Du jambon à l'eau, un fromage allemand additionné d'amidon, ces produits sont désormais vendus en Suisse grâce au fameux principe du Cassis de Dijon. On nous avait promis une baisse de prix! Mauvaise nouvelle au rayon alimentation, c'est plutôt une vraie baisse de la qualité.
Le principe du Cassis de Dijon entre en Suisse
Avant l’entrée en vigueur du principe du Cassis de Dijon, pour rentrer en Suisse, les produits européens devaient montrer patte blanche : étiquettes en trois langues, emballages spéciaux, mention des compositions. Il fallait respecter les règles, les interdictions et autres contraintes helvétiques.
Et tout cela coûtait cher aux consommateurs-trices ; des prix 30 % plus élevés que leurs voisins. Les organisations de consommateurs comme les politiques ont voulu y mettre un terme.
Selon Mathieu Fleury, secrétaire général FRC : « En Suisse, il y a une série de normes qui n’ont pas pour vocation le bien du consommateur, mais qui ont une vocation protectionniste. » Et le président du PDC Christophe Darbellay de défendre le pouvoir d’achat : « Il est temps, en ces temps de crise, de redonner au consommateur son pouvoir d’achat. »
Heureusement, Doris Leuthard, la fée économie avait une solution miracle : « Avec l’introduction du Cassis de Dijon, on a un élément en faveur de tous les consommateurs en Suisse ». mais qui n’était pas comprise de tous.
Le principe du Cassis de Dijon est avant tout une bataille commerciale qui opposa nos voisins français et allemands il y a de cela 30 ans. Le cassis de Dijon, une liqueur pour les Français, ne l’était pas côté allemand. Son importation outre-Rhin avait alors été interdite. La justice a tranché en faveur de la France et établi un principe : Ce qui est produit légalement dans un pays de l’Union européenne peut être vendu dans tous les pays de l’Union.
Pour Doris Leuthard, la Suisse devait appliquer la même règle. On prévoyait alors
10 % de baisse en moyenne, soit 2 milliards d’économie chaque année. Les réactions furent enthousiastes. Monika Dusong, présidente de la FRC encourageait même Doris Leuthard en janvier 2007 : « Nous sommes ravis de votre énergie et vous avez notre total soutien. »
Il y a avait bien quelques réticents chez les agriculteurs, le centre patronal, les verts et l’udc, comme Guy Parmelin, conseiller national UDC (avril 2009) : « Le consommateur, comme le producteur suisse sera le dindon de la farce ». Ou encore Louis Shelbert, conseiller national Les verts (avril 2009) : « les produits qui ne respectent pas nos normes pourront quand même être commercialisés en Suisse.»
Mais rien n’y fit et le principe du Cassis de Dijon entra en vigueur finalement cet été. D’ailleurs pour préserver la qualité suisse tout était prévu. L’Helvétie avait négocié 18 exceptions avec l’Europe ; pas d’OGM, pas de phosphates dans les lessives, pas de plomb dans les peintures, pas de poulets en batterie.
Avant de se retrouver dans les rayons, les produits alimentaires qui ne respecteraient pas les normes suisses devraient même obtenir le feu vert des savants de l’Office fédéral de la Santé publique.
Aucun risque que des produits dangereux ou trompeurs ne se retrouvent sur le marché. Nicolas Schenk, juriste Office Fédéral de la Santé Publique affirmait en octobre 2010 : « Il faut bien se rendre compte que les normes européennes sont relativement élevées et sont tout aussi élevées que les normes suisses. Les attentes des consommateurs européens sont exactement les mêmes que les consommateurs suisses. Dès ce moment-là, dès que l’on sait ces deux éléments, finalement, le Cassis de Dijon va faciliter l’importation ou la consommation en Suisse de produits de bonne qualité. »
Jambon à l’eau
Le principe du Cassis de Dijon est entré en vigueur le 1 juillet dernier, l’Office fédéral de la Santé publique ayant donné pour l’instant son feu vert à 11 produits alimentaires comme de la crème, des œufs de poissons, du fromage blanc, une boisson fermentée à l’orange… Aucun de ces produits ne respecte les normes suisses, mais si l’OFSP dit « pas de problème, c’est pas dangereux pour le consommateur ni trompeur », vous les retrouverez sur les rayons.
Visite chez Del Maître, premier producteur romand de jambon avec 1000 tonnes annuelles vendues dans toute la Suisse. Dans cet atelier on désosse, on découenne et on pare les cuisses de porc depuis quatre heures du matin. De la belle pièce du boucher jusqu’au premier prix, ici, on produit tous les types de jambon. Et le niveau de qualité se joue sur un ingrédient tout simple : l’eau.
Joseph Aeby, directeur Del Maître « Nous allons injecter de l’eau salée dans le muscle de manière à le préparer à la production. Parce qu’effectivement, si y avait pas d’eau, on pourrait pas faire du jambon. Ce serait un rôti ! Donc c’est un procédé très vieux, qui permet à la fois de conserver et de donner le goût au jambon. »
Encore faut-il ne pas en abuser ! Justement, en vertu du Cassis de Dijon, un nouveau concurrent doit arriver très prochainement sur le marché. Un jambon autrichien gorgé d’eau.
Il existe trois produits reconnus en Suisse, selon Joseph Aeby, directeur Del Maître « Aujourd’hui en Suisse, on reconnaît trois produits. Le 1 est un jambon de derrière. C’est la qualité supérieure. Il est fait avec le muscle de la cuisse de porc et un ajout d’eau très faible. Ensuite, nous avons le jambon d’épaule. C’est un peu les mêmes règles, il y a un peu plus d’eau. Mais surtout, la différence, c’est le muscle. Ici, on va utiliser de l’épaule de porc. Et la 3 qualité, qui a une particularité, ça ressemble à du jambon, mais ce n’est plus du jambon. On a plus le droit de l’appeler jambon, parce que sa teneur en eau est beaucoup trop élevée. »
A quoi ressemble ce jambon autrichien qui a plus d’eau ? Joseph Aeby, directeur Del Maître nous fait une comparaison : « Ecoutez, j’ai envie de dire de manière très simple, ce serait cette qualité là avec l’eau qu’il y a dans celle-ci. »
Grâce au Cassis de Dijon, le jambon prestige de ce producteur genevois et le produit autrichien bas de gamme vont donc se retrouver côte à côte dans les rayons et sous le même nom. Ce n’est pas vraiment une bonne nouvelle, d’autant qu’il n’y aura pas d’obligation d’étiquetage spécifique.
Joseph Aeby, directeur Del Maître ne cache pas son pessimisme : « ça veut dire que très clairement, nous allons vers une réduction de la qualité puisque ce qui ne peut pas s’appeler jambon chez nous le devient tout à coup. Donc, c’est très clairement pour le consommateur une réduction de la qualité. La 2 inquiétude, c’est plutôt en relation avec une notion économique. Si on se trouve dans cette situation, c’est tout simplement pour niveler les prix. Encore une fois, il faudra produire meilleur marché. Et mettre de l’eau dans le jambon est effectivement une solution quand on joue la carte du prix ! »
Et ce petit tour de passe-passe risque de se répéter dans d’autres rayons : hormis le jambon autrichien, figurent dans les 1ers produits autorisés par Berne: une limonade italienne à la taurine, du fromage allemand à l’amidon ou encore un cidre danois particulièrement dilué.
Nicolas Schenk juriste à l’OFSP nous explique : « Pour le cidre, par exemple, c’est la même chose. Dès le moment où la loi danoise permet que l’on ajoute de l’eau jusqu’à 85% et tout de même appeler la boisson cidre, il n’y a aucune raison qu’on l’interdise, ce produit n’est pas dangereux pour la santé, il n’est pas trompeur puisque la liste des ingrédients devra être indiquée sur la bouteille, donc le consommateur sait en achetant ce produit qu’il y a 85 % d’eau et le reste ,c’est du jus de pomme fermenté.»
Ce fameux cidre, ABE l’a retrouvé, bien que la liste des produits soumis à l’OFSP soit confidentielle.
Valérie Teuscher, journaliste à ABE : «En apparence, rien ne distingue ces deux bouteilles ; même silhouette, même appellation, du cidre de pomme, et même couleur. Sauf qu’à ma droite, il s’agit du cidre danois et il contient 85% d’eau. A ma gauche, il s’agit d’un cidre suisse que nous avons trouvé en grande surface et qui lui ne contient pas d’eau. Il pourrait en contenir jusqu’à 30% selon la réglementation suisse. Et bien désormais pour savoir ce que vous buvez, il faudra retourner ces bouteilles, vous munir d’une bonne paire de lunettes pour essayer de déchiffrer la liste des ingrédients. »
Vous lirez notamment que ce produit est fabriqué en Suède, qu’outre l’eau il contient du sucre et du concentré de jus de pomme. Feldschlossen qui a obtenu l’autorisation pour l’importer, le décrit comme une sorte de « cidre moderne » .
Un produit qui contraste avec le cidre authentique fabriqué dans ces vergers de la campagne fribourgeoise. A la cidrerie du Vulcain ,on est en pleine récolte. Depuis 8 ans, Jacques Perritaz revalorise d’anciennes variétés de pommes pour fabriquer un cidre de caractère. Vingt mille bouteilles par année, commercialisées en vente directe ou dans des boutiques de la région.
Jacques Perritaz, producteur de cidre, Le Mouret décrit sa production : « Là, on est 100% jus, sur des variétés identifiables, que des vergers haute tiges non traités de la région fribourgeoise. Donc on est aux antipodes de cette production énorme, en plus édulcoration ou dilution dans de l’eau. On est à l’extrême inverse quoi, c’est sûr. »
Pourtant ce cidre artisanal de qualité portera lui aussi le même nom que notre fameuse boisson industrielle danoise qui débarque dans un marché suisse du cidre déjà à la peine. Une confusion des genres inadmissible pour l ‘Union suisse des paysans et son directeur, Jacques Bourgeois : « Ce que nous exigeons, c’est que 1° on ne commercialise pas ce produit sous le même nom. 2° il faut qu’il y ait une claire déclaration du pays de provenance. Nous sommes un pays avec de petites structures. Nous savons que nous n’avons aucune chance d’être concurrentiel dans des produits de masse. Comme par exemple cette cidrerie ici au Mouret. On veut commercialiser des produits à haute valeur ajoutée et c’est ce qu’on désire maintenir à l’avenir.»
L’USP n’avait pourtant pas soutenu le référendum lancé l’an dernier contre le Cassis de Dijon. Aujourd’hui, elle fait recours, avec l’association Fruit Union suisse contre trois des produits récemment autorisés. Un réveil un peu tardif diront certains.
Car la situation actuelle était prévisible. C’est en tout cas l’avis d’Adele Thorens .
La conseillère nationale verte a toujours combattu le Cassis de Dijon, craignant une baisse de qualité et un marché alimentaire à deux vitesses. « C’est des produits de très mauvaise qualité, j’vois absolument pas l’intérêt des consommateurs d’avoir sur le marché de tels produits. J’trouve tout à fait révoltant que le message qu’on adresse à une partie de la population, c’est de dire finalement pour vous la qualité suisse c’est pas adéquat on va vous fournir des produits de moindre qualité, spécifiquement pour vous qui avez un peu moins de moyens.»
Quand à la réalité des baisses de prix, la conseillère nationale émet là aussi des réserves : « Ces grands distributeurs ont dit clairement qu’ils n’étaient pas du tout certains de pouvoir faire baisser les prix à cause des charges administratives. Donc on est pas sûr du tout d’avoir des prix plus bas. »
Car pour les distributeurs le Cassis de Dijon version suisse, c’est encore trop de contraintes coûteuses en terme d’emballages. C’est ce qu’est venu rappeler récemment le directeur de Denner. L’enseigne fait recours contre une décision de l’OFSP qui vient de lui refuser l’importation d’une schnitzel allemande.
Peter Bamert, directeur Denner explique ce recours : « Ce produit mentionne « DE » pour Deutschland et « EU » pour Union Européenne… Mais cela ne suffit pas à l’OFSP, qui veut que soit écrit en toutes lettres « Produit en Allemagne ». C’est ce type d’interprétation à mon avis trop restrictive de la loi qui alourdit tout le principe du Cassis de Dijon et peuvent empêcher un effet sur les prix.»
Des produits alimentaires de moindre qualité, difficiles à reconnaître, des baisses de prix encore incertaines. Qu’en pense la Fédération romande des consommateurs, jadis fervent soutien du Cassis de Dijon ? Apparemment l’heure est au rétropédalage: « Certains consommateurs, malheureusement disons, sont contraints de choisir des produits de moindre qualité. Dans cette mesure-là, l’augmentation de l’assortiment peut être une bonne nouvelle pour eux. Mais globalement, on peut pas considérer que la baisse de qualité soit une bonne nouvelle pour le consommateur » selon Mathieu Fleury, secrétaire général FRC.
Quant à l’effet Cassis de Dijon sur les prix. Il est encore trop tôt pour l’évaluer. Mais la FRC promet de suivre la situation de près. Et Mathieu Fleury d’ajouter « Si la qualité baisse, alors le prix doit baisser. Il est exclu pour nous et c’est ce que nous allons combattre avec toutes nos forces, que la qualité baisse et que le prix reste stable. Ca, c’est vraiment le scénario du pire dans le Cassis de Dijon. Il est possible pour certains produits et c’est cet aspect là que nous ne pouvons pas accepter et que nous allons combattre par tous les moyens juridiques à notre disposition. »
Un panier test de produits a été mis en place par la Confédération. Premiers résultats attendus au printemps 2011.
Les effets pervers du Cassis de Dijon
Le directeur de Migros-Genève, Guy Vibourel, n’est pas peu fier. Le géant orange vient de lancer un nouveau produit très européen ; aujourd’hui il nous présente son bébé. «Alors voilà, voilà les sirops de framboise que nous vendons. D’abord le leader incontesté, historique, puisque avec ce seul sirop on fait 25 % du marché du sirop dans toute la Suisse. Et le nouveau, le nouveau qui vient de rentrer dans notre gamme : le sirop M Classic, sirop dit Cassis de Dijon. »
Selon Guy Vibourel, ce produit est intéressant en terme de prix : « C’est un produit d’excellente qualité avec que 10% de fruits au lieu de 30%, mais avec un prix qui est 30 à 40 % moins cher que l’autre sirop. »
Trois fois moins de fruits que ne l’exige la loi suisse. Le géant orange a inauguré une particularité inédite du Cassis de Dijon version suisse. Une fois autorisés par l’OFSP, tous les produits similaires à notre sirop sans fruits, notre jambon et notre cidre à l’eau peuvent être importés librement en Suisse. Mais ils peuvent surtout être désormais fabriqués par les producteurs suisses selon ces règles européennes moins restrictives, ce que nous confirme Nicolas Schenk, juriste OFSP. « Dès le moment où l’autorisation est autorisée une fois, elle est autorisée une fois pour toute. Et les gens, les autres producteurs étrangers et suisses peuvent s’y référer pour mettre leurs produits sur le marché. C’est une sorte de deuxième législation parallèle à celle que l’on connaît habituellement. »
Une petite révolution. Migros est même allée plus loin. Elle a demandé à importer un sirop français à 10% de fruits, mais s’est contentée d’utiliser sa recette, pour pouvoir le fabriquer elle-même en Suisse. Guy Vibourel, directeur Migros-Genève justifie ce choix par souci de traçabilité : « Et pourquoi nous avons fait ça ? C’est parce que vous savez que le consommateur est également sensible à la traçabilité, à la provenance. Et si nous avons la possibilité de faire dans une de nos usines en Suisse, ce produit avec cette recette, je crois qu’on a gagné sur tous les plans. On a gagné sur le prix, on a gagné sur la provenance et on fait tourner l’industrie suisse. »
Une sorte de made in Switzerland français. Alors, produire selon les règles européennes, un moyen pratique de contourner les normes suisses plus restrictives ?
En tout cas le principe scandalise la conseillère nationale Adèle Thorens : « On édicte dans ce pays des prescriptions qui correspondent à la volonté des citoyens, à la volonté des consommateurs suisses. On les fait ces prescriptions et pis ensuite on ne dit pas qu’elles sont mauvaises, on ne dit pas qu’elles sont plus valables, on les maintient. Mais on tolère que d’autres entreprises travaillent selon d’autres règles avec un moindre niveau de qualité. Et ça, c’est vraiment une situation complètement absurde, un problème, je dirais, presque démocratique. »
Alors les producteurs suisses vont-ils emboîter le pas à Migros ? Allons d’abord voir un acteur particulièrement concerné : Morand. Une institution en Suisse Romande qui produit depuis plus de 100 ans des eaux-de vies et des sirops à Martigny.
Les sirops d’arômes comme la Grenadine représentent le gros du marché. Mais un quart des bouteilles qui sortent de cette fabrique sont labellisées « pur jus », comme ce sirop de cassis. Il contient du sucre, de l’eau et 30% de fruits, comme l’exige la loi suisse.
Alors l’autre Cassis de Dijon cette fois, va-t-il bouleverser les pratiques et recettes de cette maison centenaire ? Didier Fischer, directeur général Morand reste optimiste : « Pas de danger en la demeure pour nous. Simplement une observation du marché pour voir ce qui va se passer… » « Il y a une clarification, un renforcement que nous devons faire sur nos étiquettes, « au pur jus de fruit » devrait être beaucoup plus gros. Parce que c’est ça le caractère distinctif aujourd’hui. Jusqu’à présent c’était l’image du fruit. C’est plus le cas ! »
Pour se démarquer Morand mise plutôt sur la proximité à l’image de son prochain sirop : un pur jus 30 % fait avec des abricots valaisans. « S’il (le consommateur) ne répond pas à ça.. On va pas rester les bras croisés et pleurer sur le fait qu’un nouveau principe vient nous saboter notre marché…On réagira, on va réagir, on est commerçant aussi. Mais pour l’instant on fait plutôt le pari pour une petite entreprise comme nous de miser sur des choses qui sont facilement identifiables comme étant qualitatives.
Quant à notre boucher Del Maître, pour faire face dans ce nouveau marché, le producteur genevois va-t-il mettre de l’eau dans son vin ou plutôt dans son jambon ?
Joseph Aeby, directeur Del Maître ne prévoit aucun changement de recette dans le haut de gamme : « Notre jambon supérieur, c’est en fait le cœur de l’activité de Del Maître. Donc on va pas y toucher. Mais il est assez probable aussi que dans les catégories inférieures, nous devions en fait nous aligner sur les critères européens et ajouter un petit peu plus d’eau. Ceci pour rester compétitif. On pourrait même concevoir de produire chez nous pour exporter sur le marché européen. »
Du jambon autrichien, du jambon suisse fait selon les règles suisses, du jambon suisse fait selon les règles autrichiennes… Désormais, différencier ces produits dans les rayons sera un vrai casse-tête pour le consommateur comme pour les autorités de contrôle.
Pour Patrick Edder, chimiste cantonal à Genève, le Cassis de Dijon, c’est un véritable changement de pratique: « chaque législation nationale peut rentrer dans notre pays. Donc, on lâche notre droit suisse pour un bout de législation danoise, un bout de législation grecque, un bout de législation française.. »
Résultat des contrôles qualité qui deviendront trop complexes et risquent à terme de disparaître, idée partagée par Patrick Edder : « Auparavant, la législation, elle protégeait certaines appellations. Un jambon, c’était clairement défini, il y avait tant d’eau dans un jambon. Il pouvait pas y en avoir plus. Un sirop, il y a tant de jus de fruit, etc… Donc les appellations étaient protégées. Aujourd’hui, en vertu du cassis de Dijon, ces protections vont exploser et ce sera au consommateur à faire les choix. »
Mais pour faire le bon choix, les consommateurs devront compter sur un bon étiquetage. Par exemple : l’entreprise Morand a lancé 4 nouveaux sirops à base de concentré de fruits, donc 10% de fruits seulement. Grâce au principe du cassis de Dijon, l’image du fruit peut figurer sur l’étiquette, mais il y a aussi un papillon sur la bouteille, c’est le symbole de la présence d’arôme et pas de logo « jus de fruit ». Une différence subtile qui demandera une grande vigilance au consommateur.
Le Cassis de Dijon vu par Berne : entretien avec Jean-Daniel Gerber, Secrétaire d’Etat, SECO
Raisin de table suisse et pesticide
Comme nous l’avions annoncé dans notre émission du mardi 5.10.10, nous avons prélevé courant octobre les raisins de table s’annonçant comme « produits en Suisse ».
Premier constat, il y a peu de raisins de table du pays disponible dans les supermarchés. 2 constat : la saison 2010, en Suisse comme en Europe a été particulièrement pluvieuse, avec des chauds-froids, ce qui a poussé les viticulteurs à traiter régulièrement les vignobles avec différents pesticides pour les protéger essentiellement des moisissures.
Nous avons fait tester quatre échantillons de raisins de table suisse par le laboratoire cantonal de Genève.
Raisin rouge / bio de Manor (Sion) – Pas de pesticides
Raisin blanc du pays, un chasselas vendu par Aligro (Genève) – résidus de trois pesticides
Raisin blanc, un chasselas vendu à l’Hyper Casino (Sion) – résidus de quatre pesticides
Raisin blanc, un chasselas vendu à l’Hyper Casino (Romanel) – résidus de cinq pesticides
On atteint pas les résidus de sept pesticides trouvés sur du raisin d’origine étrangère, mais cela reste beaucoup trop. Les pesticides pénètrent la chair du fruit et ne peuvent donc être éliminés par lavage de la grappe à l’eau. Si cet échantillon de raisin est conforme aux normes suisses, il pose toutefois le problème de l’accumulation des pesticides.
Premier constat : en Suisse la pratique des multiples traitements aux pesticides est comparable aux pratiques des producteurs européens, italiens, français ou espagnols.
Second constat : un raisin de table peut-être parfaitement vierge de pesticides. C’est le cas du bio, ce qui est une bonne nouvelle pour les consommateurs.
La semaine prochaine
Le jura se prépare à fêter la St-Martin, l’occasion de s’offrir des repas pantagruéliques où le cochon a une place d’honneur. Une entorse à la tradition pousse certains à glisser de la saucisse à rôtir parmi la succession de plats. ABE est revenu à la source et vous fera suivre le parcours de la saucisse à rôtir, de l’élevage du cochon à son arrivée sur les tables.