La question est intéressante et soulève quelques interrogations. Tout d’abord, il convient de préciser la nécessité de faire des paliers de décompression lorsqu’on pratique la plongée sub-aquatique. Le plongeur est a priori un mammifère et possède en conséquence une respiration aérienne (il remplit ses poumons d’air). Si l’organisme humain, majoritairement composé d’eau, possède une sensibilité relative aux effets de la pression, ces effets deviennent particulièrement importants en ce qui concerne les gaz. La pression exercée agit en effet à différents niveaux en modifiants certaines des caractéristiques des gaz, comme le volume occupé par une quantité définie ou leur solubilité. Lorsque la pression augmente, le volume du gaz diminue et sa solubilité augmente, et inversement.

En plongée, la pression exercée par l’eau augmente régulièrement avec la profondeur. Ainsi, lors d’une plongée, le gaz respiré contenu dans les bouteilles se dissout en petites quantités dans le sang et les tissus. Ces petites quantités ne posent pas de problème au plongeur s’il reste à la même profondeur. En revanche, lors de la remontée, sous l’effet de la diminution de la pression, la solubilité du gaz va diminuer et son volume augmenter jusqu’à pouvoir former des petites bulles. Ces petites bulles dans le sang représentent un danger mortel car elles peuvent boucher certains vaisseaux sanguins et priver certains tissus d’oxygène (dans le cerveau par exemple). Pour éviter cet accident, le plongeur se maintient à une profondeur donnée pour évacuer par la respiration le gaz excédentaire contenu dans son sang et ses tissus, avant que la baisse de pression ne provoque la formation de ces bulles. Il convient également de préciser que ce phénomène concerne essentiellement les gaz neutres, comme l’azote, qui n’entrent pas dans les cycles physiologiques du plongeur, contrairement au gaz carbonique et à l’oxygène.

Les poissons, quant-à eux, sont des animaux aquatiques qui ne respirent pas de la même manière que les mammifères. Leurs branchies sont en effet capables d’extraire directement l’oxygène dissout dans l’eau. Cet oxygène est ensuite fixé sur l’hémoglobine contenues dans des cellules spécialisées (les globules rouges ou hématies) pour être acheminé jusqu’aux différents organes qui en ont besoin (c’est pour cette raison que l’oxygène a un rôle limité dans les accidents de décompression). La nécessité de faire des paliers pour éviter le dégazage brutal du gaz dissout dans le sang est donc assez limitée chez les poissons, car ils n’absorbent pas l’azote dissout dans l’eau.

Alors, les poissons sont-ils sensibles aux effets de la pression de l’eau? Et bien oui, mais pour des raisons bien différentes de celles du plongeur. Les poissons possèdent en effet un organe particulier leur permettant de se maintenir dans la colonne d’eau et de ne pas couler: la vessie natatoire (elle joue en grande partie le même rôle que le gilet stabilisateur du plongeur). Cette vessie est remplie d’air et peut posséder un canal la reliant à l’œsophage (on parlera alors d’un poisson physostome), ou pas (on parlera alors de poisson physocliste). Le poisson qui effectue des déplacements verticaux devra donc réguler la quantité, et donc le volume, de gaz présent dans sa vessie natatoire. Cette régulation sera plus aisée et rapide chez les physostomes capables de recracher l’air excédentaire directement par la bouche (via le petit canal qui relie la vessie natatoire à l’œsophage), alors qu’elle sera plus lente et complexe chez les physoclistes. Ainsi, un poisson pêché à grande profondeur et remonté à la surface rapidement pourra-t-il voir sa vessie natatoire augmenter de volume de manière dramatique, jusqu’à parfois lui sortir littéralement de la bouche en entraînant vers l’extérieur et en écrasant les organes de la cavité abdominale.