Comment garantir la sécurité des citoyens? Cette question suscite des débats houleux alors que la menace terroriste n’a jamais été aussi présente. C’est que le danger vient aussi et surtout de l’intérieur. L’essentiel des terroristes qui ont frappé la France, la Belgique ou la Tunisie étaient des ressortissants du pays qu’ils attaquaient.
La France et la Tunisie ont opté pour l’instauration de l’état d’urgence autorisant des mesures exceptionnelles mais potentiellement liberticides. La Belgique a elle aussi pris toute une série de mesures exceptionnelles pour combattre les groupes djihadistes implantés sur son territoire.
Doit-on sacrifier nos libertés sur l’autel de la sécurité antiterroriste? Que nous enseignent les mesures prises par les États-Unis après le 11 septembre 2001? Geopolitis décrypte ce dilemme qui met en jeu les fondements de nos sociétés démocratiques.
L'invité: Frédéric Esposito, professeur au Global Studies Institute, UNIGE, directeur de l’Observatoire universitaire de la sécurité.
Titulaire d’un doctorat en science politique de l'Université de Genève et diplômé en relations internationales de l'Institut universitaire de hautes Études internationales et du développement, Frédéric Esposito a notamment dirigé le Forum de l'Université 2005-2008 "Démocratie et terrorisme" de la Société académique de Genève. Parallèlement, il a participé comme chef de projet au programme de la Commission européenne "Villes contre le terrorisme", développé au sein du Forum européen pour la sécurité urbaine.
Ses domaines d'enseignement et de recherche portent sur la gouvernance européenne, la démocratie directe, la démocratie électronique et la lutte antiterroriste.
Face à l’insurrection, à la révolte ou à la violence ou pour soutenir le régime en place, les gouvernements disposent d’une mesure d’exception, l’état d’urgence. Accroissement des pouvoirs de police, restrictions de libertés publiques, couvre-feu ou contrôle de la presse, l’état d’urgence a été décrété tour à tour en France, en Roumanie, en Afrique du Sud ou en Colombie.
L’état d’urgence instauré en Roumanie
En décembre 1989, la révolte gronde contre le régime de Nicolas Ceaucescu en Roumanie. Le 20 décembre, le Conducator instaure par décret l’état d’urgence dans l’ouest du pays après des manifestations, violemment réprimées par l’armée et la milice. Le président entend ainsi faire face aux menaces "contre l’indépendance du pays et le socialisme". Ces mesures ne suffiront pas à le maintenir au pouvoir.
6 juin 1990, le Président sud-africain Frederik de Klerk a saisi l'occasion de la visite de Nelson Mandela à Paris pour annoncer, la levée (sauf dans le Natal) de l'état d'urgence en vigueur depuis 4 ans dans le pays. M. de Klerk a également déclaré que 48 prisonniers politiques seraient libérés. Un premier coup porté à l’apartheid.
Le nouveau président colombien Alvaro Uribé décrète le 12 août 2002 l’état d’urgence pour 90 jours au moins, une décision motivée par la recrudescence de la violence en Colombie. La tension est, en effet, montée d'un cran depuis l’attaque à la roquette du palais présidentiel par les révolutionnaires des FARC.
En France en novembre 2005, à la suite d’émeutes en banlieue, le Conseil des ministres réactive une loi sur l'état d'urgence instaurée durant la guerre d’Algérie. La loi du 5 avril 1955 va ainsi permettre aux Préfets de décréter un couvre-feu dans les zones les plus sensibles. Rappel des circonstances dans lesquelles la France a eu recours à l’état d’urgence et réactions politiques.