La Chaîne du Bonheur

La Chaîne du Bonheur est même devenue internationale. Dès Noël 1948, l'émission se fit en collaboration avec plusieurs radios européennes puis même américaines. Au sortir de la guerre, dans une Europe encore marquée par la misère et les destructions, la Chaîne du Bonheur de Radio Lausanne représentait une rare structure qui fonctionnait en dépit des frontières et des préjugés pour apporter une aide rapide, efficace et désintéressée aux populations.

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RTS - ASL

Roger Nordmann, journaliste de talent, était aussi homme de conviction. La Chaîne du Bonheur était pour lui une manière de mettre en œuvre de manière concrète un idéal humanitaire au sortir de la guerre: "je puis même dire que, sur le plan radiophonique, il n'existe rien de comparable à la Chaîne du Bonheur internationale: n'est-elle pas un cas unique de collaboration internationale, non seulement sur le plan artistique, mais encore, et surtout, sur le plan proprement humain? Et cela en parfaite conformité avec les buts que visent, par exemple, l'ONU et l'UNESCO?".

La Chaîne du Bonheur, dans les années 1940 et 1950, n'avait d'autre structure que celle de la radio, ni d'autres forces que l'enthousiasme de ses animateurs et la bonne volonté du public et des entreprises qui relayaient les actions. Les photos d'époque montrent les locaux de la radio à La Sallaz remplis de caisses et paniers, des camions chargeants et déchargeant devant les studios des dons recueillis dans toute la Suisse romande et parfois ailleurs. Souvent, l'équipe de la Chaîne mobilisait les collègues qui se trouvaient là pour faire des paquets, comptabiliser des dons ou passer des appels.

Au-delà de l'aide apportée, la Chaîne du Bonheur à aussi été un terrain d'exercice et d'expérimentation pour la radio de l'époque. Des émissions complexes avec plusieurs intervenants dans des lieux différents et des prises de son musicales n'étaient pas si courantes. Souvent en extérieur, il fallait non seulement se déplacer, mais tirer de longs câbles jusqu'à la prochaine borne téléphonique pour assurer les transmissions jusqu'au studio.

La Chaîne du Bonheur a ouvert la porte à l'Eurovision

Les liaisons internationales, telles qu'elles se faisaient dans les années 1940 et 1950, étaient exceptionnelles et relevaient encore de l'exploit technique. On a pu dire, en ce sens, que la Chaîne du Bonheur a ouvert la porte à l'Eurovision, créée quelques années plus tard, et dont la Suisse était une des principales initiatrices.

La Chaîne du Bonheur eut une diffusion hebdomadaire jusqu'en 1954 en tout cas. Elle ne quitta jamais complètement les grilles des programmes de la Radio Suisse Romande. On retrouva l'émission régulièrement dans des actions ponctuelles en faveur de personnes en difficulté. La Chaîne du Bonheur est par exemple une des premières institutions à avoir financé des infrastructures spécifiques pour les personnes handicapées.

La Chaîne se remettait aussi en route lors des catastrophes majeures. L'une d'entre elles fut incontestablement la guerre du Biafra entre 1967 et 1970. Elle ouvrit une période durant laquelle le nombre de crises humanitaires augmenta considérablement.

La Radio Suisse Romande répondit à chaque fois, mais les structures de fonctionnement s'appuyant sur la bonne volonté d'un personnel de milice atteignaient leurs limites. Le besoin de disposer d'une organisation pérenne, solide et indépendante se faisant criant. Il fallait notamment passer définitivement à un fonctionnement destiné à recueillir de l'argent, et non plus du matériel. 

En 1983, on crée ainsi une Fondation nationale de la Chaîne du Bonheur, dans laquelle la SSR conserve une importance particulière. La suite de l'histoire n'appartient donc plus à la Radio, mais elles restent toutes deux très étroitement liées. Les appels de fonds de la Chaîne du Bonheur sont systématiquement relayés par les médias de la SSR dans toute la Suisse, par les radios et télévisions privées et tous les médias d'une manière générale.

Une structure professionnelle se charge de distribuer les fonds à des institutions suisses reconnues sur la base de projets. L'utilisation des fonds est contrôlée. La Chaîne du Bonheur reste aujourd'hui encore le "bras humanitaire " de la RTS, et en particulier de la Radio. Un tandem qui fonctionne particulièrement bien, puisqu'il a permis de recueillir près de 2 milliards de francs depuis 1946. (bonheur.ch)