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Route et rail: vignette doublée et billet plus cher

Les travaux sur l'A1 ont entraîné plus de 800 heures supplémentaires de bouchon. [KEYSTONE - LAURENT GILLIERON]
La vignette obligatoire pour emprunter l'autoroute pourrait passer à 80 voire 100 francs. - [KEYSTONE - LAURENT GILLIERON]
Les usagers devraient encore passer à la caisse pour assurer le financement des infrastructures routières et ferroviaires. Pour trouver de nouveaux fonds, le Conseil fédéral propose de doubler le prix de la vignette autoroutière et d'augmenter le prix du billet de train de 10% sur plusieurs années.

Le Conseil fédéral, qui a adopté mercredi sa stratégie pour assurer le financement des infrastructures, propose également de relever la surtaxe sur les huiles minérales. Pour le rail, le gouvernement a chargé le Département des transports (DETEC) d'élaborer un projet qui devrait être mis en consultation au printemps puis soumis l'an prochain au Parlement.

Les ressources actuelles sont tout à fait insuffisantes, rappelle jeudi le DETEC. Le réseau des CFF a besoin de plusieurs centaines de millions de francs supplémentaires par an pour le maintien de sa substance. Or il faut continuer d'en augmenter les capacités pour répondre à la demande croissante. Outre la création d'un fonds d'infrastructure ferroviaire qui cumulerait deux fonds de 1,8 et 2 milliards de francs, le Conseil fédéral cherche au moins 850 millions de recettes supplémentaires.

Le prix des billets sera régulièrement majoré pour faire face aux investissements de l'ex-régie fédérale. [Laurent Gillieron]
Le prix des billets sera régulièrement majoré pour faire face aux investissements de l'ex-régie fédérale. [Laurent Gillieron]

Billet de train plus cher

Le prix du sillon, soit la redevance que versent les entreprises de transport ferroviaire pour l’utilisation de l'infrastructure ferroviaire en Suisse, sera relevé par étape afin d'accroître les recettes de 300 millions par an et il faut s'attendre à ce que la hausse soit répercutée sur le client final. Les billets et abonnements des transports publics pourraient ainsi augmenter progressivement d'environ 10% au cours des prochaines années. En outre, les usagers ne pourront plus déduire davantage qu'un abonnement de transports publics d'une agglomération pour l'impôt fédéral direct (environ 800 francs par an), ce qui devrait rapporter 250 millions de francs par an. Enfin les cantons devront débourser annuellement 300 millions de plus.

Le Parlement décidera tous les quatre ans des aménagements à financer par le nouveau fonds. Pour la première tranche à réaliser d'ici 2025, le Conseil fédéral propose 3,5 milliards de francs à investir en priorité pour décharger les agglomérations notamment via de longs trains à deux étages entre Genève et Lausanne ou des aménagements aux noeuds ferroviaires de Lausanne, Berne et Bâle. Ces travaux devraient être réalisés parallèlement à ceux planifiés dans le cadre des nouvelles lignes ferroviaires alpines, du fonds d'infrastructure et du futur développement de l'infrastructure ferroviaire (ZEB).

Le prix de l'essence baissera de 2 centimes à la pompe mercredi.
Le prix de l'essence baissera de 2 centimes à la pompe mercredi.

Vignette et carburants

Pour le Conseil fédéral, cette conception est préférable à l'initiative populaire "pour les transports publics" de l'Association transports et environnement à laquelle elle doit servir de contre-projet direct. En proposant de redistribuer les produits de l'impôt sur les huiles minérales prélevé sur le carburant au profit du rail, le texte ne ferait que déplacer le problème de financement du transports publics vers le domaine routier. Pour éviter les impasses dans ce secteur, le gouvernement propose de procéder en deux étapes.

Pour financer l'extension du réseau des routes nationales, la vignette autoroutière devrait coûter 80 à 100 francs au lieu des 40 francs actuels. Une vignette valable un ou deux mois serait toutefois introduite en même temps au prix de 40 francs. Ces nouveautés ne devraient pas intervenir avant fin 2014.

Le Conseil fédéral prévoit d'attendre que les réserves du Financement spécial pour la circulation routière - actuellement à 2,8 milliard de francs - tombent sous la barre du milliard de francs. Le prix de l'essence pourrait ensuite prendre l'ascenseur. Le Conseil fédéral souhaite soumettre au Parlement en 2015 une augmentation de la surtaxe sur les huiles minérales, dont le montant est inchangé depuis 1974. Pour financer les "besoins ordinaires", 7 à 10 centimes devraient s'ajouter aux quelque 30 centimes prélevés par litre de carburant. Le Parlement devra se prononcer.

ats/cab

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Qui devra payer? La question qui divise

Les propositions du Conseil fédéral sont jugées globalement bonnes par la plupart des milieux concernés. Mais chacun aimerait voir les autres usagers passer à la caisse.

Pour les Verts, il faut en effet cesser de désavantager les transports publics par rapport aux véhicules privés, qui engendrent des coûts externes liés à l'environnement et aux accidents nettement supérieurs.

L’UDC a bondi jeudi et estime qu’aujourd'hui déjà, les usagers de la route sont considérés comme des "vaches à lait" et financent non seulement leurs propres besoins, mais aussi une bonne part du trafic ferroviaire.

Pour le PLR, les propositions présentées jeudi touchent trop la population, en particulier les pendulaires. Il demande donc au Conseil fédéral de revoir son projet, de rendre plus efficient le système et de donner la priorité aux investissements avant de faire passer à la caisse les citoyens.

De fait, seul le PDC, parti de la ministre des transports Doris Leuthard, se dit convaincu par le projet. De bonnes infrastructures sont nécessaires pour la Suisse et tous les usagers doivent participer aux coûts. C'est douloureux mais inévitable, estime-t-il.

Le TCS se déclare globalement satisfait de la volonté du Conseil fédéral de clarifier les flux financiers au profit du rail et de la route ainsi que la création d'un fonds d'infrastructure ferroviaire. Mais en sa qualité de club automobile, il émet "de fortes réserves" sur toute augmentation des taxes sur les carburants et de la vignette.

L'ASTAG, la faîtière des camionneurs, se réjouit surtout du fait que le projet ancre davantage le principe de causalité pour le rail. Dans tous les cas, estime-t-elle, une nouvelle hausse de la participation des usagers des transports publics est inéluctable.

De son côté, l'Union des transports publics (UTP) juge également bonnes les propositions du gouvernement mais souligne qu'elles ne suffiront pas à combler les besoins financiers pour les infrastructures ferroviaires et routières. Mais elle se montre réticente à une hausse des prix du billet de train et des sillons.

Les voyageurs devront déjà participer au financement des offres supplémentaires et de la sécurité, souligne l'UTP. Qui estime qu'il est temps d'introduire une réelle taxe sur la mobilité ("Mobility Pricing"), proportionnelle à l'utilisation des moyens de transports, que ce soit par la route ou par le train.

Les moyens envisagés dans le nouveau fonds ferroviaire restent insuffisants pour maintenir l'infrastructure et développer l'ensemble du réseau, estiment l'USS et le Syndicat du personnel des transports (SEV).

Ils s'opposent également à toute hausse du prix du sillon, qui signifierait la fin du transfert de marchandises de la route au rail.

Les CFF rappellent que le financement de l'infrastructure ferroviaire n'est actuellement pas assuré, que ce soit en matière d'exploitation, d'entretien ou de développement. Le nouveau système permettra donc d'assurer à long terme la couverture des besoins financiers en vue du maintien de la substance et de la poursuite du développement du réseau ferré.