Né le 14 février 1951 à Tunis (Tunisie), il grandit dans une famille aristocratique, se marie à Béatrice Roche et dirige la maison de vin de Champagne Pommery. Mais, alors qu’il sait sa femme gravement malade, il a lui-même un tragique accident de parapente en juin 1993 et devient tétraplégique à 42 ans.
Trois ans plus tard, son épouse décède. Philippe Pozzo di Borgo s’enfonce dans un profond désespoir comme il le raconte dans son livre poignant Le deuxième souffle. Un désarroi dont l’aidera à sortir l’assistant de vie et ancien délinquant, Abdel Sellou, qui entre alors à son service. Cette période de complicité entre ces deux hommes que tout oppose, et du véritable retour à la vie de Philippe Pozzo di Borgo, est au cœur du film Intouchables. "Nous étions deux desperados qui cherchaient un moyen de s’en sortir: le riche tétra, fou de douleur d’avoir perdu son épouse, et le jeune caïd qui sort de taule et veut tout faire sauter. Deux gars en marge de la société qui s’appuient l’un sur l’autre". Dix ans de "vie commune" entre Philippe et Abdel qui, aujourd’hui encore, restent en lien étroit, même si Abdel est désormais chef de sa propre entreprise et père de famille.
Philippe Pozzo di Borgo a lui aussi entamé une nouvelle vie. Il vit désormais au Maroc avec sa deuxième épouse Khadija et leurs deux filles adoptives (il a également deux enfants de son premier mariage).
Très actif, il est Président d'honneur de l’association Simon de Cyrène qui lutte pour soulager la souffrance des personnes lourdement handicapées et améliorer leurs conditions de vie. Un combat pour lequel il se donne désormais corps et âme.
"Le handicap, la maladie, sont fracture et dégradations. Dans ces instants, où l'on perçoit l'échéance de la vie, l'espérance est un souffle vital qui s'amplifie; sa juste respiration en est le second souffle. (...) Je me suis étouffé durant quarante-deux ans. Nous nous étouffons à nous lancer trop vite, à vouloir être les meilleurs, les premiers. Ceux qui respirent mieux, au bout de quelques dizaines kilomètres, sont ceux qui imaginent l'arrivée", Le Second Souffle, éditions Bayard, page 140.
Après la rencontre
Je garde de la visite d’Alexandre Jollien une sensation d‘intensité. Epuisé par son voyage, il s’est allongé sur le divan et a branché ses yeux. Quel que soit son état de fatigue, une fois qu’il vous tient par les yeux, ces yeux rieurs et fixes, il s’envole et vous suivez, fasciné et légèrement ivre de découvrir de telles hauteurs.
L’expression calme tempère la profondeur des propos, l’interrogation amène nécessairement un début de réponse, le silence vous invite à partager. Intemporel, évident, universel, il nous fait goûter l’esprit de l’intelligence et de la spiritualité entrecoupées par des éclats de rires qui soulagent la tension.
J’ai retenu ce goût du mot travaillé, un artisan de la phrase, un artiste de la conceptualisation, une simplicité de l’idée, toujours ancrée dans son expérience qui s’élève ensuite jusqu’au mystère, au-delà des mots. Une inquiétude dans le regard et il repart. Il s’approprie ce qu’il dit. Depuis, je m’efforce de n’exprimer que ma propre pensée, sans déborder sur des thèmes empruntés, à rechercher toujours l’honnêteté.
Nous partageons la fragilité, et un certain inconfort, mais rien ne l’épuise et vous suivez, plein d’entrain. Alexandre réclame toujours l’abondance de l’amitié qu’il vous prodigue généreusement.
Alexandre, qui pourrait être mon fils, m’a fait retrouver la transparence de mon enfance, la drôlerie de notre condition humaine, le sérieux de la relation. C’est un magicien ; il est reparti dans une envolée et pourtant son esprit occupe la maison.
Parfois un mot de lui me parvient, du monde qu’il parcourt, et dans un sourire, je me remets en selle.
Philippe Pozzo di Borgo