Comprendre pour mieux lutter
Au cours des dernières années, la lutte contre les plantes envahissantes a pris de l’ampleur au niveau international. En effet, l’envahissement des habitats naturels se traduit souvent par des pertes de la biodiversité avec des conséquences graves dans les différents écosystèmes. Ainsi, l’envahissement des cultures entraîne directement des pertes économiques considérables. Ce phénomène résulte habituellement de l'introduction, accidentelle ou non, d'une plante dans une nouvelle région du monde où elle trouve un terrain propice à son expansion. Pour développer des moyens de lutte adéquats contre ces plantes, il faut commencer par mieux les connaître. Or les plantes envahissantes mettent plusieurs stratégies au service de leur succès.
Grandir vite pour mieux envahir
D’une part elles ont une plus grande vitesse de croissance. Les chercheurs ont récemment montré que la vitesse de croissance de 105 plantes collectées au Royaume-Uni était liée à leur potentiel invasif à l'échelle mondiale. En effet, certaines plantes ont une vitesse de croissance quasi-exponentielle dans la phase suivant la germination. Ce sont ces plantes qu’on retrouve le plus fréquemment dans le répertoire mondial des mauvaises herbes. Mais il existe d’autres stratégies tout aussi efficaces.
La multiplication des chromosomes
La centaurée tachetée est originaire d'Europe et responsable de pertes colossales dans les pâturages non-irrigués d'Amérique du Nord. Le séneçon du Cap, originaire d'Afrique du Sud, se répand à grande vitesse dans le paysage européen, principalement le long des voies de chemin de fer et des routes, mais également dans les pâturages. Ces deux plantes envahissantes appartiennent à la même famille, celle des Astéracées, et partagent la même stratégie de succès. Alors que la plupart des organismes vivants possèdent deux exemplaires de leurs chromosomes (diploïdes), hérités du parent mâle et du parent femelle, certaines plantes envahissantes en possèdent quatre (tétraploïdes). Les variétés tétraploïdes de centaurée tachetée sont mieux armées que les diploïdes pour proliférer dans le climat continental et sec de l’Amérique du Nord. En effet, aux premiers stades de leur croissance déjà, les tétraploïdes acquièrent une plus grande masse, leurs feuilles sont plus épaisses et plus riches en carbone, tandis que leurs fleurs produisent davantage de graines. On retrouve ces caractéristiques chez le séneçon du Cap.
En comprenant mieux ces différentes stratégies, les chercheurs espèrent trouver des moyens de lutte plus efficaces pour préserver cultures et pâturages.
RTSdécouverte, avec la collaboration d'Igor Chlebny, collaborateur scientifique de l'Université de Neuchâtel