Cette décision de principe restreint fortement l'obtention d'une rente de l’assurance invalidité (AI) après un coup du lapin. Jusqu'ici, l'incapacité de gain nécessaire à l'obtention d'une rente était donnée si les symptômes typiques d'un coup du lapin étaient diagnostiqués après un accident. En font partie par exemple les maux de tête diffus, les vertiges, les difficultés de concentration ou de mémoire, la fatigue rapide, l'irritabilité ou les dépressions.
Des douleurs qui ne peuvent être clairement prouvées
Mais à présent, le Tribunal fédéral (TF) a décidé qu'un coup du lapin, en l'absence de déficits fonctionnels ou organiques objectifs, ne donne en principe plus droit à des prestations de l'AI. Les deux Cours de droit social du Tribunal fédéral, sises à Lucerne, ont décidé d'appliquer au coup du lapin les mêmes règles strictes édictées pour les troubles douloureux qui ne peuvent être clairement prouvés.
Selon la jurisprudence du TF, les troubles douloureux persistants avant tout psychiques n'entraînent pas, en règle générale, une limitation de longue durée de la capacité de travail pouvant conduire à une invalidité. Le TF relève qu'à la lumière de l'égalité de traitement, il convient de soumettre aux mêmes conditions l'ensemble des syndromes douloureux qui ne peuvent s'expliquer objectivement.
Rente accordée exceptionnellement
Le TF souligne aussi que les troubles désignés sous le terme de coup du lapin ne figurent dans aucun système de classification médical reconnu. A l'avenir, une rente AI ne sera accordée en cas de coup du lapin qu'exceptionnellement, comme pour les troubles douloureux, quand on ne peut exiger de la personne qu'elle surmonte par sa volonté ses troubles et qu'elle réintègre le monde du travail.
Il faudra dorénavant le diagnostic d'un médecin spécialisé. Ce certificat devra mentionner des maladies auxiliaires physiques et psychiques d'une certaine durée et intensité ainsi que les efforts de thérapie entrepris à long terme en vain.
Si un médecin conclut qu'une personne est dans l'incapacité de travailler, les instances de l'AI et les tribunaux ne doivent plus reprendre ce jugement tel quel, selon le TF. Il faudra vérifier en particulier s'il a été tenu compte de critères "psychosociaux et socioculturels" étrangers à l'AI.
"Quasiment inaccessible"
Selon Evalotta Samuelsson, avocate et présidente de l'Association du coup du lapin, il est déjà devenu difficile récemment d'obtenir une rente AI pour un tel traumatisme. Avec le jugement du Tribunal fédéral (TF), ce sera quasiment impossible.
Pour elle, le Tribunal fédéral a pratiquement anticipé le projet de 6e révision de l'AI (lire-ci contre). Il est choquant à ses yeux que le coup du lapin soit réduit à des troubles douloureux.
D'un point de vue médical, il n'y a aucune raison de penser que les symptômes puissent être surmontés par volonté, comme c'est par exemple le cas pour le vertige.
ats/mej
Durcissement opéré depuis 2004
La 6e révision de l'assurance invalidité (AI) prévoit la suppression des rentes versées pour des troubles douloureux non explicables par des déficits organiques. Le Tribunal fédéral (TF) avait serré la vis en la matière en 2004 déjà.
L'an dernier, il a pourtant décidé que les bénéficiaires d'une rente AI accordée avant 2004 pour des troubles douloureux la recevraient même après le durcissement de la pratique.
Le TF fondait sa décision sur la sécurité juridique et le principe de la bonne foi des personnes concernées. De plus, il leur serait difficile de réintégrer une activité professionnelle. Supprimer des rentes est du ressort du législateur.
Or, la 6e révision de l'AI projette de retirer les prestations actuelles pour des troubles douloureux si ont peut attendre des bénéficiaires qu'ils surmontent leur mal "moyennant un effort de volonté raisonnablement exigible". Le Conseil des Etats a donné son feu vert à cette première partie de la révision en juin dernier.