Des Prides ou Marches des fiertés sont organisées chaque été dans la plupart de grandes villes occidentales. Aujourd’hui plutôt festifs, ces défilés décomplexés prônant la lutte contre les violences et l’égalité des droits entre personnes homosexuelles et personnes hétérosexuelles demeuraient jusqu'à récemment très revendicateurs. Mais quelle est leur origine? Quelles victoires ont-ils remporté? Le point ici.
Les Prides: l'heure de la visibilité
Les émeutes de Stonewall
Étape importante de l'émancipation gay aux États-Unis.
Dans les années 1960, l'homosexualité figure toujours dans la liste de maladies mentales de l'American Psychiatric Association. En effet, le discours médical avance des théories de la déviance et considère les thérapies d'électrochocs comme une méthode efficace pour la guérison de ce "trouble".
À New York, comme partout aux Etats-Unis, il est interdit de servir des boissons alcoolisées aux personnes homosexuelles, de danser entre hommes ou de se travestir. Au 53 Christopher Street, au cœur de Greenwich Village, le Stonewall Inn est l'un des seuls bars où les gays peuvent se retrouver, malgré les fréquentes descentes de police. Mais le 27 juin 1969, c'est le raid de trop: les habitués se rebellent contre les forces de police. Les émeutes durent plusieurs jours.
Les affrontements de Stonewall marquent une étape clé de l'émancipation gay. En l'espace de six mois, deux organisations homosexuelles sont créées à New York pour organiser des actions militantes, le Gay Liberation Front (GLF) et la Gay Activist Alliance (GAA). De plus, trois journaux sont fondés dans le but de promouvoir les droits des gays et des lesbiennes. Les femmes, bien qu'en minorité, sont présentes au sein du GLF.
L'internationalisation des Pride
Début de l'ère de la visibilité après des années passées dans l'ombre.
En juin de l'année suivante (1970), la première manifestation comprenant quelques centaines de personnes a lieu dans la même ville sous les slogans "Come Out", "Gay Pride", "Gay is Good" et "Gay Power". Des marches anniversaires ont également lieu à San Francisco et Los Angeles, ouvrant ainsi l'ère de la visibilité.
Depuis, on célèbre tous les ans la "fierté gay", en opposition à la honte. Un mouvement qui va gagner l'ensemble du monde occidental dans les années qui suivent, jusqu'à devenir de gigantesques rassemblements de centaines de milliers de personnes dans les grandes villes d'Amérique du Nord, d'Australie et d'Europe (l'Europride Madrid réunit 2,5 millions de personnes en 2007, d'après les organisateurs et organisatrices).
En France, la première grande action du militantisme homosexuel a lieu en 1971. Le Front homosexuel d'action révolutionnaire (FHAR) interrompt une tribune de radio portant sur "l'homosexualité, ce douloureux problème". A l'époque, l'action est essentiellement organisée par des lesbiennes, dont nombreuses militantes du mouvement féministe.
La lutte pour la dépénalisation
Des avancées à vitesses variables pour la reconnaissance des droits des homosexuels.
"Et le temps est venu pour la communauté gay de ne pas être jugée pour ses criminels et ses mythes". En 1978, Harvey Milk, alors maire de San Francisco (Californie) et premier politicien ouvertement homosexuel, prononce ces mots dans son discours le plus connu. Elu en 1977, il est assassiné peu après ce discours.
Au niveau juridique, la dépénalisation de l'homosexualité est un processus à plusieurs vitesses. Alors que la Suisse ne condamne plus les relations entre deux personnes du même sexe depuis 1942, la plupart des pays occidentaux le feront à partir des années 1960: le Royaume-Uni en 1967, l'Allemagne de l'Ouest deux ans plus tard.
En France, elles sont décriminalisées sur le papier depuis 1791, puis pénalisées à nouveau pendant le IIIe Reich, pour être définitivement légitimées en 1982. Sur le plan international, l'ONU lance un appel à la dépénalisation universelle en 2008. Cependant, l'homosexualité est encore aujourd'hui illégale ou réprimée dans plusieurs pays, notamment au Moyen-Orient et en Afrique.
Le sida
L'apparition du virus et ses conséquences.
Au début des années 1980, l'apparition du virus du sida contribue de manière significative à la médiatisation de la "communauté" gay et engendre une solidarité y associant des gens de l'extérieur. Le militantisme homosexuel adopte progressivement un discours intégrationniste: l'emphase est désormais mise sur les droits des gays et lesbiennes, puis dans les années 1990 sur les droits LGBT.
Les PACS conquièrent l’Europe
Le Pacte civil de solidarité comme alternative au mariage pour les personnes de même sexe.
En 1989, le Danemark devient le premier pays dans l'histoire à reconnaître l'union civile en partenariat entre deux personnes majeures du même sexe. Au début des années 1990, la Suède et la Norvège emboîtent le pas à leur voisin. L'Islande fait de même en 1997, octroyant, elle, le droit d'adopter l'enfant du conjoint ou de la conjointe. Puis, non sans débat, la France adopte en octobre 1999 le Pacte d'action civile et de solidarité (PACS), qui confère des droits limités aux couples de même sexe. L'Allemagne fait de même en instaurant un partenariat en août 2001.
En Suisse, le canton de Genève fait office de pionnier en adoptant une sorte de PACS en février 2001. Au niveau fédéral, la Loi sur le partenariat enregistré entre personnes de même sexe (LPart) est entrée en vigueur en 2007, après avoir été approuvée par référendum en 2005.
Le mariage, toujours entre un homme et une femme?
La progression du droit au mariage pour les couples gays et lesbiens dans le monde.
Les Pays-Bas, qui quant à eux reconnaissent déjà les couples gays et lesbiens depuis quelques années, vont au début 2002 jusqu'à autoriser les couples homosexuels à se marier. Ils sont suivis, les années suivantes, par la Belgique, le Canada, l'Espagne, la Suède, la Norvège, le Portugal, l'Islande, le Danemark, la France, le Royaume-Uni, le Luxembourg, l'Irlande et plusieurs États des USA.
Égalité, parentalité et homophobie
Des luttes LGBT encore en progression.
De nos jours, c'est l'homoparentalité qui crée le débat. En Europe, quelques pays admettent dans leur législation l'adoption d'enfants par des couples de même sexe, sous des formes plus ou moins étendues.
En France, par exemple, le/la conjoint(e) marié(e) à une personne homosexuelle peut adopter, depuis 2013, son enfant à la condition que l'enfant n'ait qu'un seul parent légal. La situation est comparable en Suisse, où le Tribunal fédéral a rejeté en 2015 la double paternité d'un couple de Saint-Gallois qui avait recouru à une mère porteuse en Californie pour avoir son enfant.
Les dernières batailles des personnes LGBT en Suisse concernent l'égalité des droits (le partenariat n'est pas l'équivalent du mariage) et la pénalisation de l'homophobie: leur objectif est de placer l'homophobie au même niveau que le racisme. En effet, en Suisse, il n'y a pas de loi punissant les propos homophobes lorsque ceux-ci sont proférés envers la communauté homosexuelle dans son ensemble.
RTS découverte, avec la collaboration de Caroline Dayer, spécialiste des questions de discriminations et d'égalité à l'Université de Genève.
Sources: Lambda éducation, Wikipedia
Crédits
RTS Découverte
Source: L'homosexualité