Certains opérateurs de téléphonie se livrent à une drôle de guerre, où tous les coups semblent permis pour acquérir des clients ! Nous avons recueilli de nombreux témoignages de démarchage pour convaincre le consommateur de signer un contrat de téléphonie fixe. Voyons quelques exemples.
Démarchage à domicile
Bonjour Madame, je me présente, je
suis X, je passe dans tout le quartier pour le téléphone. Vous avez
bien le téléphone fixe à la maison ?
On a sonné à la porte de Madame Siléné Boschung. Elle ouvre et
nous raconte alors le discours du vendeur : « J'ai reçu la
visite d'une personne à ma porte qui s'est fait passer pour
Swisscom en me disant : je viens de la part de la gérance à propos
de vos téléphones. Et puis j'ai dit : qu'est-ce qu'ils ont mes
téléphones ? Il m'a dit : oui, on doit contrôler les téléphones.
J'ai dit : vous êtes de quelle maison ? Et puis il me dit : et
vous, vous avez quel opérateur ? J'ai dit : mais vous, vous êtes
qui ? Alors, il m'a répondu : c'est Swisscom. J'ai dit : ça
m'étonnerait, parce que Swisscom ne vient jamais chez les gens. Il
m'a dit : oui, non, c'est sunrise. Alors j'ai dit : ça ne
m'intéresse pas. Il a insisté. Ce que je n'aime pas du tout, ce
sont leurs méthodes très agressives, ils insistent même quand on
dit non, et puis ça les fâche qu'on ne soit pas d'accord.
»
Chaque fois que sunrise est interpellé sur ses méthodes agressives
de démarchage, l'opérateur prétend qu'il s'agit d'un dérapage
exceptionnel ou de l'initiative malheureuse d'un vendeur.
Mais nous avons recueilli un autre
témoignage, celui d'une personne qui a brièvement travaillé comme
démarcheur pour sunrise et qui a été révoltée de ce qu'on lui
demandait de faire : « On m'a expliqué que le but en faisant du
porte à porte était de faire signer les gens pour un contrat
sunrise pour deux ans. Mais pour leur faire signer ce contrat, on
faisait croire qu'on venait de la part de Swisscom et, de plus,
qu'en signant ce contrat, ils ne s'engageaient à rien à part avoir
une heure de téléphone gratuite par mois. J'ai suivi une personne
qui travaillait depuis quelques mois. C'est lui qui parlait et,
ensuite, il m'a dit : eh bien, maintenant c'est ton tour, tu me
montres comment tu t'en sors. Il se trouve que je ne m'en sortais
pas très bien, parce que dans un souci d'honnêteté je voulais tout
dire aux gens. Il m'a dit qu'il ne fallait pas tout leur dire. On
avait plusieurs contrats à faire signer ; on faisait croire aux
gens qu'ils signaient un contrat pour l'heure gratuite et un autre
contrat, je ne sais plus exactement pourquoi. Mais on cachait le
haut du contrat, puis on soulevait juste à l'endroit de la
signature et c'est là que les gens signaient. »
« On ne m'a pas vraiment dit qu'il fallait mentir, mais je me
rappelle être allé chez une dame qui m'a dit : mais moi, j'ai
toujours été chez Swisscom et j'aimerais pouvoir faire ça en
restant chez Swisscom. Moi, j'ai bien compris que ce n'était pas
possible de faire comme ça, mais j'ai quand même demandé à mon
coach ce qu'il en était. Il m'a répondu que j'avais qu'à lui dire
que de toutes manières c'était pour Swisscom, et puis qu'elle se
rendrait bien vite compte quand elle recevrait la facture de
sunrise. »
Nous avons voulu vérifier quelles
étaient les recommandations faites aux démarcheurs. Un enquêteur
d'ABE s'est annoncé en recherche d'emploi à la société Free
Concept, qui effectue le démarchage pour le compte de
Sunrise.
Notre enquêteur explique : « On m'a proposé de suivre un
vendeur formateur durant une journée. Ce qui m'a étonné au départ,
c'est qu'il y a souvent des codes pour les portes d'immeubles. On
essaie de se faufiler en même temps qu'une personne qui rentre chez
elle et qui fait le code, ou alors on m'a montré qu'on pouvait
utiliser une carte, genre carte de crédit, qu'on glisse dans la
fente de la porte et, avec quelques manipulations, on arrive
finalement à ouvrir la porte un peu par effraction. »
« Ensuite, c'est la façon de s'imposer auprès des gens. Au
début, on n'explique pas que c'est pour sunrise. On dit qu'on
travaille pour le réseau suisse. »
Est-ce que je peux vous demander chez quel opérateur vous êtes
inscrite ?
Je suis chez Swisscom.
Je travaille justement pour le réseau suisse et afin de fidéliser
nos clients à ce dernier, je vous fais bénéficier de six mois de
communications gratuites sur tout le réseau suisse fixe et les
mobiles sunrise.
Notre enquêteur commente : « Et c'est là qu'on entend pour la
première fois le nom de la compagnie. »
C'est gentil merci, je ne suis pas intéressée.
Attendez, attendez, Madame ! Je crois que vous n'avez pas l'air de
comprendre.
L'enquêteur d'A Bon
Entendeur poursuit son explication : « C'est comme si
finalement le particulier n'avait pas le choix, ça leur était
imposé et puis l'excuse qu'ils invoquent, c'est pour fidéliser les
clients au réseau suisse. Je pense que la personne peut le prendre
comme une agression, dans le sens où vraiment le vendeur s'impose,
il parle, il parle très vite, il empêche la personne de s'exprimer
et il balance des informations le plus vite possible pour que le
client n'ait pas le temps de réfléchir. Il fait signer ce papier,
qui est donc le contrat, mais qui s'intitule « inscription ». Il
lui dit qu'à tout moment elle peut résilier cette inscription sans
lui préciser que ça lui en coûtera cent francs. »
Mathieu Janin, porte-parole de sunrise, apporte son éclairage sur
ces pratiques et dit si son entreprise les cautionne.
Suite à de nombreux problèmes dénoncés par les consommateurs,
les grands prestataires de télécommunications ont élaboré un code
de déontologie, centré sur un comportement courtois lors de la
conclusion de contrats. Nous aurons l'occasion de vérifier si cette
convention va bien être appliquée.
Acquisition de clients par démarchage téléphonique
Certains
grands opérateurs de téléphonie mandatent ainsi des sociétés
privées de démarchage. Il n'y a pas que le porte à porte pour
acquérir de nouveaux clients, mais l'appel téléphonique aussi.
Attention ! Prononcer
OUI
peut être fatal.
Geneviève Perret en a fait l'expérience : « J'ai reçu un appel
d'une opératrice se disant passer pour Swisscom. Elle m'a dit :
vous aurez 40% de rabais sur votre facture ; ça vous fait plaisir,
Madame Perret ? C'est une bonne nouvelle ? Alors, j'ai dit : eh
bien, oui. Elle m'a demandé d'enregistrer mes coordonnées. J'étais
un peu sceptique, mais j'ai quand même obéi. Et puis, elle m'a dit
: on fait ça, Madame Perret, parce que vous êtes une bonne cliente,
qui payez toujours vos factures, alors on veut vous récompenser.
Seulement pour ça, pour avoir ces 40%, il faut être enregistré à
Berne. Puis, on s'est quitté et j'ai reçu un deuxième appel et là,
l'opératrice s'est vraiment présentée faisant partie de Télé2.
Cette dernière m'a dit que je devais réenregistrer tout ça. Alors
là, j'ai dit que c'était hors de question, que je ne voulais pas
changer d'opérateur. Elle s'est fâchée et m'a dit que mes voisins
paieraient de toute façon moins cher que moi, que je ratais une
bonne occasion de faire des économies. »
La famille Ruegger s'est retrouvée sans s'en rendre compte
pré-sélectionnée pour un an chez Econophone. C'est un formulaire
pré-enregistré avec les réponses de Corinne Ruegger qui a fait
office de contrat.
Marc et Corinne Ruegger témoignent : « Je ne m'attendais pas
à ce que ce soit quelque chose de définitif. Je pensais qu'on
allait recevoir une proposition à la maison, ce qui n'a pas été le
cas. J'ai répondu à quelques questions et l'affaire était faite.
Deux mois après, on a reçu la première facture. C'est là qu'on
s'est rendu compte que nous avions changé d'opérateur. Ce sont de
beaux parleurs ; ils nous amènent ça sur un beau plateau. Moi,
franchement, je n'ai rien vu venir. »
Monsieur et Madame Ruegger ont été fâchés par l'attitude du
vendeur : « Ils vous prennent tout de suite de haut en vous
disant que vous avez signé en disant OUI au téléphone. Vous avez
signé pour douze mois et ce délai devait être respecté. »
A l'Office fédéral de la
communication (
OFCOM
), qui est chargé de la
surveillance des opérateurs, que pense-t-on de tout ça ?
Peter Fischer, directeur suppléant, nous répond : « A notre
avis, il y a un problème. Il y a trop d'agressivité dans le
démarchage, notamment par téléphone, par certains opérateurs, voire
des entreprises chargées par certains opérateurs de procéder à ce
démarchage. Malheureusement, cet outil plutôt pratique aussi pour
les consommateurs est, dans certains cas, utilisé de manière
abusive. Certains opérateurs apparaissent plus souvent que d'autres
dans les plaintes. Je préfère ne pas divulguer de noms, mais on est
en contact constant avec ces opérateurs, je dirais même pour qu'ils
changent leur méthode. »
Une action qui reste cependant très limitée, puisque l'OFCOM dit
ne pas avoir les moyens d'intervenir directement sur la relation
entre clients et prestataires de télécommunications, qui relève du
droit privé.
L'OFCOM vient quand même de concocter un durcissement des règles
que les opérateurs doivent respecter. Peter Fischer nous explique :
« Nous avons mis un projet en consultation, qui prévoit par
exemple d'interdire complètement que le démarcheur assiste le
démarché pendant l'enregistrement pour dire OUI aux bons endroits,
etc. L'opérateur devrait également faire marche arrière, s'il
n'arrive pas à apporter la preuve de la conclusion du contrat par
lui-même. Nous proposons également des options où toute la
conversation de démarchage devrait être enregistrée pour savoir ce
qui a été raconté à ce consommateur pour qu'il signe le contrat.
Car, en effet, il y a certaines plaintes qui nous ont été
adressées, où les consommateurs avaient l'impression qu'on leur
avait raconté complètement autre chose que ce qu'ils ont constaté
après avec le contrat. »
Un autre problème est récurrent :
des démarcheurs se font passer pour Swisscom. Exemple avec Paulette
Burkhalter, démarchée par Cablecom : « J'ai reçu un téléphone
comme quoi c'était Swisscom qui m'appelait, que j'étais une bonne
cliente et donc j'allais recevoir un petit cadeau. Alors, il m'a
demandé de quelle année j'étais, si j'étais née avant 1931. Et
puis, il m'a dit qu'il m'offrait quatre mois. Il fallait aussi que
je lui dise dans quel pays je téléphonais le plus, là j'aurais
encore une réduction. Ensuite, il m'a posé d'autres questions, je
ne me rappelle plus exactement quoi. Le vendredi, j'ai reçu une
lettre où ils avaient marqué ce que j'avais répondu, ils avaient
changé mon numéro de téléphone, et il fallait que je signe et
renvoie la lettre le plus vite possible. Mon fils m'a dit : tu
sais, maman, je crois que c'est une arnaque. Ce n'est pas possible
qu'ils offrent autant de mois de téléphone. Le lundi matin, le
facteur est venu avec un gros colis. C'est drôle, me suis-je dit,
je n'ai rien commandé. J'aurais peut-être dû me méfier. J'ai ouvert
le paquet et c'était un téléphone. »
Qu'un opérateur se fasse passer pour un autre, c'est illégal, mais
là encore l'OFCOM se déclare impuissant. Peter Fischer nous
explique : « Nous ne pouvons pas poursuivre, parce que nous ne
sommes malheureusement pas l'autorité compétente pour cela. Pour
limiter ce genre de problèmes, nous proposons l'obligation
d'enregistrer toute la conversation de démarchage, ce qui fait que
ce genre de choses serait prouvé par la suite. Ca devrait beaucoup
améliorer la situation. »
Sur son site Internet, l'OFCOM
donne quelques conseils pour choisir son opérateur en toute
connaissance de cause et pour réagir en cas de présélection
abusive.
On peut vérifier sur quel opérateur sa ligne est connectée en
appelant le numéro test gratuit : 0868 868
868.
On peut se demander pourquoi les consommateurs n'obtiendraient pas
le droit de révocation pendant sept jours pour un contrat arraché
par téléphone, comme c'est le cas pour la vente à domicile. C'est
le motif de l'initiative parlementaire du conseiller aux Etats
Pierre Bonhôte, qui est soutenue activement par la FRC.
B-a-ba du téléphone fixe et l'avenir du secteur
Pendant longtemps, pour avoir le
téléphone chez soi, il n'y avait qu'une solution : les PTT. Mais
avec la libéralisation des télécommunications et l'évolution de la
technologie, les choses ont bien changé.
Depuis deux ou trois ans, les câblo-opérateurs sont arrivés sur le
marché de la téléphonie fixe. Ces sociétés qui commercialisent la
télévision et Internet par le câble proposent aussi le téléphone.
Une bonne partie des Suisses ont donc maintenant le choix entre un
tel raccordement, qui coûte environ vingt francs par mois, et la
ligne traditionnelle de Swisscom, facturée 25,25 francs par
mois.
Pour l'instant, Swisscom a le monopole du dernier kilomètre de la
ligne traditionnelle, c'est-à-dire la portion de ligne entre le
central téléphonique du quartier et son domicile.
Mais à partir du central, la
libéralisation a eu pour effet que l'on peut choisir entre les
prestations de différents opérateurs. C'est bien, parce qu'il y a
concurrence sur les tarifs des minutes de communication. Mais ce
n'est pas facile dans cette jungle de tarifs de trouver la solution
la plus avantageuse dans sa situation personnelle.
Xavier Studer, journaliste de la TSR, nous aiguille : « Ça
vaut la peine de regarder sa facture de téléphone, pour regarder un
petit peu quels sont ses comportements. Maintenant, il faut bien se
dire que si on est un petit consommateur de téléphone et qu'on
l'utilise pour quelques dizaines de francs par mois, le temps qu'on
peut perdre en cherchant l'offre la meilleure marché et la plus
intéressante, c'est peut-être du temps mal investi. »
Xavier Studer suit de près le monde
des télécoms. Il tient un blog sur ce sujet sur le site de la
Télévision romande. Avec lui, nous avons déterminé quelques pistes
de réflexion pour ceux qui veulent faire baisser leur facture. Ce
sont des pistes seulement, car vu la multitude des tarifs, il n'y a
pas un opérateur à recommander, mais quasiment une solution pour
chaque consommateur.
Premier élément à examiner :
le nombre d'appels vers des téléphones
portables.
Xavier Studer : « Si on voit qu'on appelle deux ou trois
numéros, qu'on appelle souvent sa famille, il faut savoir qu'il y a
des opérateurs qui offrent des tarifs particulièrement avantageux,
voire même la gratuité vers les téléphones de leur réseau. A ce
moment-là, ça vaut la peine de choisir une option ou un opérateur
qui permet ce genre d'arrangement. Parfois, il n'est même pas
nécessaire de changer d'opérateur ; on prend des forfaits adéquats,
même chez Swisscom, on peut diminuer sa facture, même si cet
opérateur est souvent le plus cher, on arrive à des chiffres plus
raisonnables. »
Autre élément à examiner :
les moments de la journée où on téléphone le
plus.
Xavier Studer nous explique : « Les personnes qui sont
absentes de leur domicile toute la journée, qui reviennent autour
des 19-20 heures, peuvent bénéficier des offres de gratuité des
appels à partir de 20 heures, voire même avant. »
Essentiel également : les
téléphones vers l'étranger.
Xavier Studer : « On constate qu'il y a de très grandes
différences à l'heure actuelle. Un des meilleurs moyens pour faire
baisser sa facture, par exemple si on n'a pas Internet chez soi et
qu'on ne peut pas utiliser des logiciels comme Skype, c'est
d'utiliser des cartes pré-payées de téléphone pour le réseau fixe.
On constate que parfois les tarifs sont divisés presque par dix. On
a l'exemple d'un opérateur qui propose des tarifs à 25 centimes
vers le Portugal, alors qu'avec une certaine carte à gratter on
peut descendre jusqu'à trois centimes. »
A l'avenir, téléphone fixe et
mobile finiront par se confondre. Une solution qui a sûrement de
l'avenir, quand on sait qu'une bonne partie des appels sur mobile
sont reçus ou effectués alors que la personne est à côté d'un
téléphone fixe !
Mais d'autres changements importants sont annoncés pour les
prochains mois.
D'abord, la fin du monopole de Swisscom sur le dernier kilomètre.
Cela signifie que d'autres opérateurs pourront avoir accès à cette
portion de ligne et facturer, en plus des communications,
l'abonnement mensuel du raccordement. Mais les modalités de cette
libéralisation ne sont pas encore fixées.
Autre changement, Swisscom va aussi
proposer la télévision par ADSL.
Xavier Studer nous en parle : « Il va y avoir une guerre de
plus en plus vive entre, d'un côté, les câblo-opérateurs et, de
l'autre, les opérateurs de téléphonie. On peut imaginer qu'ils vont
introduire des forfaits comme cela se fait en France, où on aura un
certain nombre de chaînes de télévision, des minutes de
conversation et l'accès à Internet haut débit. Si on regarde ce qui
se passe en France, par exemple, ces forfaits tournent autour de 50
francs. Si on veut la même chose en Suisse, on arrive actuellement
à une facture d'environ 100 francs, donc on est pratiquement deux
fois plus cher en Suisse, ce qui laisse penser qu'on a encore une
marge de manœuvre vers la baisse, même si les prix sont parfois un
peu plus élevés dans ce pays. »
Concrètement, comment trouver la
solution personnalisée qui coûte le moins cher possible ? Allez
voir le blog de Xavier Studer . Vous analysez votre facture de
téléphone et vous trouverez des liens adaptés à votre
situation.
Si vous vous intéressez aux nouvelles techniques pour téléphoner,
cliquez sur la vidéo pour regarder les différentes
solutions démontrées par Xavier Studer: d'ordinateur à
ordinateur, USB sans fil, modem ou téléphone cellulaire avec wi-fi
par Internet.