De petite taille, cette roue ne comporte que quatre rayons. En raison de ses dimensions modestes et, surtout, de son contexte de trouvaille, V. Gross puis P. Vouga la considérèrent prudemment comme une monnaie. Les points de comparaison autorisant une telle identification demeurent cependant extrêmement rares: il est donc nécessaire d'envisager d'autres interprétations.
Depuis la découverte des premières rouelles, de nombreux exemplaires furent mis au jour sur divers sites celtiques. Ces roues moulées ne dépassent généralement pas quelques centimètres de diamètre. On les retrouve presque exclusivement sur des sanctuaires ou des sites liés à des cultes. Malgré les diverses interprétations proposées, leur fonction reste mystérieuse: à quoi pouvaient donc servir ces objets, dont l’iconographie n’est pas sans éveiller quelques lointaines réminiscences?
Dans l’art et la représentation celtiques, la roue s’impose en effet comme un motif fort et récurrent. Attribut du dieu Taranis, symbole du renouveau et des cycles, de l’inertie du mouvement et de l’ordonnance cosmologique, la roue dégage une symbolique très puissante, à connotation plutôt positive. Outre les rouelles à caractère votif retrouvées dans les sanctuaires parmi des dépôts monétaires, on la rencontre ainsi dans des contextes fort variés, poinçonnée, il est vrai, au revers de monnaies, mais ornant également des objets d’usage quotidien ou des objets à vocation rituelle, tels que les omphaloi ou, par exemple, le fameux chaudron en argent de Gundestrup.
La complexité de cette symbolique semble ainsi nous porter vers un objet dont la valeur pourrait avoir été amulétique. Mais la mystérieuse rouelle de La Tène ne pourrait-elle pas aussi avoir joué, dans le quotidien de l’ancien monde celtique, le rôle de "monnaie sacrée" servant à payer une dîme à la divinité? Venez mener l’enquête avec nous au Laténium, le dimanche 21 octobre 2012!
Samira Zoubiri, assistante-doctorante à l’Université de Neuchâtel et guide-animatrice au Laténium
Taranis
Taranis est une des principales divinités du panthéon celte. Il est le dieu du tonnerre, de la foudre et du ciel (cosmos), que l’on rapproche habituellement du Jupiter romain. Il est généralement représenté sous les traits d’un homme dans la force de l’âge, barbu, tenant une roue et un foudre. Sur le chaudron de Gundestrup, chaudron rituel en argent retrouvé en 1891 dans les tourbières de Gundestrup au Danemark, Taranis, flanqué d’une roue à seize rayons, est représenté en relief, les bras levés comme s’il retenait quelque chose au-dessus de lui (le ciel, le cosmos?).
Omphalos
Terme grec ancien signifiant littéralement "le nombril", mais aussi "le centre". Il désigne couramment une pierre à caractère sacré qui symbolise "le nombril du monde" ou le "centre du monde". Cette pierre, de forme tronconique ou semi-cylindrique, marque l’emplacement symbolique d’un centre religieux et/ou géographique pour un peuple ou une région donnés. Il est intéressant de noter que l’on utilise également le terme omphalos pour désigner le moyeu d’une roue (son centre fixe), alors que la roue est, justement, le symbole du monde ou du cosmos. L’omphalos de pierre symbolise donc le centre spirituel et géographique d’un monde, à la manière du moyeu d'une roue, d’où partent et s’ordonnent également les directions cardinales. Ces pierres sont en outre ornées de motifs en relief de nature variée.