Séries télévisées, romans, débats: les troubles psychiatriques sont sortis de l'anonymat. Faut-il pour autant alimenter cette tendance à tout psychiatriser? C’est le débat houleux suscité par la dernière révision de la bible mondiale de la psychiatrie, le DSM publié le 20 mai.
Dans quelques jours paraîtra la nouvelle version du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, le DSM-5. Cette bible de la psychiatrie, publiée par l’Association américaine de psychiatrie (APA), n’a cessé d’enfler au fil du temps.
Elle compte aujourd’hui près de 400 critères diagnostiques et la dernière version sera encore plus volumineuse. De nombreux spécialistes dont le professeur américain Allen Frances critiquent cette évolution de la psychiatrie qui tend à pathologiser les émotions de la vie courante et à élargir toujours plus les critères de la folie. Doit-on soigner – et traiter – les personnes qui vivent un deuil ou les amateurs de jeux vidéo ? Comment définir la frontière entre la normalité et la folie ?
Xanax, la pilule miracle qui mène en enfer
Si un trouble mental est diagnostiqué, on peut mettre sur le marché un médicament pour le soigner. L’industrie pharmaceutique a vite compris l’intérêt du DSM. En 30 ans, le Xanax est devenu l’anxiolytique le plus vendu au monde et les troubles anxieux figurent désormais en tête des troubles mentaux. Avec l’introduction de nouveaux critères pour des troubles anxieux très courants dans la population, le DSM a créé autant de nouvelles cibles marketing pour l’industrie pharmaceutique. Mais trop facilement prescrit ou sur de longues périodes, le Xanax induit une addiction similaire à celle de l’héroïne.
Reportages de Mario Fossati, Christophe Ungar et Jean-Marc Chevillard