"Il y a une insécurité grandissante à Abidjan, en Côte d'Ivoire et nous assistons à une augmentation brutale des déplacements", a expliqué une porte-parole du HCR, Melissa Fleming lors d'un point de presse.
"Selon nos estimations, il pourrait y avoir jusqu'à un million de personnes rien qu'à Abidjan qui ont été déplacées", a-t-elle ajouté, insistant sur le fait que ce ne sont que des estimations.
Plus globalement, le HCR parle désormais de 700'000 à un million de personnes déplacées dans le pays. Les personnes fuient leur maison pour d'autres régions plus sûres du pays en raison des "craintes d'une guerre", a encore souligné Mme Fleming.
100'000 réfugiés au Liberia
Jusqu'à présent, l'ONU faisait état de 500'000 déplacés dans tout le pays et de plus de 460 morts depuis décembre, suite aux violences nées de la crise politique qui secoue la Côte d'Ivoire.
Le président sortant Laurent Gbagbo refuse depuis le scrutin du 28 décembre 2010 de céder la place au président internationalement reconnu Alassane Ouattara, suscitant une tension croissante dans le pays et la crainte d'une nouvelle guerre civile.
Alors que la communauté internationale ne cesse de dénoncer une détérioration de la situation, le HCR a estimé que le nombre de réfugiés avaient également augmenté pour atteindre les 100'000 personnes ayant fui au Liberia.
L'agence onusienne craint même que le conflit ne fasse tâche d'huile dans le pays voisin de la Côte d'Ivoire. "Nous sommes très préoccupés par le fait que ce conflit puisse s'étendre au Liberia", a souligné Mme Fleming expliquant que la frontière de 700 km entre les deux pays était poreuse et que de nombreuses armes circulaient.
L'Organisation internationale pour les Migrations s'est pour sa part alarmée de la situation dans l'ouest du pays, où les humanitaires n'ont qu'un accès restreint et une vision peu claire du nombre de personnes y ayant trouvé refuge.
Pénurie de médicaments
Les agences humanitaires se sont également inquiétées d'une poursuite des violences dans cette région. Le Haut commissariat de l'ONU pour les droits de l'homme a indiqué qu'il tentait d'obtenir plus de détails sur des allégations que des ressortissants africains, notamment du Burkina Faso, de Guinée, du Mali, du Sénégal et du Togo auraient été tués près de la ville de Guiglo (ouest).
"Notre bureau fait des recherches sur ces informations", a expliqué le porte-parole du Haut commissaire, Rupert Colville. "Nonobstant cette situation particulière, il y a des indications claires que des citoyens d'Afrique de l'ouest... continuent de faire l'objet d'attaques ciblées", a-t-il ajouté.
"Nous sommes extrêmement préoccupés de la dégradation de la situation en Côte d'Ivoire étant donnée les incitations" à la violence du président Gbagbo et de ses hommes, a-t-il insisté.
Les violences mettent par ailleurs "en péril l'accès aux soins pour les populations", car "le personnel médical fuit les établissements de santé des zones de conflit", essentiellement Abidjan et l'Ouest ivoirien, selon Médecins Sans Frontières (MSF).
"A ce problème s'ajoute une pénurie de médicaments, compliquant d'autant l'accès aux soins de santé des populations", précise MSF. Les sanctions occidentales contre le régime du président sortant Laurent Gbagbo ont gravement perturbé l'approvisionnement en médicaments.
Commission d'enquête internationale
Les préoccupations des agences onusiennes rejoignent celles de la communauté internationale alors que les Nations Unies étaient sous pression vendredi pour renforcer leur mission en Côte d'Ivoire et protéger davantage les civils.
Selon une source proche du dossier, des "discussions" sur la crise devraient se tenir dès vendredi au Conseil de sécurité à New York. Le Conseil des droits de l'homme a décidé quant à lui de créer une commission d'enquête internationale indépendante sur les violations commises depuis la présidentielle.
afp/olhor
L'ONU est sous pression
L'ONU était vendredi sous pression pour renforcer sa mission en Côte d'Ivoire et protéger davantage les civils, mais le gouvernement du président sortant Laurent Gbagbo a affirmé que la "force" était "une voie sans issue", appelant à un "dialogue interivoirien".
Face à l'aggravation de la crise, les dirigeants ouest-africains ont appelé jeudi l'ONU à renforcer le mandat de sa mission en Côte d'Ivoire (Onuci) et à imposer des sanctions "plus contraignantes" à l'encontre du président sortant.
Selon une source proche du dossier, des "discussions" sur la crise, qui a déjà fait 462 morts selon l'ONU, devraient se tenir dès vendredi au Conseil de sécurité à New York. Le président français Nicolas Sarkozy a indiqué que Paris comptait proposer une résolution pour demander à l'Onuci "d'interdire au moins les armes lourdes dans Abidjan", voyant "un scandale" dans ces tirs "contre des populations civiles innocentes".
Les propositions ouest-africaines sont "un peu absurdes", a jugé vendredi Ahoua Don Mello, le porte-parole du gouvernement de M. Gbagbo. "Il faut arrêter la violence, c'est par le dialogue qu'on peut s'en sortir. La force ne va pas régler le problème, la force est une voie sans issue, de non-sagesse", a-t-il estimé.
Selon lui, l'ONU "veut protéger les civils en envoyant des bombes sur eux, comme en Libye". "Notre objectif est de rester dans le cadre de l'Union africaine, avec un Haut représentant, véritablement neutre, qui ouvre un dialogue interivoirien. On souhaite sa nomination le plus rapidement possible", a-t-il ajouté.
L'ONU a "certifié" les résultats du scrutin présidentiel du 28 novembre annoncés par la commission électorale et donnant vainqueur Alassane Ouattara, reconnu président par la communauté internationale.
Le Conseil constitutionnel, dirigé par un proche de Laurent Gbagbo, avait invalidé ces résultats et proclamé M. Gbagbo réélu. Le porte-parole du gouvernement de M. Gbagbo a assuré qu'"il ne peut pas y avoir de discussions sans concessions". Mais "le partage du pouvoir n'est pas la solution", a-t-il précisé.