C’est une question intéressante, les enfants ne sont que peu étudiés dans la préhistoire alors qu’ils représentaient la majeure partie de la population. Il est malheureusement difficile d’y répondre car nous ne savons en réalité pas grand-chose sur la maternité à la période préhistorique, cet aspect ne laissant que peu de traces. Plusieurs éléments de réponse sont cependant possibles.

Les analyses de marqueurs chimiques présents dans les dents des enfants à différents stades de leur vie montrent que chez les Homo Erectus les enfants étaient nourris au lait maternel jusqu’à l’âge de 3 à 4 ans avec en complément d’autres aliments. On suppose qu’il en était de même pendant le Paléolithique. Outre son intérêt nutritif, cette longue période d’allaitement permettait aussi de bloquer la fertilité, élément important dans ces sociétés de chasseurs-cueilleurs à économie de subsistance. Avec des maternités espacées de 4 à 5 ans, on suppose environ 5 ou 6 naissances par femme pendant la période du Paléolithique (Sophie A. de Beaune 2023 in Fournier et Peltier).

Les mères devant participer aux tâches du campement tout en élevant les enfants, elles ont développé des systèmes de portage des bébés, comme le montrent des gravures du Paléolithique découvertes en Allemagne. On retrouve d’ailleurs dans toutes les sociétés la présence de techniques de portage. Si les tout petits enfants sont liés à la mère à cause de l’allaitement, après le sevrage la garde et l’éducation des enfants est un projet collectif. Cela permettait aux mères d’être actives dans la vie économique, sociale et artistique du groupe, ce qui est démontré par les découvertes archéologiques. Les populations récentes de chasseurs-cueilleurs montrent que l’allaitement peut être partagé par d’autres femmes, et le pré-mâchage d’aliments ou la garde des enfants réalisé par d’autres membres du groupe. Cette dernière pratique est d’ailleurs attestée chez certains primates comme les chimpanzés, où les mères se partagent la garde des petits.

On sait que des enfants accompagnaient les adultes dans les grottes ornées du Paléolithique par leurs empreintes de pas et des traces de mains laissées sur le sol et les parois de certaines cavités. On suppose également la présence de jouets d’enfants dès le Paléolithique : poupées en argile ou en végétaux, galets gravés, ou autres matériaux trouvés dans la nature. Au Néolithique, des objets de petite taille, mal réalisés et de manufacture grossière ont été attribués à des enfants, comme des poteries, des outils en silex ou des paniers en vannerie. Ces activités peuvent être considérées comme des jeux mais aussi comme des ateliers d’apprentissage. On retrouve également des enfants enterrés avec ce qui semble être leur jouet ; c’est le cas de la tombe dite du « Petit-Poucet » découverte à Lausanne-Vidy (Suisse) et datée vers 4000 av. J.-C., où un enfant de 3 ans est inhumé avec un petit bol en céramique contenant des dizaines de cailloux blancs.

Ces quelques points nous montrent que la maternité et la vie des enfants pendant la préhistoire est un domaine de recherche assez nouveau et qui mérite de se développer !

Bibliographie :
Fournier M., Peltier C. 2023. Les mères ; la grande histoire de la maternité de la préhistoire à nos jours. Sciences Humaines Editions.
A. de Beaune S. 2022. Préhistoire intime. Vivre dans la peau des Homo sapiens. Folio histoire.