Herta Müller
- Culture et arts
- Vidéo 10 min.
13 avril 1989
Hôtel
En 1989, l'émission Hôtel consacre un entretien à l'écrivaine allemande d'origine roumaine Herta Müller à Berlin. Elle évoque son livre L'homme est un grand faisan sur terre et s'exprime sur les menaces de mort qu'elle a reçues. Retour en arrière avec le prix Nobel de littérature 2009.
Herta Müller est née le 17 août 1953, dans le village germanophone de Nitzkydorf, en Roumanie dans la région du Banat, qui compte une minorité souabe. A Nitzkydorf, personne ne parlait le roumain, hormis quelques fonctionnaires chargés de faire régner l'ordre du dictateur Nicolae Ceausescu (1918-1989). Très tôt, Herta Müller s'est rapprochée d'un groupement politique, l'Aktionsgruppe Banat, rassemblant des auteurs germanophones qui revendiquaient la liberté d'expression. C'était à la fin des années 1960, Herta Müller n'avait pas encore commencé à écrire.
Après des études à Timisoara, elle travaille comme traductrice dans une usine de machines d'où elle est renvoyée pour avoir refusé de coopérer avec la Securitate et de donner des renseignements sur ce fameux groupe. Elle vit alors d'expédients. C'est sous la force de l'oppression qu'elle commence à écrire: «J'ai dû apprendre à vivre en écrivant et non l'inverse. Je voulais vivre à la hauteur de mes rêves, c'est tout.»
Son premier livre, Niederungen, est publié en 1982, mais expurgé par la censure. Il paraît de façon complète en 1984 en Allemagne de l'Ouest, où Herta Müller va finir par s'exiler en 1987 avec son mari d'alors, l'écrivain Richard Wagner.
Cette arrivée en Allemagne est à la fois une rupture, qu'elle raconte dans Reisende auf einem Bein (1989), et un retour aux sources; elle y retrouve sa langue d'origine: «Désormais le lien te semble corde». Si elle n'a jamais vraiment parlé roumain, c'est pourtant sa vie en Roumanie sous la dictature de Ceausescu, véritable école de la peur, qui nourrit toute son oeuvre – esthétique de la résistance, littérature contre l'oubli. Voilà vingt ans que Ceausescu est mort et le pays n'a toujours pas fait son autocritique : «En Roumanie, on fait comme si ce passé s'était évanoui dans les airs. Le pays tout entier souffre d'amnésie», écrit Herta Müller.