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Ben Ali, 23 ans au pouvoir

Zine el-Abidine Ben Ali et son épouse Leïla le 7 novembre 2007 lors des commémorations de ses 20 ans de présidence. [Keystone]
Zine el-Abidine Ben Ali avec son épouse Leïla le 7 novembre 2007 lors des commémorations de ses 20 ans de présidence. - [Keystone]
Le 7 novembre 1987, Habib Bourguiba, héros de l'indépendance, est remplacé à la tête de l'État par Zine el-Abidine Ben Ali. Celui-ci, évoquant les 30 ans de règne de son prédécesseur, déclare alors: "On ne saurait être président à vie." À vie, peut-être pas, mais 23 ans plus tard, Ben Ali était toujours président…

Si l'arrivée au pouvoir du président Ben Ali avait été accueillie avec ferveur et espoir par ses concitoyens, ils avaient été nombreux à déchanter par la suite. Bien sûr, le niveau de vie s'était considérablement amélioré et la classe moyenne constitue aujourd'hui 80% de la population tunisienne, un record en Afrique. Mais à quel prix?

Prétextes sécuritaires
Sous couvert de combattre la menace terroriste et l'extrémisme religieux, le pouvoir tunisien avait pris des mesures strictes afin d'empêcher toute contestation politique. De fait, en Tunisie, l'opposition était quasi inexistante et la presse ne cessait de louer les bienfaits du gouvernement. Ce même gouvernement qui bloquait des sites web trop critiques à son égard ou réduisait au silence les ONG qui tentaient de dénoncer ces états de fait.

Méthodes musclées
Les moyens mis en œuvre pour éviter la contestation étaient classiques. Outre la mainmise du gouvernement sur les médias, on peut citer une propagande caricaturale qui voyait le portrait du président affiché partout. On peut y ajouter une police omniprésente – un agent pour 67 à 112 habitants selon les régions! – et secondée par un réseau très dense d'informateurs de tout poil. Enfin, sans une adhésion au Rassemblement Constitutionnel Démocratique (le parti anciennement au pouvoir), il était difficile en Tunisie d'obtenir des allocations, papiers officiels ou de mener à bien une quelconque démarche administrative.

Conséquences désastreuses
Résultat: des élections aux scores de républiques bananières et une chape de plomb maintenue au-dessus de la population. En Tunisie en effet, on ne parlait pas ouvertement de politique ni de Ben Ali. Encore moins de corruption ou d'un clientélisme pourtant avéré. Quant à la jeunesse, elle rêve de quitter le pays ou se résigne à son sort. À ce titre, la remarque d'un étudiant interviewé dans un des reportages du dossier est révélatrice. En parlant de Ben Ali, il affirme: "Je peux simplement dire que celui qu'on connaît, c'est toujours mieux que celui qu'on ne connaît pas." Évidemment, lorsqu'on n'a rien connu d'autre. Les événements qui ont secoué le pays en 2011 ont finalement eu raison de son régime. Vendredi 14 janvier de cette même année, Zine el-Abidine Ben Ali a quitté la Tunisie pour se réfugier – vraisemblablement – en Arabie Saoudite.


Franck Sarfati – 06.01.10, mis à jour le 18.01.11

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