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Impôts équitables: l'initiative échoue nettement

Christian Levrat et Hans-Juerg Fehr ont pris connaissance avec amertume du refus de leur initiative. [Lukas Lehmann]
Christian Levrat et Hans-Jürg Fehr ont pris connaissance avec amertume du refus de leur initiative. - [Lukas Lehmann]
 Les paradis fiscaux cantonaux ne ponctionneront pas davantage les riches contribuables. Par 58,5% des voix, le peuple a rejeté dimanche l'initiative populaire socialiste "pour des impôts équitables".

Le soutien de Genève, Bâle, Neuchâtel et du Jura a été vain. Le texte du PS a été refusé par plus de 1,51 million de citoyens. Environ 1,07 million l'ont soutenu.

Assortie de menaces d'une hausse généralisée des impôts, la coûteuse campagne orchestrée par les milieux économiques a fait mouche. La gauche, donnée gagnante après les premiers sondages, essuie un nouvel échec dans sa lutte en faveur de ce qu'elle considère comme l'"équité fiscale".

Son espoir d'obtenir au moins la majorité du peuple, à défaut de la majorité des cantons a été douché.

Nidwald en tête

Les résultats ont parfois été cinglants, en particulier dans les paradis fiscaux de Suisse centrale et primitive qui auraient dû réviser leurs barèmes à la hausse. La palme revient à Nidwald, avec un score de huit contre dix (79,9% de "non"). Autre paradis fiscal, Zoug suit de près avec 79,5% de refus. Obwald, dont les impôts dégressifs avaient suscité le lancement de l'initiative populaire, s'aligne avec un taux de rejet de 79,2%.

Le faible "oui" des Genevois n'est pas de bon augure pour un oui national.
Le faible "oui" des Genevois n'est pas de bon augure pour un oui national.

Parmi les dix cantons qui n'aurait pas dû changer leur système d'imposition en cas d'acceptation, le Valais a pourtant dit "non" à 68,4%. En Suisse romande, Fribourg à 54,2% et Vaud à 53,2% en ont fait de même, tout comme Berne (58,5%) et le Tessin (59,4%).

Seuls quelques cantons ont appuyé l'initiative. Les Jurassiens se sont montrés les plus convaincus, avec 59,1% de "oui". Le camp des partisans a rassemblé également Bâle-Ville (58,7%), Neuchâtel (57%) et Genève, de justesse (50,7%).

L'initiative demandait l'instauration d'un taux d'imposition d'au moins 22% pour les personnes déclarant un revenu de plus de 250'000 francs par an et de 5 pour mille pour les fortunes imposables supérieures à deux millions de francs.

Conseil fédéral et économie satisfaits

Pour les cantons, la droite, les milieux économiques, le peuple a montré son attachement à la concurrence fiscale et à la souveraineté des cantons en rejetant l'initiative "pour des impôts équitables". Le PS impute son échec aux moyens engagés par ses adversaires.

La nouvelle ministre des finances Eveline Widmer-Schlumpf avait le sourire. Pour la Grisonne, le refus de l'initiative du parti socialiste pour des impôts équitable est un "oui à notre système fédéraliste fiscal". Les inégalités doivent être aplanies par le biais de la péréquation financière, selon elle

Les citoyens ont tenu à préserver le fédéralisme et la souveraineté des cantons en matière fiscale, se réjouit le conseiller d'Etat vaudois Pascal Broulis, président de la Conférence des gouvernements cantonaux. La concurrence fiscale permet d'éviter les excès d'impôts, dit-il, interrogé par l'ATS. Elle oblige les cantons à utiliser l'argent public avec parcimonie, renchérit economiesuisse.

Manque de moyens

Le PS, qui a lancé l'initiative, juge le résultat plutôt satisfaisant, puisque le parti était quasiment seul - avec les Verts, le PEV et le PCS - à militer en faveur de l'initiative. Il a largement dépassé le socle électoral de gauche.

Christian Levrat inaugurera samedi matin le Congrès du PS à Lausanne. [KEYSTONE - Peter Klaunzer]
Christian Levrat inaugurera samedi matin le Congrès du PS à Lausanne. [KEYSTONE - Peter Klaunzer]

Les socialistes dénoncent une campagne adverse dotée de "plusieurs millions de francs et d'une mauvaise foi confondante". Selon le conseiller national schaffhousois Hans-Jürg Fehr et ancien président du PS, les opposants avaient trente fois plus d'argent que le PS, soit 7,5 millions de francs. Des chiffres rejetés par economiesuisse, qui dit avoir investi dans la campagne à peu près la moitié de ces sommes.

Pour le PS, l'initiative a permis de lancer le débat sur un système fiscal plus équitable. La péréquation financière doit être améliorée et l'imposition forfaitaire supprimée. Pour Hans-Jürg Fehr, quelque chose doit se passer dans le domaine de l'impôt sur les successions.

Le PEV prépare une initiative. Pour les Verts non plus, le débat ne doit pas s'arrêter là. Il s'agit maintenant de discuter de modèles pour éviter une concurrence fiscale nuisible aux contribuables modestes et à la classe moyenne, a dit son président Ueli Leuenberger. "La Gauche - Alternative Linke - La Sinistra" annonce déjà le lancement d'une initiative pour la suppression des forfaits fiscaux des millionnaires étrangers. La formation, qui rassemble les forces alternatives de gauche en dehors du PS et des Verts, prendra sa décision définitive lors de son prochain congrès le 5 mars à Zurich.

agences/ther

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