Les bonnes vieilles ampoules à incandescence ont le gros défaut de gaspiller énormément d'énergie. L'alternative, ce sont les ampoules économiques. Ces ampoules à faible consommation peuvent permettre des économies considérables, et favoriser la protection de l'environnement.
Des ampoules pour protéger l'environnement
Selon l'Office fédéral de
l'environnement, les surfaces fortement illuminées ont doublé ces
dernières années. A la clé, une consommation d'énergie qui ne cesse
de croître. Aujourd'hui, l'éclairage engloutit environ 20% de la
consommation électrique d'un ménage en Suisse. Un chiffre qui
pourrait être réduit : l'ampoule Edison à incandescence, plus que
centenaire, disperse 95% de l'énergie électrique qu'elle consomme
sous forme de chaleur, et n'en utilise que 5% pour éclairer.
De plus en plus
performantes
Des hommes politiques, des entités de service public comme les
Services industriels de Genève et même des fabricants comme Philips
et des grands magasins tel Ikea mènent campagne avec des ONG comme
le WWF contre ce gâchis. Pierrette Rey, porte-parole du WWF Suisse
romande : « La production d'électricité engendre beaucoup
d'émissions de CO2, les principaux gaz responsables du
réchauffement climatique. En économisant l'électricité, nous aurons
moins d'émissions de CO2, ce qui sera aussi favorable au climat.
» Une mesure toute simple est préconisée : le remplacement de
nos vieilles ampoules par la nouvelle génération d'ampoules dites
économiques ou fluo compactes. Elles consomment cinq fois moins
d'énergie pour une luminosité comparable. « On arriverait pour
les ménages suisses à économiser 280 000 tonnes de C02 par année.
» En réponse au choc pétrolier des années 70, des chercheurs
avaient alors eu l'idée de replier sur lui-même un tube
fluorescent. Mais ces ampoules avaient de gros défauts de jeunesse,
surtout leur lenteur à l'allumage et leur lumière blafarde. Des
défauts qui commencent à être corrigés avec la deuxième génération
de lampes économiques. Simon Simos, professeur à l'Ecole
d'ingénieurs de Genève : « La qualité de la lumière devient
tout à fait bonne. Au niveau de la consommation énergétique, cela
s'améliore de façon considérable et, petit à petit, on élimine les
inconvénients techniques que nous avons sur ce type de source.
»
Ambiances au
choix
Avec les ampoules économiques, il est désormais possible de varier
les ambiances lumineuses, de choisir son environnement lumineux :
« Le choix est très subjectif, il dépend de vos envies, de ce
que vous éclairez, des dimensions de la pièce, de la fonction de la
pièce et des ambiances que vous voulez créer. Par exemple, dans un
salon, vous voudrez des ambiances relaxantes plutôt chaudes et avec
un niveau d'éclairage assez bas. » Face à cette rivale qui
s'affiche désormais sans complexes, l'ampoule à incandescence voit
sa brillante existence mise en danger. Ses jours sont comptés,
disent tous les spécialistes : d'ici à quelques années, les lampes
économiques feront partie de notre quotidien, et donneront à la
nuit une couleur plus écologique.
Ampoules à faible consommation : le test
En collaboration avec Kassensturz, Ktipp et le WWF, ABE a fait
tester onze modèles d'ampoules à faible consommation par un
laboratoire spécialisé. Trois tests ont été menés : durée de vie,
nombre d'allumage et intensité lumineuse.
Stefan Gasser, ingénieur en électronique, est spécialiste des
questions d'éclairage et d'économies d'énergie. Sa maison, dans les
Grisons, est totalement équipée d'ampoules économiques. « Grâce
aux ampoules à basse consommation, j'ai économisé 500
kilowattheures. Ma facture d'éclairage a été divisée par cinq.
» Il a mené le test sur nos onze ampoules.
Trois types d'ampoules ont été examinées : les modèles premier
prix, les modèles plus chers mais à très longue durée de vie et les
modèles plus récents à forme d'ampoules traditionnelles.
Notre classement a été établi en fonction de cinq critères :
l'efficacité lumineuse, la résistance à l'allumage, le temps
d'allumage, la durée de vie et l'intensité lumineuse. Les modèles
testés ont été jugés sur un barème allant de 1 à 6.
Six ampoules ont été jugées « juste suffisantes
»
- Philips Softone 12 watts. C'est
le seul modèle en forme d'ampoule qui n'a pas survécu au test
d'allumage.
- Philips Génie energy saver 14 watts. Les huit ampoules de ce
modèle n'ont pas résisté aux allumages répétés.
- Sparsam Ikea 11 watts. Dans ce
cas aussi, les huit ampoules de ce modèle n'ont pas résisté aux
allumages répétés.
- Sparsam classic d'Ikea 11 watts. Elle est moins chère, mais deux
des ampoules testées ont sauté avant même d'atteindre un cinquième
de la durée de vie annoncée.
- Sunlux classic 10 watts. Son gros
défaut : elle a perdu 19% de son intensité lumineuse en cours de
test.
- Osram 10 watts. L'une des plus chères du test, elle aussi a
perdu 19% de son intensité lumineuse pendant le test.
Cinq ampoules ont été jugées « bonnes »
- Philips PLE-T stic 15 watts. Son
seul point faible: elle prend soixante secondes pour atteindre sa
pleine luminosité.
- Sunlux économique 17 watts
- Sparsam Ikea longlife 15 watts
- Osram Dulux EL longlife 15
watts
- Sunlux Elite long life 15 watts
Les deux derniers modèles ont été jugés les
plus performants, tant sur leur durée de vie qu'en matière
d'allumage et d'intensité lumineuse, mais ils sont aussi parmi les
plus chers. Enfin, un conseil : écrire sur le culot de l'ampoule la
date de la première utilisation et garder le ticket. Si une ampoule
ne tient pas ses promesses, vous pourrez l'échanger chez votre
revendeur. Elles sont garanties le temps de leur durée de vie.
Les économies possibles pour un couple avec deux enfants
Serge Cursaz est conseiller en énergie aux Services industriels
de Genève. Pour ABE, il fait le bilan énergétique d'un appartement
occupé par une famille de quatre personnes.
La cuisine
Une cuisine standard d'abord : deux lampes à 40 watts, un tube
fluorescent à 60 watts, deux autres ampoules à 40 watts dans la
hotte et une guirlande à 30 watts. En tablant sur un allumage moyen
de quatre heures pour jour et sur un kilowatt heure à 23 ct, voilà
la consommation annuelle : « 350 kilowattheures par année, ça
représente une facture d'environ 80 francs. » Première
économie possible : remplacer les ampoules à incandescence avec,
par exemple, un modèle économique de 7 watts. Pour la hotte
ensuite, notre conseiller indique aussi des modèles économiques,
même si on les utilise moins longtemps que les autres. « Dans
la pièce, ce sont les dernières lampes à changer mais dans un
concept global, oui, elles sont à changer, elles vous dureront dix
à quinze ans, économiquement vous vous y retrouverez. » Le
tube fluo présent dans la plupart des cuisines pose problème. De
classe G, son efficacité énergétique est la plus basse. « On va
le démonter. C'est un tube à 60 watts et il est à broche.
Effectivement, on ne va pas trouver l'équivalence en économique ;
la seule possibilité serait de changer et de passer à des tubes t5.
[...] Ce sont les nouveaux tubes de la dernière génération et pour
la même longueur, vous allez retrouver une puissance de 18 watts et
une efficacité lumineuse deux fois supérieure. » Bilan final,
pour cette pièce à cinq ampoules : « On a remplacé toutes les
ampoules à incandescence par des ampoules économiques ; seule la
guirlande lumineuse n'a pas été changée. [...] On passe de 80
francs annuels pour cette pièce-ci à 20 francs. »
La chambre des enfants et
le salon
Des spots économiques à 7 watts remplacent avantageusement les
spots traditionnels. Consommant cinq fois moins d'énergie par an,
ils permettront d'économiser 10 francs. Pour certaines lampes
halogènes, en revanche, pas de solution de rechange. Conseil du
spécialiste : utiliser un variateur à demi-position lorsqu'on a
besoin de moins de lumière, cela fait baisser de 50% la
consommation d'électricité.
La salle de
bain
Reste à remplacer l'ampoule de la salle de bain. « Je vous
déconseille l'équivalence de deux ampoules à incandescence à 40
watts pour passer à celles à 7 ou 8 watts. [...] L'efficacité
lumineuse ne sera pas celle attendue. Passer plutôt par deux
modèles de 11 watts. »
Au final, dans cet exemple, le
remplacement de quatorze ampoules classiques par des modèles à
basse consommation et l'utilisation d'un variateur pour halogène
permettra de faire baisser la consommation électrique de 1318 à 425
kilowattheures par an. La facture d'électricité passera de 302
francs à 98 francs dans notre cas, soit une belle économie de 204
francs par an. En tenant compte du prix des nouvelles ampoules, à
savoir, dans notre cas, 198 francs, c'est à partir de la deuxième
année d'utilisation que l'on économisera vraiment de l'argent. Les
ampoules qu'ABE a choisies étant en moyenne d'une durée de vie de
cinq ans, cela représente 600 francs d'économie en quatre ans.
Choisir ses ampoules
Les indications des fabricants d'ampoules ne sont pas toujours
limpides. Les deux informations pratiques les plus importantes sont
la puissance et la colorimétrie de l'ampoule.
La puissance
La puissance de l'ampoule est en général bien indiquée. Elle donne
l'équivalence entre modèles classiques et économiques, exprimée en
watts. Elle peut légèrement varier selon les fabricants. Un petit
truc connaître la consommation réelle : diviser les watts par cinq.
La mesure n'est pas toujours exacte, mais elle donne une bonne
indication (une puissance de 100 watts chez Osram correspond en
mode économique à 20 watts par exemple).
La couleur
Il y a deux mesures à considérer. Premièrement les Kelvin, qui
indiquent la température de couleur. Plus ils sont bas, plus on
aura une lumière chaude.
Ensuite, l'indice de rendu des couleurs, l'IRC, qui se mesure sur
une échelle de 100. Dès 80, il est bon ; au-delà de 95, il est
excellent.
Problème : ces informations sont
soit difficiles à déchiffrer, soit inexistantes selon le fabricant.
Ikea ne donne pas d'indications à ce sujet. Osram comme Philips
donnent des indications en anglais - warm white par exemple - pour
du blanc chaud, ou un nombre - 827 par exemple. A lire ainsi : 8
pour un rendu de couleur de 80 et 27 pour une température de 2700K.
Sur le culot des Sunlux, la marque de Migros, on trouve uniquement
l'information sous forme chiffrée.
Efficacité et durée de
vie
Un classement à sept niveaux facile à comprendre indique
l'efficacité énergétique des ampoules. Le niveau A en vert est le
plus économique en énergie. La durée de vie est exprimée en heures
ou en années. Enfin, deux pictogrammes peuvent figurer sur
l'emballage. L'un indique que l'ampoule ne peut pas être utilisée
avec un variateur, ce qui est le cas encore de la plupart des
ampoules économiques. L'autre indique l'obligation de recycler.
Des ampoules à recycler
Il faut impérativement recycler les lampes à basse consommation.
Elles contiennent en effet des poudres toxiques. La Suisse est
d'ailleurs un très bon élève en la matière, puisque nous recyclons
entre 60 et 70% des tubes fluorescents. Ils sont traités notamment
sur les hauteurs de Lausanne.
La récupération des métaux
lourds
Les tubes fluorescents, comme les ampoules économiques,
contiennent des métaux lourds, notamment du mercure. Les tubes et
les ampoules usagés sont collectés soit par les revendeurs, soit
par les communes avant d'être transportés par les recycleurs vers
un centre de récupération. Le premier centre de Suisse romande
spécialisé dans le traitement des sources lumineuses a été créé à
Eclépens, sur les hauteurs de Lausanne. Les tubes sont d'abord
séchés, puis broyés (ce centre ne reçoit qu'une quantité marginale
d'ampoules économiques). Par sécurité, les opérations doivent se
dérouler dans un espace fermé. Olivier Richoz, chef d'exploitation,
Cridec-Lumirec : « La machine sépare les composants, les métaux
par déferraillage et les poudres par aspiration. » La quantité
de mercure contenue dans les tubes fluo est infime mais cette
poudre doit être traitée, car elle peut contaminer
l'environnement.
Elle est envoyée et stockée en Allemagne avec d'autres déchets
dangereux. Quant au verre, il est recyclé en matériaux isolants et
même en pare-brises de voitures. Le métal est, lui, récupéré en
fonderie.
Un recyclage en forte
progression
Pour l'instant, l'installation tourne à petit régime : 60 tonnes
seulement ont été traitées en 2006. Mais le recycleur compte bien
augmenter la cadence, d'autant qu'il a investi 700 000 francs pour
cette nouvelle activité. Fabien Burnier, responsable service
commercial, Cridec-Lumirec : « Notre objectif est d'atteindre
les 100 tonnes en 2008. Nous constatons qu'il y a un gros travail à
effectuer, aller récolter des petites quantités de néons. Pour
cette raison, nous investissons dans une structure logistique pour
être plus proches des utilisateurs. » Au niveau national, 1000
tonnes de tubes sont recyclés chaque année. Quant aux ampoules
économiques, leur tonnage est encore trop petit pour qu'il soit
rentable de les traiter en Suisse. Mais la situation devrait
changer. Selon la fondation en charge du recyclage des sources
lumineuses en Suisse, le nombre de ces ampoules usagées ramenées
auprès des collecteurs augmente de façon notable. Au point que la
taxe anticipée de recyclage prélevée auprès des consommateurs sera
baissée l'an prochain.
Informations complémentaires
Il faut cinq fois plus d'énergie pour fabriquer des ampoules
économiques que pour la production d'ampoules à incandescence. Au
total cependant, le bilan écologique est meilleur pour les ampoules
économiques, au vu de leur durée de vie et de leur faible
consommation énergétique. Enfin, ces ampoules économiques sont
encore très chères à la pièce. Ce prix élevé est pour une large
part dû aux barrières protectionnistes décidées par l'Union
européenne depuis 2001. Bruxelles impose, en effet, une taxe de 66%
sur les ampoules à basse consommation d'énergie produites en Chine
; une taxe dont la durée vient d'être prolongée d'un an. La part
des ampoules chinoises sur le marché européen atteint presque les
70% et la taxe imposée par l'UE doit permettre aux fabricants
européens d'adapter leurs coûts de production pour qu'ils soient
compétitifs.
Le principe du Cassis de Dijon : entretien avec André Cominoli,
adjoint au chimiste cantonal genevois
Le principe du Cassis de Dijon offre la possibilité pour un produit
européen de circuler librement dans tous les pays de l'Union
européenne. Pour que ce principe s'applique aussi à la Suisse, le
Conseil fédéral veut rendre ces produits européens compatibles avec
les réglementations suisses. Mercredi dernier, il a décidé de
limiter considérablement les exceptions. A priori, c'est
formidable, les importations seront moins chères. Mais il y a un
revers à la médaille : toute une série d'indications risquent de
disparaître des emballages. Les explications d'André Cominoli,
chimiste cantonal adjoint (GE),