D'où vient l'eau?
La Jordanie a développé des stratégies pour collecter, stocker et distribuer toutes les sources d'eau dont elle dispose. Elle exploite aussi bien l'eau de surface que les eaux fossiles. Comme les ressources conventionnelles sont très insuffisantes, elle a dû trouver des solutions inédites pour s'approvisionner, comme la construction de gigantesques canaux, barrages et réservoirs. Ce réseau est sans cesse en train de se complexifier car l'eau se raréfie et les besoins augmentent. On va chercher l'eau plus loin, plus en profondeur. C'est désormais avec les pays voisins qu'il faut collaborer, de grands projets internationaux voient ainsi le jour.
Les sources conventionnelles
Les pluies:
Elles sont rares mais néanmoins vitales car elles permettent de recharger les nappes phréatiques. Actuellement, elles ne compensent pas la moitié de ce qui est prélevé dans les sous-sols. La population jordanienne a pris l'habitude de récolter l'eau de pluie, sur les toits plats des maisons. Mais cette récolte n'est qu'une petite goutte d'eau pour le pays.
Les nappes phréatiques:
Elles représentent 54% de l'approvisionnement en eau du pays. Il existe 12 bassins principaux. Elles se tarissent peu à peu.
Les fleuves:
Ils sont ce qu'on appelle des eaux de surface. Ils représentent 37% de l'approvisionnement total du pays. L'exploitation de l'eau des deux principaux fleuves qui traversent la Jordanie est depuis toujours un sujet politique sensible. La Jordanie est en bout de chaîne et donc dépendante de ses voisins. Les eaux du Jourdain sont en partie captées en amont par Israël et les eaux du Yarmouk par la Syrie et par Israël. Dans les deux cas, des accords ont été conclus en 1987 avec la Syrie et en 1994 avec Israël mais ils ne sont pas respectés et la Jordanie et n'a pas suffisamment d'influence pour faire respecter ces accords. L'eau est devenue un moyen de pression politique majeur. Le troisième fleuve qui abreuve le pays est le Zarqa, qui lui est entièrement sur le territoire jordanien. Il est constitué de l'eau des pluies et d'eaux usées qui ont été retraitées.
Des barrages sur les fleuves:
Pour retenir l'eau des fleuves, la Jordanie a construit 10 barrages le long des trois fleuves. Ils servent de réservoirs avant que l'eau ne soit redistribuée dans le pays. Mais les barrages sont conditionnés par le débit du fleuve, ils ne solutionnent donc pas la pénurie.
Les sources non-conventionnelles
Un canal gigantesque:
Le canal King Abdullah est long de 110km. C'est la principale voie d’irrigation du pays. Il a été construit entre les années 1959 et 1961 puis étendu à de nombreuses reprises. Il puise les eaux du Yarmouk pour alimenter la vallée du Jourdain. Cette vallée est le jardin potager de la Jordanie. On y trouve la majorité des cultures. L'eau du canal est aussi envoyée vers Amman, la capitale, par un deuxième réseau de canaux pour la consommation humaine. De même que les barrages, le canal dépend de l'eau disponible dans le Yarmouk, qui elle-même dépend du bon vouloir d'Israël et de la Syrie.
Traitement des eaux usées:
Le manque d'eau est tel que la Jordanie traite les eaux usées dans des stations d’épuration pour les réutiliser. L'eau "propre" est déversée dans la rivière puis finit au barrage avant d’aller arroser la culture de la vallée du Jourdain notamment. Cette eau n’est utilisée que pour l'agriculture. Il n'est pas envisagé de l'employer pour la consommation humaine. Les craintes sont trop nombreuses quant à sa salubrité. Le problème est que les cultures sont consommées et que si l'eau n’était pas de qualité suffisante, c’est toute la chaîne alimentaire qui se retrouverait contaminée. Traiter les eaux usées n'est donc pas non plus la solution idéale.
Importer de l’eau:
La Jordanie aurait la possibilité d'importer de l'eau de la Turquie, du Liban et de l'Irak. Pourtant ces projets ne sont encore qu'à l’étude pour des raisons politiques notamment et parce que la Jordanie doit absolument prendre d'abord des mesures contre le gaspillage et la corruption. Elle ne peut puiser dans un budget largement déficitaire pour acheter de l'eau qu'elle jetterait.
Désaliniser l’eau de mer: le red sea-dead sea canal
Un projet hors du commun est en passe d'être réalisé en Jordanie: construire une station de désalinisation et un canal de 200km qui partirait de la mer Rouge située à 230m au-dessus du niveau de la mer pour aller vers la mer Morte située à 420m au-dessous du niveau de la mer. Une partie de l’eau, environ 850 millions de m3, doit être pompée et envoyée vers Amman et l'autre servir à remplir la mer Morte, dont le niveau baisse d'un mètre par année. Sans quoi au rythme d'assèchement actuel, elle n'existerait plus dans une cinquantaine d'années. Le projet a donc le mérite de résoudre deux problèmes. Un accord a été signé en février 2015 entre Israël, la Jordanie et la banque mondiale à hauteur de 900 millions de dollars. La station de désalinisation doit être construite d'ici à trois ans au bord de la mer Rouge. L'eau sera partagée entre les Jordaniens, les Israéliens et les Palestiniens, preuve que l'entente est possible.
Pour en savoir plus sur l'eau en Jordanie, lire l'article dans son entier ici: Les sources d'eau en Jordanie
RTS Découverte, Maya Chollet.
Sources: Water for Life Jordan's Water Strategy 2008-2022, Jordan’s Water Resource Challenges and the Prospects for Sustainability, Les Cléfs du Moyen-Orient, Water supply and water use statistics in Jordan, Water Resources planning and development in Jordan, Integrated Water Resources Management in Jordan, Jordan Governement's Official Website, Feu vert pour le canal red sea-dead sea (waterworld.com), The Hashemite Ministry of Watre and Irrigation.