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En Ukraine, toujours plus d’épouses réclament que leur mari quitte le front

En Ukraine, toujours plus d’épouses réclament que leur mari quitte le front. [RTS - Maurine Mercier]
L'Ukraine à un tournant / Tout un monde / 6 min. / le 11 décembre 2023
En Ukraine, les épouses de soldats sont toujours plus nombreuses à se mobiliser pour que leur mari revienne du front. Alors que la Russie repasse à l'offensive, les Ukrainiens, combattants ou non, sont épuisés après bientôt deux ans de conflit.

Les femmes de soldats ukrainiens sont de plus en plus nombreuses à manifester. Le mouvement a atteint toutes les grandes villes du pays. La RTS a notamment rencontré Inna lors d'un rassemblement. Emmitouflée dans son manteau, elle tient par la main son petit garçon de 7 ans, trop ému pour s'exprimer.

"Mon fils a écrit une lettre à Saint Nicolas. Il a demandé que son papa soit libéré de l’armée", raconte-t-elle. "Mon mari fait la guerre depuis presque deux ans maintenant. Et depuis tout ce temps, nous n’avons pu le voir que deux fois", explique-t-elle.

Dans la foule compacte se trouve également Anastasia. Elle aussi est morte d’inquiétude pour son mari blessé et psychologiquement épuisé.

"Mon mari a des maladies chroniques, dont le diabète. Il souffre de traumatismes à cause des obus", indique-t-elle. "Il n’en peut plus et veut rentrer à la maison. Mais il en a l’interdiction, alors il continue à se battre. Il continue à servir, mais ne souhaite qu’une chose: être remplacé", ajoute-t-elle.

>> Voir aussi le sujet du 19h30 du 16 juin sur les soldats ukrainiens blessés :

Reportage en Ukraine auprès des soldats blessés lors de la contre-offensive.
Reportage en Ukraine auprès des soldats blessés lors de la contre-offensive. / 19h30 / 2 min. / le 16 juin 2023

A ceux qui lui reprochent son manque de patriotisme, Anastasia réplique: "Une armée épuisée ne pourra rien contre l’ennemi. Nous avons vraiment besoin d’une nouvelle mobilisation."

Vers une réduction du temps de service?

Ces femmes ont-elles une chance d’obtenir gain de cause? Une commission parlementaire a commencé à travailler sur une démobilisation après 36 mois. Les épouses des soldats réclament, elles, une limite à 18 mois.

"En 18 mois de plus sur le front, nos maris auront le temps de tous se faire tuer. Nous ne les reverrons plus jamais", se désole l'une d'elle.

Pour la première fois depuis le début de la guerre, la lassitude gagne du terrain. Nombre d’Ukrainiens considèrent que la guerre a atteint un "tournant".

Ils ne se demandent plus quand ils parviendront à récupérer leurs terres. A cela s'ajoute la tristesse de réaliser qu’ils sont effectivement petit à petit lâchés par leurs alliés.

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Difficultés internationales

Il y a encore quelques mois, Volodymyr Zelensky avait droit à des standing-ovations devant les Parlements américain ou européen.

Aujourd’hui, le président ukrainien lasse. Et ce, même aux Etats-Unis, de loin le premier soutien de l'Ukraine. Le Parlement américain refuse pour l’heure de continuer à fournir de l'aide.

La semaine dernière, Volodymyr Zelensky a renoncé à la dernière minute à se présenter devant les sénateurs américains en visio-conférence.

Voyage en Argentine

Il s'est en revanche rendu ce week-end en Argentine, pour l’investiture du nouveau président populiste Javier Milei. "Ce voyage dit combien notre situation est désespérée", soutient Inna.

La jeune femme relève toutefois que le nouveau président argentin soutient clairement l'Ukraine. A ses yeux, Volodymyr Zelensky ne peut pas se payer le luxe de le bouder, alors que la situation de son pays apparaît de plus en plus précaire. La Hongrie menace, elle, de bloquer l’enveloppe d’aide européenne de 50 milliards d’euros à l’Ukraine. Le vote, qui requière l’unanimité, doit se tenir en fin de semaine.

"Nous comprenons que vous soyez fatigués par la guerre", lance un Ukrainien. "Poutine n’attendait que cela, nous y voilà. Nous, nous ne sommes pas fatigués, nous sommes épuisés. Mais nous n’avons pas le choix. Avec ou sans aide, nous devrons nous battre jusqu’au dernier", déclare-t-il.

Reportage radio: Maurine Mercier

Adaptation web: ami

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