Entre insultes et coups de boule, le témoignage accablant d'une soldate victime de harcèlement à l'armée

Rencontre avec une victime de harcèlement subi à l'armée alors que 80% des soldats y sont confrontés
Rencontre avec une victime de harcèlement subi à l'armée alors que 80% des soldats y sont confrontés
Fin octobre, l'armée rendait public un rapport selon lequel un nombre écrasant de militaires affirmaient avoir été victimes de harcèlement ou de violences verbales ou physiques. Une culture installée au sein de la troupe depuis toujours, que l'armée affirme vouloir combattre à tout prix. La RTS a rencontré l'une de ces victimes.

Il y a quelques semaines, une étude était rendue publique par l’armée : 81% des militaires interrogés disaient avoir subi des violences dites "sexualisées" parmi les 1126 personnes interrogées dans cette enquête anonyme. Plus des deux tiers étaient des femmes. Ils/elles ont répondu à des questions sur les expériences vécues pendant la durée de leur service (après l’école de recrues).

La RTS a retrouvé une jeune femme qui a été victime de ces agissements. Elle témoigne de manière anonyme pour ne pas être formellement reconnue par la justice militaire, qui s'occupe de son cas.

Quand on a dénoncé, ça n'a jamais été plus haut, ça n'a jamais été jusqu'à l'état-major. Et puis ça nous est même retombé dessus

Une victime témoignant de son harcèlement dans l'armée

"On nous disait souvent qu'on n'était pas des putes, qu'on n'était pas des 'pussy', qu'on n'était pas des pédés... Et qu'on était vraiment des connards, qu'on était des merdes. Il y a eu des coups de boule aussi."

Il s'agit du genre de propos que redoutait Thomas Süssli, le chef de l'armée, lorsqu'il présentait son rapport il y a quelques semaines. "Les résultats de cette étude m'ont stupéfait. Il n'y a pas de place pour les blagues sexistes et ambiguës, il n'y a pas de place pour tout ce qui fait que nos soldats et soldates se sentent atteints dans leur intégrité dans le cadre de leur service", assurait-il alors.

>> Relire : Discrimination et violence sexualisée sont courantes au sein de l'armée suisse

Obligée de quitter l'armée

La victime rencontrée par la RTS s'est toutefois sentie abandonnée à son sort. "J'imaginais bien que ça n'allait pas être évident, ce n'est pas le Club Med. Mais de là à entendre de tels propos, franchement, je ne m'y attendais pas. En tout cas pas pour servir mon pays. Quand on a dénoncé, ça n'a jamais été plus haut, ça n'a jamais été jusqu'à l'état-major. Et puis ça nous est même retombé dessus, à tel point que je me suis sentie en danger. J'ai dû quitter l'armée."

L'autorité militaire n’a pas voulu faire de commentaire sur ce témoignage en particulier. "Le commandement de l'armée a décidé d’adopter des mesures complémentaires à la Stratégie diversité en renforçant la protection des militaires et en accélérant le changement de culture amorcé au sein de l’armée", a-t-elle indiqué à la RTS.

Sujet TV: Thierry Clémence

Version web: Antoine Schaub

Publié Modifié

Article modifié le 9 janvier

L’étude dont il est question ici n’est pas un sondage représentatif : notamment, parmi les 1126 militaires qui ont participé à cette enquête, plus des deux tiers (764 répondantes) étaient des femmes – alors qu’elles ne constituent que 1,6% des effectifs de l’armée (chiffres 2024).

En conséquence il est faux de dire que 81% des militaires ont subi des propos sexistes: en réalité, ce sont 81% des personnes interrogées qui déclarent avoir subi ce type de violences verbales