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L'opposition à Moubarak ne désarme pas

Des milliers de manifestants sont une nouvelle fois descendus dans la rue, avant la "marche d'un million" prévue mardi. [ANDRE LIOHN]
Des milliers de manifestants sont une nouvelle fois descendus dans la rue, avant la "marche d'un million" prévue mardi. - [ANDRE LIOHN]
Le président Hosni Moubarak a remanié lundi son gouvernement pour tenter d'apaiser la colère de la rue. Peine perdue: des dizaines de milliers d'Egyptiens ont manifesté au Caire pour réclamer son départ, alors que l'armée a déclaré lundi soir renoncer à l'usage de la force. Un appel au dialogue avec l'opposition a été lancé.

Dernière manoeuvre en date d'Hosni Moubarak pour tenter de
calmer la colère de la rue: une proposition de dialogue immédiat avec
l'opposition a été lancée par le vice-président Omar Souleimane lundi soir lors
d'une allocution télévisée. Le vice-président a précisé que ce dialogue
porterait notamment sur des réformes constitutionnelles et législatives, une
des exigences des manifestants.

L'armée égyptienne a déclaré un peu plus tôt lundi soir que
les revendications du peuple étaient "légitimes" et s'est engagée à
ne pas faire usage de la force à la veille de marches géantes. Au septième jour d'une contestation sans précédent, des
dizaines de milliers de manifestants s'est à nouveau rassemblée sur la place
Tahrir, scandant "Moubarak dehors".

L'armée ne réagit pas

L'armée égyptienne, qui patrouille depuis plusieurs jours dans la captiale, devra dire si elle continue de soutenir Moubarak. [AFP - KHALED DESOUKI]
L'armée égyptienne, qui patrouille depuis plusieurs jours dans la captiale, devra dire si elle continue de soutenir Moubarak. [AFP - KHALED DESOUKI]

Les
militaires positionnés dans la capitale n'ont pas esquissé le moindre geste
pour disperser les protestataires. La puissante armée égyptienne semble désormais détenir les
clés des événements à venir, et du sort du président Moubarak. Le soulèvement,
sans précédent en Egypte par son ampleur et son intensité, a éclaté mardi
dernier pour protester contre la répression, la corruption et la pauvreté.

Environ 140 personnes sont mortes dans les affrontements
avec les forces de sécurité. Hosni Moubarak a tenté plusieurs fois de
désamorcer la crise en annonçant des réformes économiques et en remaniant sa
garde rapprochée. Il a formé lundi un nouveau gouvernement, renouvelé pour
moitié.

Un gouvernement renouvelé

Le ministre de l'Intérieur Habib el-Adli, dont les
manifestants réclamaient le départ, a été remplacé par un haut responsable de
la police, Mahmoud Wagdi. Et il n'y a plus de ministre issu du milieu des
affaires, considéré comme proche de Gamal Moubarak, fils d'Hosni et conspué lui
aussi par les manifestants.

Bien que le mouvement anti-Moubarak ait débuté sans
dirigeant clair ni formation structurée, l'opposition s'efforce maintenant de
s'organiser. Les Frères musulmans, mouvement islamiste très soutenu par les
catégories pauvres de la population, ont rejeté le nouveau gouvernement,
"qui ne respecte pas la volonté du peuple", ont-ils indiqué lundi dans
un communiqué. Ils ont appelé à la poursuite des manifestations jusqu'à la
chute du régime.

La confrérie s'employait en outre à former un large comité
politique avec Mohamed ElBaradeï, afin de nouer un dialogue avec l'armée.
L'ancien directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a
appelé au départ de M. Moubarak et s'est proposé de diriger la transition.

Transition ordonnée

Sans appeler directement au départ du président, les
dirigeants occidentaux prônent le respect des libertés fondamentales tout en
craignant l'arrivée au pouvoir d'extrémistes. "Nous ne voulons
certainement pas voir l'Egypte tomber aux mains d'extrémistes", a déclaré
le secrétaire britannique au Foreign Office William Hague. "C'est pourquoi
nous voulons une transition ordonnée vers des élections libres et
équitables."

Cet appel a été relayé lundi par Bruxelles, qui a appelé
lundi à des "réformes démocratiques substantielles" conduisant à la
tenue d'élections "libres et justes" en Egypte. La Maison Blanche
s'est dite satisfaite lundi de la "retenue" affichée selon elle par
les forces égyptiennes de sécurité, et a appelé au calme à la veille de
manifestations de masse prévues contre le président Hosni Moubarak.

Rapatriement de touristes

Plusieurs pays et entreprises continuaient lundi de rapatrier ou de réduire le nombre de leurs ressortissants expatriés en Egypte. Face à un mouvement qui s'amplifie, de nombreux voyagistes ont suspendu les départs des vacanciers et organisaient l'évacuation des vacanciers. Le suisse Kuoni a recommandé à ses quelque 600 clients de quitter le pays.

Si la Suisse a demandé dimanche à ses ressortissants de quitter "temporairement" le territoire égyptien (le bureau de Pro Helvetia au Caire a été fermé lundi), Berne ne prévoyait pas pour l'heure des vols spéciaux de rapatriement.

La majorité des touristes se trouvent dans les stations de la Mer Rouge ou les sites antiques de la vallée du Nil. Le coût s'annonce énorme pour ce pays, à qui le tourisme a rapporté environ 13 milliards de dollars en 2010, avec 14,7 millions de visiteurs.

Profitant d'un espace aérien ouvert alors que le pays est en partie paralysé, des centaines de touristes, expatriés et Egyptiens angoissés tentaient de quitter le pays. Quelques dizaines de ces évacués sont arrivés lundi à Chypre, pays de l'Union européenne situé à 90 minutes de vol du Caire, qui se préparait à en accueillir plusieurs centaines d'autres dans les prochaines 24 heures.

Toutefois, Egyptair a annoncé l'annulation jusqu'à nouvel ordre de tous ses vols pendant les heures du couvre-feu en vigueur au Caire, à Suez (est) et à Alexandrie (nord), soit entre 13H00 GMT et 06H00 GMT. D'autres compagnies comme Alitalia ou Air France ont dû adapter leurs horaires.

ats/cht

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Israël presse Washington de soutenir Moubarak

Israël a fait parvenir un message confidentiel aux Etats-Unis et à des pays européens leur demandant de "soutenir la stabilité" du régime égyptien d'Hosni Moubarak en butte à une vague de contestation, a indiqué lundi le quotidien Haaretz.

Dans ce message, les responsables israéliens soulignent qu'il est de "l'intérêt de l'occident" et de "l'ensemble du Moyen Orient de maintenir la stabilité du régime en Egypte", a ajouté journal.

La radio militaire, qui a repris cette information, a estimé que cette initiative constitue une critique à l'encontre des Etats-Unis et des pays européens qui ne soutiennent plus le régime du président Moubarak.

Les autorités israéliennes n'ont pas confirmé l'information dans l'immédiat.

Jusqu'à présent, les dirigeants israéliens ont adopté un profil bas à propos de la vague de manifestations en Egypte.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a ordonné à ses ministres de s'abstenir de faire des déclarations. Lui même s'est contenté d'affirmer dimanche qu'Israël voulait préserver la paix avec l'Egypte ainsi que "la stabilité et la sécurité régionale".

"La paix avec l'Egypte dure depuis plus de trois décennies. Notre objectif est que cela continue", a-t-il ajouté.