La Bosnie-Herzégovine sous très haute tension

Dans le sillage du démantèlement de la Yougoslavie en 1991, les Serbes de Bosnie avaient fait sécession en annonçant la création d’une "République serbe". Les Croates de Bosnie ont suivi peu après, refusant de reconnaître l’autorité du gouvernement bosniaque et proclamant la création de leur propre république avec le soutien de la Croatie. La guerre a été marquée par des massacres, des nettoyages ethniques et des déplacements massifs de population.

Les accords de paix de Dayton, signés en 1995, ont mis fin à cette guerre et ont établi un cadre politique pour la Bosnie-Herzégovine, avec une structure complexe de gouvernance partagée entre les différentes entités ethniques. Aujourd’hui la Bosnie-Herzégovine doit faire face aux défis de la reconstruction, de la réconciliation et du maintien d’une paix fragile.

Pour essayer de comprendre cette situation, Frédéric Pfyffer rencontre la journaliste Aline Cateux, anthropologue rattachée au Laboratoire d’anthropologie prospective de l'Université catholique de Louvain-la-Neuve et correspondante dans les Balkans pour le journal Le soir.

Dimanche 4 juin à 20h55 sur RTS Deux, vous pourrez voir "Bosnie-Herzégovine, une paix si fragile", un documentaire réalisé par Pierre-Olivier François (France, 2023). Le film est disponible en ligne dès aujourd'hui ci-dessous.

>> Voir également: "Bosnie-Herzégovine en guerre: une fabrique de complicités", article d'Aline Cateux sur hypotheses.org.

>> "Mostar’s Unpunished Massacres", articles (en anglais) d'Aline Cateux sur balkaninsight.com

Keystone/EPA - Mike Persson

^{Photo: un soldat des forces spéciales bosniaques riposte, le 6 avril 1992, dans le centre de Sarajevo alors que lui-même et des civils sont pris pour cibles par des tireurs d'élite serbes. Ceux-ci tiraient depuis le toit d'un hôtel sur une manifestation pour la paix réunissant quelque 3'000 personnes, alors que les combats entre combattants bosniaques et serbes s'intensifiaient dans la capitale de la Bosnie-Herzégovine.}

Avec plus de 100'000 morts, elle fut l’un des conflits les plus sanglants du XXe siècle sur le continent européen après les deux guerres mondiales. La guerre de Bosnie s'achève avec les accords de Dayton, signés le 14 décembre 1995. S’ils ont permis de mettre un terme aux combats, ces accords n’ont pas réussi à construire une paix durable. Aujourd'hui, près de 28 ans plus tard, la Bosnie-Herzégovine se retrouve extrêmement fragilisée, avec un risque accru d’éclatement.

Frédéric Pfyffer a rencontré la journaliste et anthropologue Aline Cateux, correspondante dans les Balkans pour Le journal Le soir, afin de clarifier la politique intérieure de la Bosnie-Herzégovine.

Ajla Salkić

^{Photo:  Aline Cateux}

Si la guerre de Bosnie (1992-1995) est dans toutes les mémoires, son histoire, après tant d'années, n'est toujours pas communément partagée par tous les citoyens et tous les élèves bosniens. Quel est le rapport de la Bosnie-Herzégovine avec son histoire?

C'est la question explorée par la journaliste et anthropologue Aline Cateux, correspondante dans les Balkans pour Le journal Le soir, qui est au micro de Frédéric Pfyffer.

EPA/STRINGER

^{Photo: Radovan Karadzic (à droite), leader des Serbes de Bosnie, en discussion avec Ratko Mladic, chef des forces armées bosniaques, lors d'une réunion à Pale, Bosnie-Herzégovine, en août 1993. Tous deux ont depuis été condamnés à des peines de prison à perpétuité par le TPIY (Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie ), notamment pour génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité en ce qui concerne Ratko Mladic.}

Plus de 100'000 morts et deux millions de réfugiés ou déplacés… Si le conflit armé a pris fin avec les accords de Dayton en 1995, une paix durable n’a pas réussi à s’imposer. Un système de gouvernance tripartite complexe permet de conserver l'intégrité territoriale de la Bosnie, laissant une large autonomie aux entités croato-bosniaque d'une part et serbe de l'autre mais, selon de nombreux experts, la Bosnie-Herzégovine serait de nouveau au bord de l'implosion.

Certaines initiatives proposent de sortir d'un schéma de pensée imposé depuis la fin de la guerre par les politiciens les plus puissants du pays et souvent même par la communauté internationale. C'est le cas d'une assemblée de citoyens de Bosnie-Herzégovine qui a cherché à trouver une solution au problème séculaire de la réforme constitutionnelle mise en suspens depuis 2009.

Nenad Stojanovic, politologue et professeur à l'Université de Genève, a participé à cette initiative. Il revient sur cette expérience au micro de Frédéric Pfyffer.

Keystone/EPA - Fehim Demir

^{Photo: panneau routier indiquant "Bienvenue dans la République de Srpska" à la périphérie de Sarajevo (Bosnie-Herzégovine), le 27 avril 2023. La République Srpska est une région autonome serbe de Bosnie et l'une des deux entités ethniques du pays créées en vertu de l'accord de paix de Dayton, qui a mis fin à la guerre de 1992-1995. Bien que ce panneau ne soit qu'une information routière, le leader des Serbes de Bosnie Milorad Dodik a averti qu'il pourrait devenir une véritable frontière entre les entités de la Bosnie.}

Durant la gurerre, Milomir Kovacevic, photographe, a vécu de l'intérieur l'implosion de Sarajevo, sa ville natale. Il l'a photographiée avant, pendant et après les trois ans de siège imposés par les forces serbes.

Malgré la violence, les divisions et les souffrances de la guerre toujours instrumentalisées par les politiciens de tous bords, Milomir Kovacevic se considère aujourd'hui encore avant tout comme Yougoslave. Frédéric Pfyffer est allé à sa rencontre à l'occasion de sa dernière exposition à Genève.

>> Voir également: "Le feu couve toujours en Bosnie", (Pascal Fleury - La Liberté du 02.06.2023)

Milomir Kovacevic

^{Photo par Milomir Kovacevic.}

Trente ans après la guerre qui a fait plus de cent mille morts, la Bosnie-Herzégovine est au bord de l'implosion. Si les accords de Dayton signés en 1995 ont mis fin aux combats, aujourd'hui, rien n'est réglé. De nombreuses failles mettent en péril cette paix de plus en plus fragile.

Un documentaire de Pierre-Olivier François (France, 2023).

Bosnie-Herzégovine, une paix si fragile

Disponible en ligne jusqu'au 3 août 2023