En 2004, près de 60% des ménages suisses disposent d'un accès à Internet depuis leur domicile. Les chatrooms et autres forums de discussion font du cyberespace un vrai lieu de communication. Pas étonnant que le web soit devenu un lieu de drague et de rencontres comme un autre. Dès le début des années 2000, les sites de rencontres virtuelles vont se démocratiser en Suisse.
L'amour en un clic
Meetic est mis en ligne pour la première fois en 2002. En 2004, le site est leader dans le monde francophone et compte 6 millions d'inscrits, dont de nombreux célibataires suisses en quête d'amour. Pour consulter les profils des autres utilisateurs, il suffit de se connecter à son ordinateur. Ensuite on peut discuter et faire connaissance, le tout tranquillement installé chez soi. Un concept simple, mais révolutionnaire.
Pionnier dans le secteur de la rencontre en ligne, Meetic veut être un lieu sécurisé où les femmes se sentent à l'abri des mauvaises rencontres. L'entreprise emploie des modérateurs qui surveillent le contenu des échanges entre les utilisateurs. Ces mêmes modérateurs vérifient aussi que les profils ne sont pas des faux. Pas question de laisser un abonné utiliser la photo d'un acteur célèbre pour maximiser ses chances de rencontres ! Ici on vend du vrai, du sincère, de la drague honnête.
Visite à Paris dans les locaux de cette agence matrimoniale d'un nouveau genre.
Mais le virtuel ne fait pas tout. Meetic l'a bien compris et propose à ses utilisateurs de participer à des soirées payantes. Les célibataires peuvent ainsi se rencontrer en chair et en os. En 2005, c'est au Casino de Montreux que le site de rencontres propose de quitter son écran d'ordinateur pour la soirée, afin de passer au mode réel. Certains ont déjà chatté sur le site et vont enfin se voir, d'autres sont juste curieux. Mais pour tous les participants, l'enjeu reste le même : rencontrer quelqu'un.
Stéphanie, une jeune célibataire fribourgeoise de 21 ans, est venue tenter sa chance. Utilisatrice régulière du site Internet, elle cherche activement un amoureux. Malheureusement pour elle, la grande rencontre n'aura pas lieu ce soir-là.
La version helvétique
En Suisse aussi, on a les compétences pour faire des sites internet de dating. Le portail de rencontres payant swissfriends.ch existe depuis 1999 et ne recense que des célibataires suisses ou vivant dans les zones limitrophes. En 2004, près de 40000 personnes sont inscrites sur ce site et espèrent y trouver celui ou celle qui fera battre leur coeur.
Swissfriends est certes plus local, mais le principe reste le même. On paye un abonnement pour rencontrer virtuellement d'autres célibataires, et plus si affinités. Et là aussi, il faut montrer patte blanche. Propositions échangistes et photos trop intimes sont écartées, ici on vient pour trouver l'amour, la relation à long terme. Swissfriends promet des milliers de rencontres et assure avoir déjà provoqué une centaine de mariages.
Exemple avec Carole et Marcel, qui se sont rencontrés sur ce site.
L'avis de l'expert
Certains deviennent même experts de la rencontre virtuelle. Lewis Wingrove, alias Nick, a fréquenté un site de rencontres pendant un an. Il a tenu un blog sur son vécu, qui est devenu un livre. La version de Nick contraste avec le conte de fées un peu fleur bleue vendu par les sites de rencontres. Parce que non, tout le monde ne recherche pas le grand amour sur Internet. Ou disons pas uniquement. Le web permet aussi de rencontrer, voire d'accumuler, des relations plus éphémères.
Dans cette interview de 2006, Nick évoque son expérience de "chasse" sur les sites Internet : les femmes qu'il sollicite pour discuter, celles qui viennent discuter avec lui. Mais il souligne également la solitude paradoxale qui émane de ces lieux de rencontres virtuels. Et admet que concrètement, malgré l'apparente abondance de rencontres possibles, il s'agit bien souvent d'être "tout seul avec une bière à quatre heures du matin".
La tendance à se tourner vers des sites de rencontre en ligne ne s'est pas démentie depuis. En 2018, 1,3 millions de Suisses surfent régulièrement sur des sites de dating online. Le chiffre d'affaires des portails de rencontres actifs en Suisse se montait pour cette même année à plus de 41 millions de francs. Un chiffre qui ne cesse de progresser. Le marché de la rencontre reste une bonne affaire.
Anne-Isabelle Gomez pour Les archives de la RTS