Les labels ont envahi nos étals. Pas un produit sans son petit logo aux nombreuses promesses. Ils devraient permettre de mieux comprendre ce que l’on achète. Mais ils se révèlent aussi de puissants outils de marketing.
Les labels portent-ils un message clair?
Avec la multiplication des labels, il est souvent difficile pour le consommateur de s'y retrouver. Il est déjà difficile des les reconnaître, et encore plus de dire ce qu'ils garantissent. Il y a des labels écologiques, environnementaux, sociaux, locaux, régionaux ou encore de caractéristiques qualitatives. Et un même produit peut en afficher 2, 3 voire parfois 4.
Le nombre des labels ne cesse de croître, comme a pu l'observer le professeur François Courvoisier: "En 2005, on avait identifié à peu près 120 labels différents selon le Bureau fédéral de la consommation. Hier soir, je suis allé sur leur site et la liste est passée de 120 à 180, ce qui veut dire plus 50% en six ans environ. Donc profusion, jungle des labels: le terme est plus juste que jamais."
Les labels ont une dimension marketing, selon le prof. Courvoisier: "Un label apporte un supplément de crédibilité à un produit qui sans ça serait banal. Les labels viennent renforcer les marques qui sont moins connues ou qui veulent développer un axe de communication particulier comme le développement durable, l’écologie ou le commerce équitable."
En choisissant un produit labellisé, le consommateur cherche aussi à se rassurer. Les scandales alimentaires comme la vache folle l’ont rendu méfiant. Aujourd’hui, avec un label, on pense faire un bon achat avec des garanties de qualité et de traçabilité. Un constat partagé par le professeur Courvoisier: "Un label rassure et c’est sans doute la promesse principale."
Labels et autres dénominations similaires en Suisse Bureau fédéral de la consommation.
Décryptage de quelques labels, parmi tant d’autres
Label: RAINFOREST ALLIANCE.
(grenouille)
"Label écologique et social qui garantit aux consommateurs que les produits sont le résultat de pratiques en accord avec les principes d’une production durable. Ainsi, les ressources naturelles sont gérées dans une optique à long terme en préservant l’environnement, les animaux et les plantes ; les travailleurs sont traités correctement, leurs droits sont respectés et l’accès aux soins médicaux et à l’éducation leur est garanti ainsi qu’à leur famille." (Source: Bureau Fédéral de la Consommation)
L'intention est bonne, mais les informations restent vagues et il est difficile pour le consommateur de connaître réellement la portée de ce label. Il n'est pas fait mention d'un cahier des charges stricte, ni de contrôles pour le faire respecter.
Deux labels: Fair-trade Max Havelaar et FSC
Fair-trade Max Havelaar
"Label social et écologique. Max Havelaar labellise des produits issus du commerce équitable provenant de l’hémisphère Sud. Le label garantit un commerce équitable avec des coopératives de production et des plantations. Il assure aux producteurs des prix garantis. En outre, une prime de commerce équitable est payée pour la réalisation de projets communautaires dans une perspective de développement durable. Pour cela, les exploitations doivent offrir des produits en respectant des directives sociales strictes et porter le moins possible atteinte à l’environnement. " (Source: Bureau fédéral de la consommation)
FSC Ce label ne s’applique pas à la plaque de chocolat, mais à son emballage, dont le papier est issu d’une forêt labellisée FSC, le Forest Stewardship Council.
"Label social et écologique qui, je cite, « garantit que les produits ne sont pas la conséquence d’une exploitation abusive mais, qu’au contraire, ils proviennent d’une économie forestière respectueuse sur les plans environnementaux et sociaux. Le bois est exploité de manière professionnelle dans les forêts FSC, la diversité de la faune et de la flore est préservée et les droits des populations et des travailleurs sont respectés." (Source: Bureau fédéral de la consommation)
Label Suisse Garantie (label d'origine)
"Le produit doit provenir de Suisse (y compris la principauté du Liechtenstein et les zones frontalières reconnues) avec une petite exception en cas de pénurie el matière première, et qu’il doit être transformé dans le pays. Toutes les matières premières doivent être fabriquées par des producteurs ayant fourni les prestations écologiques requises conformément à l’ordonnance du Conseil fédéral (..). Qu’il s’agisse de production végétale ou animale, aucun organisme génétiquement modifié (OGM) n’est utilisé." (Source: Bureau fédéral de la consommation)
Label Naturaplan, la marque bio de COOP
Les biscuits portent le Label bio bourgeon de BioSuisse, mais
attention,
avec une mention "Umstellung" ou "reconversion" en allemand au-dessous. Cela signifie que ce produit contient plus de 10% de matières premières importées et provenant d’exploitations reconverties à la production bio, Ce qui signifie qu'elles pratiquent l’agriculture biologique sur l’ensemble de l’exploitation, mais depuis moins de deux ans. Or, il faut plus de deux ans de culture bio pour être considéré comme vraiment bio par BioSuisse. Le temps que les sols se nettoient, sans doute.
Le mot "Umstellung" aurait pu être traduit en français ou en italien sur le paquet pour plus de transparence.
Label: Demeter
Demeter est un label écologique. Il se trouve uniquement sur des produits issus de l’agriculture biodynamique, une technique de culture qui suit les préceptes du "Cours aux agriculteurs" dispensé en 1924 par Rudolf Steiner, le fondateur du courant de pensée anthroposophique. L'agriculteur Demeter doit se conformer, "aux rythmes de la nature et du cosmos et utilise des préparations biodynamiques pour travailler la terre et donner ainsi des forces aux plantes pour croître et arriver à maturité."
Avec ces cinq exemples, on passe en revue des cahiers des charges et des réalités fort diverses. Il n'est pas étonnant, dès lors, que certains consommateurs ne s'y retrouvent pas.
Les labels du vin
Dans le domaine du vin, les médailles et labels se disputent le terrain. Les premières sont attribuées lors de concours dont les résultats sont plus ou moins subjectifs. Les seconds sont obtenus par le respect d'un cahier des charges strictes.
Selon le journaliste Thomas Bravo-Mazza: "Quand on est dans un linéaire de magasin, qu’il faut choisir une bouteille c’est très difficile, il y a beaucoup de mentions, des mentions obligatoires, des mentions facultatives. Il ne faut pas passer trop de temps dans un linéaire, parce que plus on passe du temps, plus on a l’air de ne pas connaître le vin ; donc on se raccroche à quoi ? Finalement, on se raccroche à une médaille. Les médailles sont des bouées de sauvetage pour le béotien, et elles sont nombreuses."
Dans le monde, on compte plus de 300 concours de vins. Pour participer, c’est simple, mais payant. Frais d’inscription, frais par bouteille présentée, déplacements: La facture peut vite prendre l'ascenseur. Plusieurs centaines, voire milliers de francs par vin. Alors, pour récompenser les participants, la liste des heureux gagnants est longue. Une situation qui amuse Thomas Bravo-Mazza, pour qui ces concours ne représentent plus rien: "Quelle crédibilité pour des concours qui médaillent entre 30 et 40% des vins? Pour moi, ce sont des médailles en chocolat. Ça me fait penser à cette émission, l’Ecole des Fans de Jacques Martin, où tous les enfants avaient 10/10, c’est un peu ça."
Si les médailles sont peu fiables, les vins ne sont pas forcément mauvais, comme le rappelle Thomas Bravo-Mazza: "Ça ne veut pas dire que les vins médaillés soient mauvais, ça c’est sûr, mais ça veut surtout dire que les vins qui sont primés sont d’abord des vins consensuels. Ils collent à un marché. Il faut aussi se dire que les meilleurs domaines ne participent jamais à ces concours."
Les grands châteaux sont au-dessus de ce commerce. Mais pour les autres, l’obtention d’une médaille peut se révéler très utile, lorsque le vin sera proposé à la vente. Un vin primé va pouvoir se négocier avec la centrale d’achat parfois jusqu’à 20% plus cher. Passons à un décryptage de quelques médailles!
La médaille doit avant tout attirer le client. Elle ne porte pas de message qui permettra de savoir pourquoi elle a été ainsi décorée: "Une étiquette classique avec une petite médaille dorée « primé provin.ch ». On ne sait pas de quel concours il s’agit. Ce qui est important pour eux c’est uniquement d’attirer le client avec quelque chose de doré pour qu’il ait l’impression que ce vin a quelque chose que les autres n’ont pas, mais derrière, pas d’information !"
Les exemples cocasses ne manquent pas, comme la médaille "Double gold. C’est du Coluche ! C'est plus or que or en fait." Thomas Bravo-Mazza relève que le marketing prend le dessus avec les concours. Ainsi sur une bouteille on peut lire "nombreuses médailles d’or, d’argent et de vermeil et diplômes d’honneur ». Là, on a la mention d’aucun millésime, « c’est vraiment n’importe quoi. C’est du marketing pur ! Aucune crédibilité !"
S’il faut se méfier des médailles, que penser des labels? Souvent, on les confond, pourtant leur mode de fonctionnement est différent. Un label n’est pas un concours. Il implique un cahier des charges précis, des règles exigeantes, de la vigne à la mise en bouteille. L’objectif d’un label est de différencier les vins selon des critères qualitatifs.
A Bursins, au Château le Rosey, le vigneron Yvan Parmelin explique pourquoi il travaille avec un label de vins vaudois: "On travaille principalement avec le label Terravin qu’on considère comme un outil de travail, puisqu’on en bénéficie presque toute l’année. Ça veut dire qu’on peut faire une mise en bouteille au printemps et soumettre ce vin de printemps au label Terravin. Ainsi, on peut savoir un peu où on en est. C’est un peu notre phare pour le marin, ça nous permet de nous repérer, de garder nos repères.
Un outil de travail, mais comme les médailles, le label peut-être considéré aussi comme un outil marketing. Yvan Parmelin ne s'en cache pas, mais selon lui, ça ne fait pas tout: "Il faut plusieurs choses pour vendre son vin, il faut d’abord un bon contact avec l’acheteur. Après le label va être là un peu pour appuyer ce contact, pour aider. On a aussi des acheteurs qui vont acheter uniquement sur le label, mais ce ne sont pas les acheteurs les plus fidèles, on ne peut pas se fier qu’a ça ! Il faut une qualité, un contact. Je pense que la richesse, du vin c’est le contact qui s’établit avec le consommateur."
Médailles ou labels ne devraient donc pas aveugler l’amateur de bon vin. Mais alors comment choisir un vin ? Pour Thomas Bravo-Mazza, les labels et les médailles ne sont pas des éléments prépondérants dans le choix d'un vin: "Un label ou un concours, c’est une garantie à minima pour le consommateur. C’est bien ce qu’il faut se dire. Le vin existe depuis 7000 ans, c’est un produit alimentaire pas comme les autres. Il a un contenu culturel très fort et je crois que c’est un produit qui mérite qu’on fasse des efforts, qu’on lise des articles qu’on achète des guides, qu’on ouvre des livres. On ne peut pas acheter en deux minutes une bouteille de vin. C’est ça le vrai problème du vin, il faut faire des efforts."
Trop de bio, tue le bio
Parmi les labels les plus connus de l'alimentaire, on retrouve le bio. Il garantit des produits sans pesticides et il est respectueux des animaux et de l'environnement. Mais dans les rayons, cela se complique. Il n'y a pas un label bio, mais toute une myriade. Quelles sont leurs différences?
La multiplication des labels bio n'est pas une bonne chose pour le consommateur, selon le Professeur Courvoisier: "Est-ce que tous les labels bio qu’on a en Suisse sont nécessaires ? J’en ai recensé récemment onze. Dans une perspective de consommateur, de Monsieur et Madame tout le monde qui fait ses courses, à mon avis, c’est trop !"
Ils sont nombreux les labels bio. NaturaPlan, Bio Nature plus, Migros bio, Bourgeon, Demeter, et la liste est effectivement de plus en plus longue. Que penser de ces labels? Y-a-t-il différentes qualités de bio?
François-Philippe Devenoge, vice- président Bio Suisse est catégorique. Selon lui, "il n’y a qu’un seul label bio en Suisse ! Il a été crée par des producteurs. Ça n’est pas possible d’acheter une marchandise garantie bio en Suisse qui ne soit pas Bourgeon."
Le Bourgeon, c’est le label de Bio Suisse, la Fédération des producteurs biologiques suisse. Depuis trente ans, ce cahier des charges sert de référence à tous les autres labels biologiques du pays. Olivier Cordey est producteur pour Bio Fruits en Valais. Il nous explique pourquoi il a choisi ce label: "On produit toujours sous les directives du label Bio Suisse qui est le label le plus strict. Ca nous permet d’étiqueter et de répondre aux normes de tous les autres labels."
Ce jour-là, Bio Fruits conditionnait pour la vente des poires. Les mêmes fruits, mais pas les mêmes étiquettes! Pour le producteur, ce jeu de label ne change rien aux prix obtenus, comme l'explique Olivier Cordey: "Ce sont les mêmes poires, elles viennent du même verger, du même producteur et à la fin elles se retrouvent dans deux chaînes de distribution différentes avec deux labels différents et deux prix différents ! Pour nous, le prix est toujours identique au prix de départ. Le même prix avec un label ou avec un autre."
Pas de différence pour le producteur, donc, mais pour le distributeur oui! Et quelles différences ! Selon les jours, le prix pour les mêmes poires peut varier jusqu’à 50% d’un étalage à l’autre! Dans une telle situation, avoir son propre label bio est évidemment très intéressant pour les distributeurs. "Ça permet à un distributeur comme Coop ou Migros de varier leur assortiment, de toucher d’autres consommateurs qui sans cela feraient peut-être leurs courses ailleurs, chez des petits commerçants ou au marché du coin. L’intérêt est aussi perceptible au niveau des marges. Les produits bio peuvent se vendre 27% plus cher que les produits non bio" selon le prof. François Courvoisier.
Comme toutes les grandes enseignes, Migros propose une gamme bio. La proportion du bio reste minime selon Guy Vibourel, directeur général de Migros-Genève: "Tout n’est pas demandé en bio, mais il y a maintenant dans nos assortiments environ 60'000 produits, dont 1000 produits bio. Ceci dit, d’une année sur l’autre, alors que notre chiffre d’affaire augmente très légèrement de 1 %, le bio a augmenté de 14%!"
Chez Migros, le bio provenant de suisse est conforme aux exigences du Bourgeon. Par contre ce label n’apparaît pas sur les emballages. Migros vend sous son propre label bio. Une pratique que ne suit pas son concurrent Coop. Un comportement qui inquiète François-Philippe Devenoge: "Le plus grand distributeur c’est Coop. Ils distribuent tout avec le Bourgeon y compris ce qui est importé. Ce sont encore des règles en plus, ce qui n’arrange pas le prix des produits importés. Ce n’est pas facile face à une concurrence qui n’a pas le même respect de la qualité du produit."
Travailler avec le label Bourgeon pour les produits d’importation implique des contraintes pour le distributeur. En effet, la plupart des labels bio européens sont considérés comme moins stricts que le label de Bio Suisse. Donc, un produit bio français ou espagnol par exemple, ne sera pas forcément reconnu bio par le Bourgeon.
Les différences entre un bio suisse et européen existent, mais les règles appliquées à l'étranger sont tout à fait valables, selon Guy Vibourel: "A l’étranger, il y a des normes qui sont peut-être un peu plus lâches mais qui sont reconnues comme tout à fait valables pour les consommateurs de bio dans ces différents pays. On pense qu’ils sont bio pour les Suisses aussi."
Acheter bio à l’étranger sans se limiter aux produits labellisés Bourgeon, c’est donc plus simple mais également plus économique. François-Philippe Devenoge est plus réservé que Guy Vibourel. Le bio Suisse offre selon lui plus de garanties: "C’est clairement moins cher, si on importe un produit qui est labellisé bio en Turquie, en Bulgarie ou en Hongrie d’après les normes européennes ou locales. Le cahier des charges certes existe, mais il n’y a pas autant de pages et de garanties et de contrôles qu’on s’impose en Suisse."
Au pays de la précision et de la qualité, on est donc fier de proposer du bio plus bio que bio.
Le commerce équitable: Max Havelaar
Le commerce équitable a aussi ses labels, comme Max Havelaar. Une téléspectatrice nous avait interpellés en juin dernier: elle s’était aperçu que quelque chose avait changé sur l’étiquetage de certains produits arborant ce label.
Pour soutenir les producteurs du sud, de plus en plus de consommateurs du Nord s’engagent en achetant plus cher du cacao, des bananes ou du café. ABE a rencontré Françoise Mauron, consommatrice convaincue par le commerce équitable: "Pour nous ce sont des produits de luxe, ce ne sont pas des produits qui sont directement nécessaires à une alimentation saine. Je me disais que si je prenais des produits qui sont un peu un plaisir, alors autant faire aussi plaisir ailleurs. Pour moi, c’était vraiment une éthique, ça correspondait à un certain état d’esprit que j’ai de la vie, de ce qu’on peut faire ici pour les autres et je faisais une confiance quasi aveugle, oui."
En juillet dernier, Madame Mauron apprend que Max Havelaar change ses exigences pour les produits composés. Désormais, il ne faut plus 50% mais 20% de matières premières équitables pour obtenir le label. Une surprise qui n'est pas du goût de Françoise Mauron: "J’étais très étonnée, parce que je ne comprenais pas pourquoi il n’y avait pas le 100% des matières équitable. Déjà, apprendre qu'il n'y en avait seulement 50%… Puis que l’on passe encore à 20%, pour moi ça a été un peu une gifle."
Difficile de comprendre tous ces chiffres. Didier Dériaz, relations publiques Suisse Romande Max Havelaar, nous explique les grands principes, en insistant sur la distinction entre produits de base et produits composés: "Pour les produits de base comme le riz, le coton, le miel, le café, ils sont à 100% fair-trade. Ces produits représentent en Suisse plus de 90% des ventes de produits avec le label. Maintenant, pour les produits composés, la première règle est que tout ce qui peut être fair-trade, c’est-à-dire ce qui est disponible sur le marché, doit être fair-trade. La deuxième règle est, pour qu’un produit composé soit certifié, qu’il contienne au minimum 20% d’ingrédients fair-trade."
20 % d’ingrédients fair-trade minimum, à quoi s’ajoute une autre règle : on peut désormais exclure la partie liquide du produit. Prenons l’exemple d’un yaourt moka : on enlève le lait provenant de Suisse. Il reste le sucre d’Amérique latine et le café mexicain. Tous deux sont issus du commerce équitable. Malgré leur faible quantité, le yaourt obtient son label équitable.
Cette nouvelle façon de calculer serait-elle une conséquence du succès grandissant du commerce équitable? L’ancienne directrice de la fondation Max Havelaar, Paola Ghillani, nous livre son analyse: "Je suppose qu’ils ont été mis sous pression par les multinationales et éventuellement par les grands distributeurs dans le monde pour diminuer ce niveau afin d’avoir plus de volume. Mais, si l’impact auprès des organisations productrices est toujours positif, c’est-à-dire qu’ils reçoivent un prix équitable pour la matière première qu’ils produisent, finalement c’est bien."
Pour Max Havelaar, travailler avec les multinationales et la grande distribution n’est pas nouveau et cela ne contredit pas l’éthique du commerce équitable. Didier Dériaz considère que la grande distribution est avant tout un soutien: "En réalité, si la grande distribution n’avait pas adhéré dès le démarrage au commerce équitable, nous n’aurions pas les résultats que nous avons obtenus au cours de ces vingt années. Songeons aux ventes de l’année dernière en Suisse, pour plus de 300 millions de CHF. Pour les producteurs du Sud, c’est chaque année un progrès et la possibilité d’en certifier de nouveaux. Nous travaillons à augmenter les parts de marché dans le commerce de détails et nous voudrions bien décider des grands fabricants, pourquoi pas demain un chocolat Lindt avec le logo Max Havelaar !"
L’avenir du commerce équitable semble donc s’envisager de plus en plus avec des partenaires de l’industrie alimentaire conventionnelle. Paola Ghillani est optimiste: "Si de plus en plus d’entreprises utilisent soit des labels soit développent elles-mêmes des critères de commerce équitable, c’est positif, ça veut dire que les choses vont dans le bon sens. Par contre, ce qu’il faut garantir, c’est que les contrôles soient indépendants et que la certification, c’est-à-dire le rapport d’inspection soit fait professionnellement et de manière indépendante que ce soit pour les labels ou pour les entreprises multinationales."
A l’avenir, le consommateur sensible à l’éthique Max Havelaar devra donc s’habituer à chercher sur les étiquettes, le pourcentage des matières premières issues du commerce équitable, des indications perdues au milieu des valeurs nutritives, composition et autres labels. Encore faut-il que ce pourcentage soit indiqué.
Un label, ça se paie: entretien avec Aline Clerc, spécialiste Agriculture et Alimentation à la Fédération Romande des Consommateurs (FRC)
L'e-cigarette, la clope miracle?
Elles ont la forme des cigarettes, dégagent de la fumée, mais sont des leurres. Ne protestez pas si vous voyer quelqu'un en "griller" une: la e-cigarette n’est pas interdite! Les cigarettes électroniques vendues en Suisse sont uniquement celles dépourvues de nicotine. Mais que contiennent-elles?
L'époque où à l’écran, comme dans la vie, les volutes de fumée avaient du style, de la poésie, voire même de la classe est révolue. Aujourd’hui, les aériennes volutes de nos stars ont presque totalement disparu de l'écran. Mais une petite révolution a conquis Virginie Biffl: Johnny Depp tirant sur une e-cigarette dans un train, dans le film
« The Tourist »
de
Florian Henckel Von Donnersmarck .
Pour rejouer cette scène et avant tout essayer d'arrêter la clope, Virginie Biffl se rend en pharmacie. Un premier kit lui est proposé, au prix d'environ 90 CHF. Il comprend une cigarette électronique rechargeable. Plusieurs arômes sont proposés: fraise, vanille, menthe, café. En Suisse, pas de nicotine dans les cartouches en magasin, mais on peut commander des recharges nicotinées sur Internet.
Virginie Biffl a de grands espoirs dans l'e-cigarette: "J’ai pensé que c’était le meilleur allié pour arrêter de fumer, bien sûr combiné à des patchs. Et ça a été un vrai soutien. C'était une bonne surprise, l'effet très réaliste, discret, esthétique et tout ça sans avoir les inconvénients de la vraie cigarette. Maintenant, ça ne m'a pas empêché de recommencer dans une forte période de stress."
Selon Vincent Perret, spécialiste en toxicologie industrielle, rien ne prouve l'efficacité de l'e-cigarette pour l'aide au sevrage : "Passer de la cigarette à l’e-cigarette, dans un but d'aide au sevrage, la question se pose. Il faut se rappeler que ces produits sont nouveaux sur le marché. Les premiers sont arrivés en 2003, 2004. Et il n'y a pas d’étude clinique montrant l'efficacité de ce matériel là pour une aide au sevrage tabagique."
Virginie Biffl admet ne pas s'être intéressée aux composants de cette cigarette: "Je n'ai aucune idée de ce qu’il y a dedans." Sur l'emballage, elle découvre les composants suivant: 89.63% de Propylène Glycol, 1.67% de menthe, 8.71% de glycérol, 0.75% d'eau et divers arômes. Elle avoue ne pas savoir ce qu'est le Propylène Glycol.
Selon Vincent Perret, les études manquent sur le Propylène Glycol pour en évaluer le risque à long terme: "L'effet de fumée est produit par du Propylène Glycol. C'est un produit courant que l'on retrouve dans l'industrie agroalimentaire, dans les cosmétiques… Il fait aussi office de solvant dans les peintures sans solvants, un concept assez amusant. Mais ce que l'on connaît mal, ce sont les impacts à long terme lorsque l'on inhale ce produit. De très bonnes études existent quand on le mange ou qu'on le met sur la peau, mais dans le cas d'inhalations régulières, on a moins de données."
Pour aller un peu plus loin dans leur composition, nous avons fait analyser deux e-cigarettes, l’une, celle-ci achetée en pharmacie, l’autre achetée sur Internet avec des cartouches à la nicotine. Et un risque existe selon Vincent Perret : « On peut se retrouver avec différentes impuretés dans ces différentes cigarettes. On a fait des analyses sur différentes cigarettes disponibles sur le marché suisse et on a trouvé des traces de solvants chlorés, du toluène, du naphtalène. Ce sont des produits à l'état de traces, mais tout de même présents. Ils montrent bien que l'on a un gros problème au niveau de la traçabilité et du contrôle qualité de ces produits qui sont destinés à un usage plutôt thérapeutique ou dans tous les cas à être inhalés. On doit avoir ici un processus qualité béton pour pouvoir garantir aux consommateurs que ce qu'ils respirent est uniquement ce qui est annoncé sur la composition."
Alors, finalement, cette cigarette modern-style, que faut-il en penser? Vincent Perret reste partagé: "Tout dépend à quoi l'on compare. Si c'est passer de la cigarette traditionnelle à cela, on va dire que c'est un mieux, potentiellement. Maintenant, si c'est passer de rien du tout à ce type de produit, là on a quand même le droit à une exposition à différents produits. Passer de rien, à ça et cibler les enfants ou les jeunes personnes avec des arômes intéressants, comme le chocolat, la fraise avec des produits qui peuvent contenir de la nicotine, c'est le risque de créer une population avec une addiction à ce type de produits."
L'e-cigarette, la clope miracle? Entretien avec Jean-François Etter, responsable du site stop-tabac.ch, maître d’enseignement et de recherche à la Faculté de Médecine de l’Université de Genève (disponible en vidéo uniquement)