Contrairement aux autres mammifères, nous n’avons conservé des poils que sur certaines parties du corps. De plus, ces poils sont très clairement différents dans ces régions (cheveux, sourcils, aisselles, pubis). Cette pilosité plus réduite résulte apparemment, entre autre, d’une mutation associée à une perte de fonction dans un gène codant pour une protéine des poils, la kératine de type I. Chez nos plus proches parents, les chimpanzés, et nos cousins plus éloignés, les gorilles, ce gène est parfaitement fonctionnel. Il a donc muté après la séparation de notre lignée de celle des chimpanzés.

L’histoire évolutive de nos parasites nous renseigne sur la différenciation de nos poils en cheveux et en poils pubiens! Deux espèces de parasites différentes, mais apparentées, sont spécialisées sur nos cheveux (les poux) et sur les poils pubiens (les morpions). La divergence entre les lignées du pou humain et celui du chimpanzé, qui demeurent malgré tout proches, a eu lieu en même temps qu'entre celles de l’Homme et du chimpanzé, il y a environ 6 millions d’années: le pou présent chez notre ancêtre commun s’est donc spécialisé pour les cheveux, dans la lignée humaine. Les morpions, par contre, sont étroitement apparentés au pou du gorille et ces deux lignées de parasites ont divergé plus récemment, il y a 3 à 4 millions d’années, bien après la divergence des lignées de l'Homme et du Gorille. Les morpions ont probablement été transmis à l’un de nos ancêtres depuis un ancêtre du gorille actuel. Cela suggère que notre système pileux était déjà différencié en cheveux et poils d’autres types comme les poils pubiens il y a 3 à 4 millions d’années!

Pourquoi avons nous des cheveux? Une particularité des cheveux est de croître de façon continue sans tomber, alors que les autres poils ont une croissance limitée et sont remplacés fréquemment, comme c’est le cas chez les autres mammifères. Il est possible que cela soit corrélé à un autre processus impliqué dans l’évolution humaine, parce que de nombreux gènes impliqués dans le développement et la croissance des poils ont aussi d’autres rôles. On sait par exemple que les cycles de croissance des poils peuvent être modifiés au cours de la domestication des animaux. Il semble que cela soit un effet secondaire d’une sélection sur le comportement, comme l’a montré la domestication expérimentale du renard. Une fois ce caractère apparu, il a probablement été apprécié par nos ancêtres, qui ont préféré se reproduire avec d’autre individus portant les mêmes caractéristiques. Maintenant c’est une caractéristique de notre espèce dont nous sommes très fiers: une part importante de l’économie est consacrée à l’entretien de nos cheveux et à l’élimination impitoyable des autres poils plus proches de ceux des grands singes...