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Livre: la face cachée des Schtroumpfs dévoilée

Le livre pointe une société dirigiste, avec un chef unique et omnipotent, le grand Schtroumpf. [Jean-Pierre Amet]
Le livre pointe une société dirigiste, avec un chef unique et omnipotent, le grand Schtroumpf. - [Jean-Pierre Amet]
Les Schtroumpfs, charmants lutins bleus ou horribles staliniens, racistes et antisémites ? Pour y schtroumpfer plus clair, le romancier Antoine Buéno offre dans "Le Petit Livre bleu" une lecture socio-politique inédite et ludique de la saga de Peyo.

Maître de conférence à l'Institut d'études politiques de Paris et romancier, l'auteur, qui ne veut en rien casser la magie des petites créatures bleues, n'en analyse pas moins leur société avec les armes féroces de la science politique et de la schtroumpfologie.

Après avoir traité de questions fondamentales sur la nature biologique ou la sexualité des Schtroumpfs -- au fait, pourquoi n'y a-t-il qu'une seule schtroumpfette ? --, Antoine Buéno tente de démontrer que leur société "est un archétype d'utopie totalitaire empreint de stalinisme et de nazisme".

Le nom et la "novlang" schtroumpf étaient nés lors d'un déjeuner entre Pierre Culliford, alias Peyo, et son complice André Franquin, en avril 1958 : au lieu de "passe-moi le sel !", Peyo lança "passe-moi le schtroumpf !" Ce nom imprononçable devint "Puffi" en Italie, "Pitufos" en Espagne, "Smurfs" en anglais, "Stroumfakia" en grec ou encore "Kumafu" en japonais. Et "Schlümpfe" Outre-Rhin, schtroumpf signifiant chaussette en allemand...

Une société totalitaire

Né en 1928 à Bruxelles, Peyo, le père des Schtroumpfs, avait connu l'occupation allemande et n'en gardait aucune nostalgie mais, relève Antoine Buéno, "une oeuvre peut véhiculer une imagerie que son auteur, de bonne foi, ne cautionne pas (...). Les Schtroumpfs reflèteraient donc plus l'esprit d'une époque que celui de leur créateur".

Les Schtroumpfs vivent en autarcie. C'est une société collectiviste et dirigiste, avec un chef unique et omnipotent, le grand Schtroumpf. Ils prennent tous leurs repas au réfectoire, sont puritains jusqu'au ridicule. Le racisme est patent dans l'album des "Schtroumpfs noirs" où la pureté du sang devient vitale et le brun, laid. Ou dans celui de "La Schtroumpfette", quand le blond aryen est idéalisé, estime l'auteur. Ce petit monde est aussi mobilisé contre un ennemi juré, Gargamel, dont le profil rappelle une caricature antisémite et dont le chat s'appelle Azraël.

C'est le fils de Peyo, Thierry Culliford, qui a poursuivi l'oeuvre de son père après son décès en 1992. Dans ses albums, beaucoup plus pédagogiques, "le village des Schtroumpfs se fait plus explicitement métaphore du réel", souligne l'auteur.

Le 3 août, un film américano-belge de Raja Gosnell, mi-animé en 3D et mi-live, fera surgir "Les Schtroumpfs" sur les écrans. Les créatures bleues investiront pour l'occasion le coeur de New York. Le film sera précédé au Lombard du 29e titre de la série, "Les Schtroumpfs et l'arbre d'or". En novembre, sortira une "Encyclopédie des Schtroumpfs".

afp/olhor

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