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Les phytoœstrogènes, ces perturbateurs endocriniens présents dans le soja

Un champ de soja. [Depositphotos - Fotokostic]
Peut-on passer au tout soja? / On en parle / 10 min. / le 13 janvier 2023
Omniprésents dans les rayons des supermarchés, les produits à base de soja comme le lait, le tofu ou les flocons sont à consommer avec modération. Ils contiennent en effet des phytoœstrogènes, molécules agissant comme des perturbateurs endocriniens.

Lorsqu’on suit un régime végétarien, végane ou encore sans lactose, les produits à base de soja comme le lait, le tofu et les flocons représentent une bonne alternative protéinée à leurs équivalents d’origine animale. Cependant, leur consommation régulière et en grande quantité peut devenir problématique à cause des phytoœstrogènes isoflavones, des molécules agissant comme des œstrogènes et qui peuvent perturber le système endocrinien.

A éviter chez les personnes vulnérables et les enfants

"Le soja est à la fois intéressant au niveau nutritionnel pour ses protéines, mais il contient aussi ces particules agissant comme des perturbateurs endocriniens", a expliqué vendredi dans l'émission On en parle Nicoletta Bianchi, diététicienne cheffe-adjointe au service d'endocrinologie, diabétologie et métabolisme du Centre hospitalier universitaire vaudois.

La consommation de soja et donc de phytooestrogènes isoflavones est donc à surveiller pour "les populations sensibles comme les enfants en croissance et les nourrissons, mais aussi les femmes enceintes ou allaitantes qui vont transmettre ces substances à leurs enfants", poursuit Nicoletta Bianchi. La Confédération recommande une quantité journalière d’au maximum 50 milligrammes de phytooestrogènes isoflavones pour un adulte, tandis que pour l’Anses, l’Agence nationale de sécurité française, la limite journalière et par personne serait d’un milligramme par kilogramme.

"Le poids d'un enfant est faible par rapport à celui d'un adulte, la dose journalière admissible est donc vite atteinte", précise Nicoletta Bianchi. Si leur consommation est trop importante, les phytoœstrogènes pourraient interagir avec la fertilité des garçons et des filles, mais aussi avec la croissance des jeunes enfants.

Avec modération, des effets bénéfiques pour la santé

Les personnes adultes et en bonne santé peuvent-elles consommer du soja régulièrement sans risques pour la santé? "Les études sont parfois assez contradictoires, mais en quantité raisonnable, les phytoœstrogènes peuvent avoir des effets positifs, notamment sur la ménopause, en diminuant les symptômes désagréables comme les bouffées de chaleur", répond Nicoletta Bianchi.

En revanche, si les quantités consommées sont trop élevées, les phytoœstrogènes ont un effet délétère, par exemple sur les cancers hormonaux-dépendants comme le cancer du sein ou de la prostate.

Une concentration plus ou moins élevée selon le produit

Selon le produit consommé, la concentration en phytoœstrogènes varie. "Quelqu’un qui remplacerait toutes ses boissons lactées par du lait de soja en boira 2, 4 ou 5 décilitres par jour. Evidemment, la quantité de phytoœstrogènes consommées sera importante." Idem pour le tofu et les flocons de soja, deux produits contenant une concentration importante de phytoœstrogènes.

En revanche, les pousses de soja (appelées "moyashi" au Japon) sont inoffensives car il s’agit d’un haricot, nommé haricot mungo. "Cela n’est en réalité pas du soja", précise Nicoletta Bianchi.

La fabrication artisanale, plus saine

Les personnes vivant en Asie consomment des aliments à base de soja depuis des centaines d’années. Pourtant, cette consommation régulière ne semble pas poser de problèmes.

"Durant les décennies précédentes, les personnes vivant en Asie consommaient des produits à base de soja de fabrication artisanale, ce qui permettait une diminution des phytoœstrogènes, notamment avec le trempage des fèves de soja et le renouvellement de l’eau de la cuisson, qui était longue. Ces procédés de fabrication ont changé ces dernières années pour gagner en rapidité. Ces personnes étaient donc soumises a des quantités beaucoup moins importantes de phytoœstrogènes, avec un historique millénaire d’une alimentation différente de la nôtre", conclut Nicoletta Bianchi.

Sujet radio et propos recueillis par Théo Chavaillaz
Adaptation web: Myriam Semaani

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