Les Verts prévoient de faire appel au peuple si le Parlement n'abandonne pas l'énergie nucléaire en Suisse. Leur comité directeur a décidé de soumettre un projet d'initiative populaire à l'assemblée du parti début avril.
Le comité directeur des Verts juge que le débat autour de l'exploitation de l'énergie nucléaire a pris une nouvelle tournure depuis la catastrophe en cours au Japon. Quelle que soit leur appartenance politique, les citoyens peuvent désormais s'imaginer un avenir sans nucléaire, écrit-il au terme d'une séance extraordinaire vendredi dans un communiqué.
Le Parlement aura l'occasion de s'exprimer sur la demande du groupe écologique de sortir du nucléaire. Une session spéciale du Conseil national sur la politique nucléaire de la Suisse devrait se tenir, vraisemblablement lors de la session d'été, à la demande du groupe des Verts.
Celui-ci a obtenu le soutien des groupes PS, PDC/ PEV/PVL et PBD. Si la proposition des Verts de sortir du nucléaire devait être rejetée au Parlement, le parti ira devant le peuple, l'accord de sa base paraissant une formalité.
Le texte de l'initiative est en cours d'élaboration. La récolte des signatures pourrait démarrer aussitôt après l'éventuel refus du Parlement.
Dépôt avant les fédérales
Si le National ne devait pas débattre de la politique nucléaire en juin, les Verts lanceraient quand même leur récolte de signatures cet été, a indiqué à l'ATS leur président Ueli Leuenberger. Celui-ci se dit certain de réunir les 100'000 paraphes nécessaires en deux temps trois mouvements, surtout que les Verts ne se voient pas partir seuls au combat.
Il espère ainsi pouvoir déposer l'initiative encore avant les élections fédérales d'octobre. Le président des Verts ne s'inquiète pas du fait que le peuple n'aurait à se prononcer que dans plusieurs années, une fois la catastrophe japonaise sortie de l'actualité. Ueli Leuenberger s'imagine une "campagne-éclair".
40% de la consommation
Dans un communiqué publié vendredi, la fondation Sécurité énergétique apporte de l'eau au moulin des Verts. Le rapport Weinmann commandé par cette fondation estime le potentiel d'économie d'électricité conservateur à 13 tétrawattheures, la Confédération parlant même de 19 TWh.
Le potentiel de production à partir d'énergies renouvelables étant de 15 TWh, le total de l'électricité que l'on peut potentiellement économiser ou produire proprement atteint 28 TWh, soit davantage que la production nucléaire suisse qui se montait, en 2010, à 25 TWh, écrit la fondation.
Autres chiffres, le nucléaire représente quelque 30% de la production électrique consommée par les 127 millions de Japonais, qui atteint au total 1,25 million de gigawattheures. En Suisse, le nucléaire constitue près de 40% de la consommation totale équivalente à près de 63'000 GWh.
Deux autres initiatives en cours
Ce projet d'initiative porte à trois le nombre de textes en faveur de la sortie du nucléaire. Les Verts occupent déjà le terrain avec leur initiative "pour une économie verte" dont la récolte des signatures a démarré la semaine dernière, la veille du séisme au Japon. Le texte demande que l'économie suisse réduise de manière drastique sa consommation de ressources.
Les Verts soutiennent une troisième initiative, lancée elle par le PS qui en est à la récolte de signatures. Surnommée "Cleantech", l'initiative "De nouveaux emplois grâce aux énergies renouvelables" demande qu'à partir de 2030, ces dernières couvrent la moitié des besoins énergétiques en Suisse. Autrement dit une sortie du nucléaire à cet horizon.
Vu les événements au Japon, le PS a d'ailleurs annoncé jeudi qu'il déposerait son texte plus vite que prévu, soit ces prochaines semaines au lieu de mai ou juin comme initialement prévu.
ats/olhor
Les Suisses divisés sur l'énergie atomique
L'énergie atomique a fait l'objet de quelques votations et les initiatives pour son abandon ont échoué jusqu'ici en Suisse. Tour d'horizon des votations passées.
En novembre 1957, les Suisses approuvent un article constitutionnel faisant de l'énergie nucléaire une compétence fédérale. Après la mise en service de trois centrales nucléaires helvétiques entre 1969 et 1972, les préoccupations liées à l'environnement attisent les critiques contre l'énergie atomique durant les années 70.
Entre 1979 et 1984, trois initiatives hostiles à l'énergie nucléaire sont toutefois rejetées en votations. Après la catastrophe de Tchernobyl (avril 1986) la sécurité de ces installations est remise en doute.
En septembre 1990, le peuple approuve une initiative demandant un moratoire de dix ans sur la construction de nouvelles centrales nucléaires mais il refuse l'abandon progressif de cette énergie. En mai 2003, les Suisses rejettent deux initiatives. L'une demandait un nouveau moratoire de dix ans, l'autre l'abandon progressif du nucléaire.
Par la suite, la gauche et Les Verts ont maintenu cette option en préconisant le recours aux énergies douces. Les milieux économiques et les partis bourgeois, craignant une pénurie d'électricité, ont plaidé pour le nucléaire.