«Cloner un bébé» ? L’expression fait penser au clonage reproductif, c’est à dire le fait de donner un jumeau décalé dans le temps à un individu préexistant et ce, par transfert de noyau dans un ovocyte humain confié aux bons soins d’une mère porteuse. Le géniteur – ou faut-il dire le «cloné» - est l’individu qui aura fourni le noyau utilisé dans cette manipulation, l’individu qui en sera issu est le clone.

Avant de parler avantages et inconvénients, il faut relever que nous sommes très loin de la réalisation du premier clonage reproductif chez l’être humain. Dix ans exactement après la naissance de la brebis Dolly, force est de constater que la technologie du clonage n’a pas beaucoup progressé. Le taux d’échec reste très élevé, même chez les espèces en principe «clonables», comme les moutons ou les bovins. De plus, il semble de plus en plus clair que le problème ne réside pas dans quelque astuce technique qui attendrait seulement d’être découverte, mais qu’il y a un obstacle biologique de fond, lié aux phénomènes d’empreinte génétique et de méthylation différentielle de l’ADN. Parler de cloner un bébé, c’est tabler sur un futur vraiment très hypothétique.

Pourquoi recourir au clonage? En tous cas pas pour créer un double d’Einstein, de Saddam Hussein ou de Britney Spears: le clone est un individu complètement distinct de son géniteur. Le «cloné» et le «clone» se ressembleront plutôt moins que des jumeaux vrais, car seuls leurs gènes nucléaires sont identiques et que le «clone» vivrait dans un environnement et un temps différent que son aîné. D’ailleurs, personne n’a jamais prétendu que des jumeaux sont une seule et même personne.

Une idée moins absurde serait d’utiliser le clonage comme une technologie qui permettrait de surmonter la stérilité. Une version sophistiquée de la fécondation in vitro, en somme. Or les progrès de la procréation assistée font qu’il existe aujourd’hui des solutions pratiques pour un nombre croissant de couples concernés par la stérilité. Dans ce contexte, affronter les problèmes éthiques relativement importants liés au clonage est un jeu qui n’en vaut pas la chandelle.

L’inconvénient majeur du clonage est que l’on crée un individu planifié d’avance pour ressembler biologiquement à un individu existant. On peut penser que c’est un fardeau psychologique non négligeable qu’on inflige à un enfant, même si les enfants ont généralement un talent remarquable pour être différents de ce que veulent leurs parents. L’interdiction du clonage reproductif est donc plutôt une bonne chose. De là à prétendre que le clonage est une atteinte épouvantable à la dignité humaine, voire un «crime contre l’humanité», il y a un pas, que franchissent allégrement certaines autorités morales adeptes du style pompier en éthique.