseiller aux Etats. Les avantages de ce moyen de locomotion lui paraissent évidents et l'hostilité des automobilistes ne le démonte pas. Elle lui ferait même presque plaisir, semble-t-il.... Pour sa part, le Conseil municipal genevois ouvre les cordons de sa bourse pour encourager l'usage du vélo.
Autres manières encore de favoriser l'utilisation de la bicyclette: assurer son entretien, redonner une jeunesse au vélo de collection, remettre en selle le vieux biclou ou encore apprendre aux jeunes à manier les outils pour réparer leur "bike". Pour tout cela, un lieu: l'atelier Péclôt 13, créé dès 1989, en mode alternatif dans la cité de Calvin.
En chantier
A Genève, la bicyclette tente donc depuis 40 ans de gagner des adeptes et de se frayer une place en ville. Une décennie après l'entrée en vigueur des premières pistes destinées aux vélos, la commune lui a construit en 2004 un itinéraire cyclable qui atteint 43% du réseau total. En 2020 selon les chiffres officiels, 59% des 220 km de voiries communales sont des voies cyclables. Et le trafic cycliste est en augmentation.
En 2013, une certaine Lisa Mazzone, coordinatrice de Pro Vélo Genève, association qui a succédé en 2007 à l'ASPIC, décerne à l'aménagement genevois les bons et mauvais points.
Après une année 2022 marquée par une hausse des accidents impliquant notamment les vélos électriques, on annonce à l'automne 2023 un net recul des victimes d'accidents cyclistes. Un coup de pédale dans la bonne direction...
Marielle Rezzonico pour les archives de la RTS