Pour les
habitants des pays du Sahel, ce cours d’eau représente une richesse
incommensurable, puisqu'il permet à plus de 100 millions de personnes de vivre
des activités de la pêche, de l’agriculture, du commerce et de l’industrie,
selon l’Agence française de développement.
Toutefois, le phénomène d'ensablement, les
eaux usées et les déchets industriels qui y sont rejetés, la propagation de
plantes aquatiques envahissantes ainsi qu’une pluviométrie globalement en
baisse mettent en péril le fleuve, s'alarme l’Autorité du Bassin du Niger (ABN)
qui regroupent les pays riverains (Guinée, Mali, Burkina Faso, Niger, Nigeria,
entre autres). Certains géographes estiment même que son assèchement complet
surviendra dans quelques décennies.
A Niamey, l’Association de défense des
droits des consommateurs (ADDC-Wadata), a fait de la lutte contre la pollution
des eaux du Niger son cheval de bataille. En collaboration avec un chercheur de
l’Université de la ville, elle a mené une étude aux conclusions alarmantes,
puisqu'elle a permis de distinguer une trentaine de facteurs de dangers.
Des bactéries pathogènes
"En analysant des échantillons d'eau, nous avons pu déceler
énormément de bactéries. Certaines, comme les salmonelles et les
staphylocoques, sont vectrices de la fièvre typhoïde, du paludisme de graves
infections intestinales, respiratoires ou cardiaques", expose à l’ATS le
président de l’ADDC, Maman Nourri.
Selon lui, parmi les milliers de Niaméens
riverains du fleuve, un bon nombre souffre de ce type de maladies, tout comme
de maladies de la peau.
En outre, des détritus organiques et
plastiques ont été repérés, de même que des acides, des pesticides et des
colorants en provenance des usines agro-chimiques (des industries
pharmaceutiques, une brasserie, un abattoir et une tannerie, notamment) qui
bordent le fleuve.
"Les poissons et la faune aquatique
meurent. C'est toute la biodiversité du fleuve qui est menacée", souligne
M.Nouri
Normes foulées aux pieds
"Des normes existent mais elles ne sont
pas respectées", constate au Ministère nigérien de l’environnement, le
directeur adjoint de l’environnement et du cadre de vie Souley Moussa Ali. Ce dernier précise que le taux de produits
chimiques mesuré a été jusqu’à dépasser de 114 fois le seuil autorisé.
"Avant de sanctionner, nous voulons
mener un travail de sensibilisation auprès des industriels. Les premiers
contacts ont été établis", assure-t-il. Selon M. Ali, en 2008, 15'119 m3
d’eaux usées par jour ont été rejetées dans le fleuve, dont 20% en provenance
de l’industrie et 80% d'usage domestique. La ville ne dispose en effet pas de
système d'évacuation et de traitement des eaux usées et très peu d’usines ont
leur propre station d’épuration.
Les déchets de l'hôpital à l'eau
L’hôpital
national de Niamey est une de ces rares exceptions. Pourtant, "en raison
de factures d’électricité impayées, la station est à l’arrêt et les eaux
insalubres se retrouvent dans le fleuve", affirme M Ali.
Selon
l’étude de l’ADDC, l’ensablement du fleuve, dû notamment aux eaux de
ruissellements qui détruisent les berges et au vent, représente également un
lourd problème. "Il faut protéger
les berges au plus vite en fixant des dunes, sinon le fleuve ne s’écoulera plus
certains mois de l’année », avertit M. Nouri.
Les maraîchers victimes
Président
de la Fédération des coopératives maraîchères au Niger, Idrissa Bagnou est
quotidiennement confronté à ce phénomène: "En raison du sable, l’accès à
l’eau est de plus en plus difficile. Parallèlement, nos zones d’exploitation
diminuent à cause de la pollution tellurique et de l’augmentation de la
population", déplore-t-il.
Les 25'000
maraîchers de Niamey dénoncent en outre la contamination de l’eau qui nuit à leur production ,
décimée en plus cet été par de graves inondations. "On nous reproche
d’utiliser des eaux infestées. Mais qui est réellement le pollueur? L’Etat et
les collectivités publiques doivent sanctionner les fautifs", s’insurge M.
Bagnou.
Leila Fernandez, ATS
Lutte contre la misère et espoir d’un retour à la démocratie
Le Niger, pays aride d’Afrique de l’Ouest comptant parmi les Etats les plus pauvres de la planète, est confronté à une très grave famine. Sur le plan politique, un référendum constitutionnel qui se tiendra le 31 octobre doit ouvrir la voie à des élections démocratiques début 2011.
Malgré les ressources du pays en uranium, 63% des près de 15 millions de Nigériens vivent en deçà du seuil de pauvreté. Et cette année, ils sont en outre confrontés à une très grave famine due à la sécheresse, qui affecte particulièrement les zones rurales.
Ainsi, pas moins de 7,1 millions de personnes, soit près de la moitié de la population, souffrent de pénuries alimentaires, selon la Croix-Rouge.
La faim menace avant tout les femmes et les enfants. Chez ces derniers, en dessous de l’âge de cinq ans, le taux de malnutrition aiguë atteint 16,7% et il s’élève à plus de 20% dans le sud du pays, sévèrement touché, selon l’ONU. En moyenne, 6000 enfants sont admis chaque semaine dans les centres d’alimentation thérapeutiques.
En août, le Niger a de surcroît été frappé par des pluies diluviennes qui ont engendré des inondations le long du fleuve Niger, dans l’ouest du pays. Près de 200’000 personnes ont été sinistrées, dont environ 6000 à Niamey, la capitale, où des quartiers entiers ont été dévastés.
Face à cette situation, les agences humanitaires ont multiplié les appels à la communauté internationale, tout comme la junte militaire arrivée au pouvoir au Niger après un coup d’Etat en février. Ce faisant, elle a brisé le silence qui régnait sur les difficultés du pays sous la présidence de Mamadou Tandja.
Régime d’exception jusqu’aux élections
Ce dernier a pris la tête du Niger lors des élections législatives et présidentielle de 1999 sous la bannière du Mouvement national pour la société de développement (MNSD) et a été réélu pour cinq ans en 2004. A l’approche de l’échéance de son mandat, en août 2009, le président nigérien a alors organisé un référendum constitutionnel afin de remplacer la Constitution en vigueur et pouvoir se maintenir au pouvoir.
Une fois promulguée, cette nouvelle loi fondamentale a été fortement contestée dans tout le pays. Le 18 février 2010, un putsch organisé par des militaires a ainsi renversé le président Tandja, qui, depuis lors, est assigné à résidence.
Les insurgés ont mis en place un Conseil suprême pour la restauration de la démocratie (CSRD), sous la présidence du chef d’escadron Salou Djibo. Ils ont également dissous le gouvernement et suspendu la Constitution controversée de 2009.
Un nouveau référendum constitutionnel a été fixé au 31 octobre. Le projet soumis au vote prévoit notamment un mandat présidentiel ramené à 5 ans, renouvelable une seule fois ainsi qu’une amnistie pour les auteurs du coup d’état.
Les militaires ont assuré que des élections législatives et présidentielles démocratiques se tiendraient le 31 janvier 2011. Celles-ci seront financées à hauteur de 41 milliards de dollars par la communauté internationale. En attendant, c’est le régime d’exception qui prévaut dans tout le pays./LF