Les édulcorants artificiels n'ont pas bonne presse. Aspartame, acésulfame, saccharine et cyclamate, des produits censés adoucir notre quotidien à moindre calories ne constituent de loin pas la panacée pour remplacer le sucre. Attention, danger.
Les risques des édulcorants
Les étalages de nos supermarchés regorgent de produits contenant des édulcorants de synthèse censés ne pas nous faire grossir. Mais le permettent-ils vraiment ? Et leur utilisation est-elle vraiment sans danger ? De plus en plus d’études mettent en garde contre l’usage excessif de ces ombres du sucre que l’on retrouve même là où on ne les attendait pas. Comme l’a constaté récemment une de nos téléspectatrices
Deux lampées de glycérine, une cuillère à café de miel et une tombée de citron. Il y a quelques semaines, Gisèle Juillet a dû jouer à la pharmacienne pour combattre un vilain mal de gorge. Elle n’a pas réussi à trouver en pharmacie un seul médicament sans édulcorant artificiel pour se soigner. C’est qu’allergique à l’aspartame, Gisèle Juillet a banni tous les faux sucres de sa vie.
«Quand j’ai demandé à la pharmacienne des médicaments pour le mal de gorge et pour le rhume sans édulcorant, elle a mis trois quarts d’heure pour trouver un médicament qui finalement n’existait pas. »
Cela fait 15 ans que Gisèle Juillet s’est découvert une allergie à l’aspartame. A l’époque, la consommation excessive de cet édulcorant artificiel avait failli lui coûter la vie.
«J’ai fait un choc anaphylactique dû aux faux sucres. Je me suis sentie très mal, j’arrivais plus à respirer ,j’avais plus d’air qui rentrait. Je suis allée chez le médecin, il a tout de suite vu que c’était un choc, il m’a donné un tas de médicaments pour enlever ce choc anaphylactique parce que j’étais en train de mourir. Le lendemain quand je suis retourné, on a fait un bilan de tout ce que j’avais mangé et puis il s’est basé là-dessus et d’après le médecin, c’était à cause des faux sucres. »
Depuis lors, la vie de cette habitante de Courtemaîche n’est pas facile quand elle est malade. Dans le monde pharmaceutique, rares en effet sont les médicaments traditionnels qui ne sont pas enrobés d’un ou l’autre édulcorant de synthèse.
Nous faisons ce constat avec Gisèle en pharmacie. Magali Prudon, pharmacienne adjointe reconnaît que les édulcorants se retrouvent dans la majorité des médicaments : « Pour les formes orales, c’est vrai qu’il y a peu de médicaments sans édulcorants. C’est surtout pour que les patients prennent leur traitement à cause du goût désagréable des principes actifs et à cause des caries aussi et aussi pour les personnes diabétiques pour que eux puissent le prendre sans autre ».
Dents et diabète ne sont pas les seules raisons. Les industriels du médicament recourent aujourd’hui largement aux édulcorants de synthèses pour des questions de goût et de confort des patients.
Eric Alléman, prof. EPGL, UniGe rappelle que ces sucres ont été ajoutés dans les médicaments pour le confort des patients. Ses réserves visent avant tout l’alimentation, qui représente un apport en édulcorant plus important tant dans les quantités que sur la durée : «Pendant de nombreuses années, en particulier pendant une bonne partie du XXème siècle, on a eu un bon nombre de médicaments qui n’avaient pas d’édulcorant. Mais à ce moment-là, on était prêt un peu à souffrir ou ça faisait partie du traitement d’avoir un peu de désagrément pendant la prise du traitement… Aujourd’hui, dans les médicaments, ce sont finalement de toutes petites quantités qui sont en jeu par rapport aux boissons gazeuses qui sont consommées en quantités immenses en particulier par les jeunes et là, sur un usage de toute une vie, on peut se poser des questions.»
Les sucres : une longue liste
Les édulcorants de synthèse sont au centre de la polémique. Particulièrement l’aspartame dont de récentes études semblent remettre en cause l’innocuité. Mais comment les reconnaître dans les produits qui nous sont vendus chaque jour dans les magasins ? Leur présence doit être signalée, mais entre édulcorants de synthèse, sucres de masse et sucres naturels, on y perd son latin. Les étiquettes des produits sont loin d’être claires.
Petit rappel didactique :
La première catégorie, c’est celle des sucres dits naturels.
Le plus connu d’entre eux est généralement fourni sous une forme raffinée. Il adoucit nos petits déjeuners. Issu de la betterave sucrière ou de la canne à sucre, c’est le saccharose.
Mais il y a aussi le lactose, issu du lait. C’est le seul sucre naturel qui n’a pas de saveur sucrée. Il y a ensuite le maltose, tiré des céréales et plus particulièrement de l’orge.
Vient le fameux fructose que l’on trouve généralement à l’état naturel dans les fruits et enfin, le dextrose ou glucose, que l’on trouve notamment dans le raisin.
La plupart de ces sucres naturels sont des sucres dits rapides. C’est-à-dire qu’ils délivrent leur énergie directement dans l’organisme une fois ingérés.
Ces sucres se retrouvent en trop grande quantité dans notre alimentation, comme le rappelle Robert Rémy, resp. politique consommation et alimentation Euroconsumers, avec des conséquences sur les consommateurs : «Leurs grandes caractéristiques, ils sont aussi connus pour ça, c’est leur apport calorique, un gramme de sucre contient 4 calories. Et c’est énorme et cela prend de plus en plus d’importance dans le phénomène de l’obésité qui explose de nos jours dans notre société. Et également l’effet cariogène, le saccharose est responsable de caries dentaires.»
Ces sucres dits naturels ne sont pas blanc comme neige aux yeux des spécialistes. Le fructose par exemple ; sous sa douceur angélique se cachent des propriétés démoniaques, un constat que fait le prof Alain Golay, médecin-chef du Service d’enseignement thérapeutique pour maladies chroniques : «Alors le fructose, c’est le sucre idéal quand il est dans un fruit. Il a un intérêt, c’est qu’il fait monter le sucre dans le sang de manière très lente. C’est un sucre lent, étonnamment. Donc, les fruits oui. Mais le fructose en grande quantité notamment dans les boissons sucrées, c’est très mauvais. Si on augmente la quantité de fructose dans l’alimentation d’un animal, on lui développe un diabète ».
Une situation qui indigne Robert Rémy : «L’origine de ce fructose est essentiellement industrielle et provient essentiellement du sirop de maïs produit en abondance aux USA et qui doit trouver un débouché. Donc le côté un peu idyllique associé au fructose manifestement est une tromperie du consommateur sur la nature et la propriété réelle de ce sucre. »
Deuxième catégorie de sucres, les polyols ou sucres de masse.
Principalement d’origine végétale, ce sont des sucres très utilisés dans la confiserie, la confection de biscuits, de barres de céréales et de glaces. Ils ont pour nom maltitol, sorbitol, xylitol, isomalt ou encore mannitol. Contrairement au saccharose, ils ne provoquent pas de caries dentaires. Ce sont eux que l’on retrouve notamment dans les chewing-gum et bonbons estampillés « sympadents ».
Cette catégorie de sucre a des propriétés intéressantes pour l’industrie, selon Robert Rémy : « Ces sucres ont un rôle technologique. Dans le chewing-gum, on va utiliser le sorbitol pour son côté rafraîchissant. Mais ils pourront aussi être utilisés dans les bonbons et pâtisseries pour leur côté humectant et liant. Ils vont donc jouer des rôles technologiques. Alors, ils ont un apport calorique, c’est plus ou moins la moitié du saccharose, revers de la médaille lorsqu’ils sont consommés en quantité trop importante, ils peuvent provoquer des flatulences et des diarrhées aux gens sensibles à ce genre de réaction. »
Troisième catégorie, les fameux faux sucres, soit les édulcorants artificiels.
Ce sont des substances dont les molécules ont été construites en laboratoire et même parfois trouvées totalement par hasard. C’est le cas de l’aspartame. Il a été découvert en 1965 dans un laboratoire américain lors d’une recherche sur les ulcères. Il est devenu l’édulcorant artificiel le plus utilisé au monde.
Les autres sucres artificiels sont le cyclamate, l’acésulfame K et la saccharine, le plus ancien faux sucre découvert à la fin du XIXème siècle.
Aujourd’hui, en raison de leur apport calorique quasiment nul, ces édulcorants artificiels sont largement utilisés par l’industrie alimentaire.
Comme le rappelle Robert Rémy, ces sucres «ont un pouvoir sucrant beaucoup plus élevé – 200 à 400 x – que le sucre de betterave ou de canne. »
C’est ce pouvoir sucrant sans apport calorique qui a fait exploser la consommation d’édulcorants artificiels. Mais cela n’empêche pas les pays industrialisés d’être confrontés à une véritable épidémie d’obésité et de diabète de type 2. Et cela ne risque pas de s’arrêter. L’Organisation Mondiale de la Santé estime qu’il y aura 2,3 milliards d’adultes en surpoids en 2015. Ils sont déjà 1,6 milliards aujourd’hui.
Le prof Alain Golay nous fait une petite démonstration simple, mais éloquente : « Ici, j’ai 36 morceaux de sucre, c’est la quantité de sucre que l’on trouve dans un litre de coca, ou de boisson. On banalise totalement la quantité de sucre qu’il y a dans un litre de coca, par exemple. Avec quelques petites pastilles de ce type-là [l’édulcorant], on croit qu’on prend 0 calorie, c’est vrai en théorie. Parce que le cerveau continue à aller chercher du sucre. Donc je prends ça et j’ai quand même besoin de ça. Mon cerveau me dit là tu m’as trompé. L’édulcorant dans un premier temps va diminuer votre consommation de sucre, mais en fait, il en appelle d’autres et en fait la fait augmenter. »
Les édulcorants artificiels ont aussi la propriété de ne pas être cariogène. Raison pour laquelle on en retrouve même dans les dentifrices. Seul un examen attentif des étiquettes permet de s’en rendre compte. Encore faut-il réussir à les lire et à les comprendre. Surtout quand les différentes catégories de sucres et d’édulcorants sont combinés.
Robert Rémy considère que le consommateur n’est pas bien informé malgré les étiquetages : "C’est vrai que sur certaines étiquettes, on nous parle de sucre, de glucides sur d’autres d’hydrates de carbone. Pour le consommateur moyen qui n’est ni nutritionniste, ni diététicien, se retrouver dans tout ça est chose bien compliquée. Sucre ajouté, sucre naturellement présent, cela ne dit rien au consommateur. "
Grande absente aussi des étiquettes, la quantité de sucres de synthèse introduite dans les produits. D’origine chimique, ces faux sucres font en effet l’objet d’une limite maximale de consommation, la DJA, pour dose journalière admissible. C’est une norme fixée par l’E F S A, l’Autorité européenne de sécurité des aliments. Elle représente la quantité de substance que l’on peut ingérer quotidiennement sans apparemment risquer d’effets nocifs sur sa santé.
Cette limite est calculée sur la base de tests pratiqués en laboratoire. On administre d’abord à des rongeurs une quantité élevée du produit pour déterminer la dose létale, soit la dose qui tue la moitié des animaux testés. On diminue ensuite progressivement la quantité de substance administrée jusqu’au moment où on ne constate plus aucun effet sur les animaux.
Ainsi, selon Jean-François Narbonne, prof. En toxicologie Uni Bordeaux, la DJA se calcule comme suit : «C’est cette dose qui n’a pas d’effet santé observable chez l’animal qui sert de base à l’établissement de la DJA chez l’homme. C’est-à-dire, grosso modo, la dose qui n‘a pas d’effet toxique chez le rat est divisée par cent et c’est la dose qui n’a pas d’effet toxique chez l’homme, c’est-à-dire la fameuse DJA. »
La DJA est exprimée en milligrammes de substance par kilo de poids corporel. Pour l’aspartame par exemple, elle a été fixée à 40 mg/ kilo. Un adulte de 70 kg pourrait donc en consommer plus de 2,8 grammes par jour, toute une vie, sans risque pour sa santé. En théorie du moins, parce qu’on ne sait rien de l’effet combiné de ces édulcorants de synthèse.
Pour Robert Rémy, les risques liés à l’addition des différents édulcorants ne sont pas connus : « On peut avoir des données toxicologiques pour chaque édulcorant pris individuellement. Mais la présence simultanée de 2 à 4 édulcorants dans une denrée alimentaire, qu’elles seront les effets cumulés, on n’en sait strictement rien. »
Aujourd’hui, on ne sait rien de cet effet cocktail. En revanche, grâce à l’enquête de la journaliste d’investigation française Marie-Monique Robin, on sait que la procédure d’homologation de l’aspartame, créé par un laboratoire américain, est entachée de très lourds soupçons : « Cet aspartame n’aurait jamais dû être mis sur le marché. Et s’il n’y avait pas eu ce monsieur [Donald Henry Rumsfeld] à l’époque PDG de la Searle, l’aspartame aurait été interdit. C’est ce que je révèle dans ce film.
Effectivement quand Searle dépose une demande de mise sur le marché auprès de la FDA, tous les scientifiques de la FDA examinent les études de toxicologies de Searle et disent qu’il ne faut pas le mettre sur le marché parce que les études sont très mal faites et qu’il y a un problème de rats avec des tumeurs au cerveau. Et en 1981, Reagan est élu président à la Maison-Blanche, et il fait venir dans son équipe Rumsfeld qui nomme un nouveau patron de la FDA, qui va s’asseoir sur les compte-rendus faits par les scientifiques de la FDA et autoriser l’aspartame. »
Dans la foulée l’Europe l’autorise aussi. Aujourd’hui, trente ans après, plus de 200 millions de personnes en consomment tous les jours. On trouve de l’aspartame dans pas moins de 6000 produits alimentaires.
Mais en ce début d’année, de nouvelles études ont relancé la polémique. Et incité l’EFSA à réexaminer le dossier aspartame. Selon deux études, la consommation d’édulcorant augmenterait le risque d’accouchement prématuré et d’accident cardio-vasculaire. Une troisième étude, italienne, a mis en évidence un effet cancérigène de l’aspartame sur des rats.
Jean-François Narbonne, prof. En toxicologie Uni Bordeaux n’est pas surpris par le résultat de ces études : «Il y a eu plusieurs études faites par le même groupe italien dans des conditions non officielles montrant des effets cancérigènes. Ce qui n’est pas étonnant puisqu’un des métabolites de l’aspartame est le formaldéide qui est cancérigène, mais qui apparaît à des niveaux d’exposition qui n’ont pas de commune mesure avec les niveaux constatés dans la population. »
Toutes les études montrant des risques liés à la consommation de l’aspartame ont ainsi été écartées, selon l’enquête de Marie-Monique Robin : « J’ai interviewé des experts aux USA comme le NIHS, qui est le centre de recherche indépendant le plus important aux USA. Ils m’ont tous dit que c’est les meilleures études faites sur l’aspartame, elles ont été écartées, aussi bien par l’EFSA que par l’agence française ou allemande, c’est absolument incroyable. »
Selon Jean-François Narbonne, les limites de sécurité peuvent être réévaluées : « Les limites de sécurité sont basées sur la science du jour. Quand on a des nouvelles informations, elles sont présentées au niveau européen. Si ces données sont pertinentes, elles permettent de revoir les DJA, si elles ne sont pas pertinentes évidemment la position réglementaire reste inchangée. »
C’est ce qui est arrivé il y a quelques jours, l’EFSA a finalement maintenu la DJA de l’aspartame à son niveau actuel. Mais les doutes sur cet édulcorant de synthèse comme sur les autres subsistent.
Alors, des ombres du sucre pas totalement sûres d’un côté, du vrai sucre qui concourt à l’obésité de l’autre… La solution ne serait-elle pas finalement de se passer de douceur vraie ou fausse?
Claude Fischler, sociologue, directeur de recherche CNRS : «Aujourd’hui, on voit se développer une tendance médicale qui dit qu’il faudrait ne plus consommer de sucre et se déshabituer du goût sucré. Qu’il soit vrai ou faux. Mais cela n’est pas si simple, ça nous renvoie à l’éternel débat, c’est quoi le sucre ? C’est quoi le problème avec le sucre. Et bien c’est le plaisir. Et par-dessus, il y a des constructions sociales complexes de nos sociétés qui prétendent que le sucré est infantilisant et quand on a accès à l’âge adulte, il faut renoncer au sucre. Et assumer l’amertume de la vie ! »
La Stevia : Le sucre miracle?
Depuis peu, le rébaudioside A, un édulcorant dit naturel tiré de la plante de la Stevia, fait son apparition sur le marché alimentaire. La Stevia est connue depuis des siècles. Mais en Europe, seule la France et la Suisse autorisent sa commercialisation. Une autorisation provisoire dans le cas français, jusqu’à la fin de cette année.
La Stevia rebaudiana. On dirait une mauvaise herbe. Et pourtant, elle est en passe de révolutionner le marché du sucré. C’est le Dr. Bertoni, un érudit tessinois, qui la découvre à la fin du XIXème siècle, au Paraguay. Mais cela fait belle lurette que les indiens Guarani l’utilisent pour son exceptionnel pouvoir sucrant. 300 fois celui du sucre et sans aucune calorie. Autant qu’un édulcorant de synthèse.
En Suisse, l’extrait de Stevia, le rébaudioside A, est autorisé sous certaines conditions. Mais dans la catégorie des additifs alimentaires. Et cela fâche les producteurs de produits édulcorés avec cette plante magique.
Umberto Leonetti, directeur Storms ne comprend pas le statut d’additif alimentaire de la Stevia : «Effectivement , la Stevia est classée comme additif alimentaire, au chapitre des édulcorants. Pire encore , on ne fait pas la distinction entre les édulcorants naturels et les édulcorants synthétiques. Alors que la Stevia devrait être une simple plante aromatisant comme la menthe ou le basilic. »
Pour Claude Fischler, la Stevia a beau être une plante, les risques devraient tout de même être étudiés : «Bien sur, le discours maintenant avec la Stevia, c’est de dire que ça peut pas faire de mal, c’est rien que des plantes. Pierre Dac avait une grosse blague là-dessus, il disait, la drogue ça peut pas faire de mal, c’est rien que des plantes. »
En raison d’insuffisance de données scientifiques, l’OMS a appliqué le principe de précaution. L’extrait de Stevia, s’est vu imposé une DJA.
Pour Umberto Leonetti, la DJA de la Stevia n’est pas justifiée : «On a limité la dose d’utilisation journalière de la Stevia à 4 mg/kg poids corporel alors que si vous comparez avec l’aspartame qui est toxique, elle est de 40mg. Alors il y a quelque chose qui joue pas »
Malgré ces entraves, la plante qui sucre sans faire grossir, a commencé à faire son apparition dans les produits d’alimentation courante. Dans les édulcorants de table, bien sûr, mais aussi, dans nombre de boissons et même dans d’autres tablettes.
A Fribourg, l’entreprise Villars, spécialisée dans la production de chocolats et de café, fabrique désormais le premier chocolat noir à la Stevia.
Et selon Alexandre Sacerdoti, directeur Chocolats Villars, des investissements sont nécessaires à l’utilisation de la Stevia : «Aujourd’hui, il est très difficile pour les gens de l’alimentaire de dominer ce produit parce qu’il faut le travailler avec beaucoup de soin. Nous avons mis un an et demi à développer ce produit de telle façon que nous n’ayons pas de goût de réglisse. Et cela suppose un investissement important en terme de processus. Où est-ce que vous allez rajouter la Stevia, à quel moment ? On ne la met pas au même moment que le sucre. C’est quelque chose d’important, c’est notre secret de fabrication. »
Les processus de fabrication ne sont pas les seuls responsables des difficultés de la Stevia à s’implanter sur le marché. Pendant des années, les géants de l’alimentaire américains ont tout fait pour empêcher l’autorisation de la plante adoucissante. Avant de retourner leur veste sous la pression des études mettant en cause l’innocuité des sucres de synthèse. C’est que le marché de la douceur light représente un pactole. 40 milliards par an. Et la Stevia, avec son aura naturelle, pourrait bien rafler la mise.
Pour la journaliste Marie-Monique Robin, la Stevia remplacera l’aspartame à long terme : «La Stevia, qui a été bloquée pendant des années par les agences de réglementation sous des prétextes totalement fallacieux. En fait la réalité, c’est que ça faisait concurrence à l’aspartame. C’est pourquoi on commence aujourd’hui à l’autoriser. Et ce que je constate, c’est qu’il y déjà en cours des négociations entre producteurs de Stevia et Coca-cola et que peut-être ce qui va se passer, c’est que pour éviter la crise publique qui pourrait déboucher sur une remise en cause du système de réglementation, on va laisser la Stevia remplacer petit à petit l’aspartame et puis un jour il n’y aura plus d’aspartame et on dira : Ah ben voilà, on a évité la crise, je pense que c’est ça. »
La conquête planétaire de la Stevia n’est pas pour autant facilitée. Seul le Japon, où les édulcorants artificiels sont déconseillés, en a fait son faux sucre fétiche. Importée d’Amérique latine par des agronomes nippons dans l’après-guerre et mise en culture en Chine et au Pays du Soleil levant, la Stevia y a raflé 40 % du marché des édulcorants.
L’emploi modéré de la Stevia : entretien avec Marie-France Corre, consultante en consommation et marketing responsable
La semaine prochaine :
Peut-on vivre une semaine sans utiliser un produit chinois ? Pas si simple. De l’alimentaire aux nouvelles technologies en passant par les vêtements, la Chine exporte tous les objets de consommation courante. Affiché sur certaines étiquettes, l’origine de ces produits peut également changer en arrivant en Europe, grâce à un assemblage final en France ou une transformation en Italie. Un fait qui complique encore notre défi.