La radio a littéralement débuté avec trois bouts de bois ! Avec la numérisation, les ordinateurs et les réseaux, on est passé dans un autre univers. Mais pour le public, il suffit toujours de tourner un bouton.
Chapitre 1
Un simple gramophone pour commencer
Il est difficile d'imaginer aujourd'hui le peu de moyens dont disposaient les pionniers de la radio dans les années vingt. Le matériel était rare, lourd et peu efficace. Les tout premiers micros étaient empruntés à un simple téléphone. Et si les modèles suivants étaient meilleurs, ils pesaient plusieurs kilos et nécessitaient une alimentation électrique conséquente! Au tout début, lorsqu'on voulait passer un disque à l'antenne, on se contentait de placer le micro devant le pavillon du gramophone.
Quant à faire de la radio en dehors du studio, c’était encore une tout autre histoire, qui nécessitait un peu d'endurance physique. Il fallait non seulement transporter et installer le matériel sur le lieu d'enregistrement, mais également tirer de longs câbles jusqu'à une borne téléphonique programmée par les PTT de l'époque (Postes Télégraphes et Téléphones).
De là, le son empruntait les lignes du téléphone pour aller jusqu'au studio. Le transport du matériel pour les premières émissions de radio en extérieur se faisaient… en vélo ou en char à bras! Bientôt, heureusement, les premiers véhicules de reportage permirent d'aller un peu plus loin et un peu plus vite!
Chapitre 2
L’enjeu, c’est l’enregistrement
Mais surtout, il n'y avait aucune possibilité pratique pour enregistrer du son. Jusqu'au milieu des années 1930, tout se faisait en direct, y compris la musique, les annonces, les conférences, les interviews… et il n'y avait par conséquent pas d'archives.
Les premiers appareils permettant l'enregistrement étaient peu pratiques. De fait, le plus ancien enregistrement que possède la Radio date de 1933, ce qui était encore très exceptionnel à l'époque.
Le 24 janvier 1933, Radio-Lausanne reçoit Eugénie Buffet, une ancienne gloire de la chanson française de passage à Lausanne. L’opportunité a sans doute paru exceptionnelle à l’époque et justifié l’enregistrement, peut-être dans la perspective du concert que l’artiste a donné 3 semaines plus tard.
Il s’agit à l’origine d’une série de disques à gravure directe, qui ont été copiés sur bande magnétique dans les années 1980’, puis plus récemment numérisés. Cet enregistrement n’a survécu que parce qu’il a été conservé dans la famille du journaliste, Jean Hennard. La qualité sonore est différente de celle de la diffusion, mais donne néanmoins une idée de ce que l’on pouvait entendre à la radio à l’époque !
Il faudra encore attendre quelques années pour voir apparaître les tourne-disques à gravure directe que Claude Gygi, qui a rejoint Radio-Genève en 1952 comme technicien, a encore connu.
C'était un gros progrès: on pouvait enregistrer un peu plus de 2 minutes de son sur un disque. Pour faire plus long, il fallait synchroniser la gravure sur 2 appareils, raison pour laquelle les tourne-disques destinés à la radio fonctionnaient toujours par
paires. Mais il restait très difficile de faire un montage, c’est-à-dire d'enlever certaines parties d'un enregistrement ou au contraire de réunir des éléments sonores provenant de plusieurs sources. A gauche, voici Claude Gygi jeune homme dans son studio en 1952. Il se trouve dans le studio de radio-théâtre à Radio-Genève. Des équipements complexes pour l’époque, qu’on peut rapprocher au studio de Forum en haut de la page.
Ce sera l'arrivée des magnétophones à bande qui permettront l'enregistrement et le montage facile. Pour ce faire, il suffit de couper physiquement les morceaux de bande et de les
réunir avec un scotch. Les techniciens radio acquièrent rapidement une dextérité folle dans ce type d'opérations. Il n'est par exemple pas toujours simple de conserver un phrasé naturel dans un discours en réunissant des éléments de plusieurs sources. Les opérateurs expérimentés avaient toujours un petit stock de "silences" récupérés sur d'autres bandes et qui pouvaient être insérés entre deux sons pour en rendre l'écoute plus agréable!
Chapitre 3
Le magnéto devient autonome
La bande magnétique permit aussi de sortir facilement du studio. Un certain Stefan Kudelski se met en tête de fabriquer des magnétophones de petite taille. Il met au point son premier appareil d'enregistrement en 1950 à Cheseaux. Il prend très naturellement contact avec Radio-Genève et Radio-Lausanne, où sont sans doute testés les premiers exemplaires.
Ils fonctionnaient à manivelle, ils n'étaient pas très beaux, mais quelle révolution! Pour la première fois, on pouvait quitter le studio avec un équipement portable et autonome. La porte du reportage radiophonique, au bout du monde ou au coin de la rue, s'ouvrait enfin. Au fil des versions, Kudelski a perfectionné son appareil. Les piles ont remplacé la manivelle, ajoutant encore à son poids. On disait alors qu’on reconnaissait facilement les journalistes radio parce qu’ils penchaient toujours d’un côté !
Chapitre 4
Le numérique, la même chose en mieux
La bande magnétique a régné en maître dans toutes les radios du monde jusqu’à la fin du XXe siècle. A partir de 1989, La numérisation du son, de plus en plus efficace, a rapidement pris sa place. L'enregistrement se fait maintenant sur des cartes mémoire, de type informatique et sur des appareils de petite taille.
Ces éléments sont ensuite transférés sur des ordinateurs sur lequel les montages sont réalisés. Depuis le début des années 2000, la totalité de la chaîne de production de la radio est numérique, de l'enregistrement à la diffusion.
Aujourd'hui, une technicienne comme Charlotte Fernandez ne se sépare pas de son ordinateur!
Le travail technique de la radio s'est compliqué et enrichi avec les possibilités offertes par la numérisation. On travaille plus vite sur des émissions qui peuvent être très complexes.
La réalisation d'émissions de radio ne s'arrête d'ailleurs plus au son. Certaines émissions sont désormais aussi filmées! Ça n'en fait pas pour autant des émissions de télévision. La spontanéité, la rapidité et une certaine économie de moyens restent spécifiques à la radio. La vidéo permet toutefois de diffuser ces éléments sur internet, sur les réseaux sociaux, sur différentes applications et parfois aussi sur les écrans de tv traditionnelle!
La radio produit d'ailleurs de plus en plus d'émissions qui ne sont pas diffusées à la radio. Depuis quelques années, les podcasts suscitent un vif intérêt. Ces sons ne correspondent pas toujours aux règles classiques de la radio, avec des journalistes et des invités, des relances et des pauses musicales, un horaire et une durée bien précis.
Les podcasts peuvent se rapprocher d'un documentaire ou d'une fiction, avoir une durée variable et aborder des genres peu pratiqués par la radio, comme la science-fiction ou les parcours de vie racontés à la première personne.
Dans ce cas comme dans tous les autres, la technique est au service des émissions. Chaque progrès, au final, profite au public.
Chapitre 5
Focus
Les ondes numériques
Il y a eu les ondes moyennes, puis les ondes ultra-courtes qu'on appelle en général la FM. L'écoute de la radio en Suisse est aussi en train de basculer vers le numérique. La plupart des auditrices et des auditeurs écoutent la radio en DAB+ ou en streaming sur leur smartphone, leur ordinateur ou un appareil dédié. Dans le public, 12 % écoute la radio exclusivement en FM, un mode de diffusion qui sera interrompu en 2024.
Les archives sonores
Depuis 1935, la radio a conservé de riches archives. Elles sont constituées de disques à gravure directe, de bandes magnétiques et des quelques autres supports qui sont presque tous numérisés et dématérialisés. Cela permet de les mettre à la disposition des programmes, qui utilisent fréquemment ces éléments du passé pour enrichir les émissions d'aujourd'hui. Le service des archives travaille également à faciliter l'accès de la population suisse à son patrimoine sonore.