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Affaire Hainard: "un comportement surréaliste"

Jean Studer, conseiller d'Etat neuchâtelois en charge des finances. [Keystone - Sandro Campardo]
Jean Studer, conseiller d'Etat neuchâtelois. - [Keystone - Sandro Campardo]
Il y a bien eu des cas de collaboration inadéquate entre le Service cantonal de surveillance et des relations au travail (SSRT) dirigé par Frédéric Hainard et des policiers. Deux ou trois collaborateurs sont concernés, a déclaré le conseiller d'Etat neuchâtelois Jean Studer à l'émission "Forum" (RSR).

S'est-il agi de pratiques généralisées ou isolées? On relève "quelques cas, explique Jean Studer, où la collaboration entre des membres de la SSRT (Service cantonal de surveillance et des relations au travail) et certains membres de la police est intervenue dans des cadres qui n'ont pas respecté la loi". En ce qui concerne la police, il s'agit de deux ou trois personnes, sur un effectif de 400 fonctionnaires.

Procédures pas respectées

Selon le conseiller d'Etat, il y a deux questions. Tout d'abord, pour requérir l'intervention de la police, il faut passer par le Département de tutelle qu'il dirige. En l'occurrence, le rapport révèle que Frédéric Hainard est directement intervenu dans le bâtiment de la police et a vraisemblablement mené lui-même des opérations, en mobilisant des agents, contrairement à la loi.

D'autre part, "à l'interne, précise Jean Studer, toutes les opérations de police doivent faire l'objet d'une communication". Or, plusieurs opérations menées, dont une importante, n'ont pas fait l'objet de comptes-rendus.

Les relations d'amitié ont joué un rôle

Comment cela s'est-il passé? "Un certain nombre de membres du SSRT étaient d'anciens gendarmes. Des relations d'amitié se sont nouées, et finalement l'ont emporté sur le respect de la légalité, estime Jean Studer. Quant à mon ancien collègue, il a aussi bénéficié de sa situation d'autorité".

Le conseiller d'Etat précise qu'il a eu des informations en juin dernier, en provenance de l'état-major de la police, et qu'il a aussitôt proposé au Conseil d'Etat de prendre des mesures pour élucider les faits.

Des procédures sont en cours

Quelles suites donner à l'affaire? Jean Studer considère qu'il sera surtout important de redonner les directives concernant la communication à l'interne, et rappeler la loi. Restera la question de l'appréciation du comportement des deux ou trois personnes concernées. En ce qui concerne Frédéric Hainard, des plaintes ont été déposées pour abus d'autorité. Il appartiendra à la justice d'apprécier les faits.

Ce qui a le plus surpris Jean Studer dans cette affaire: "C'est comment un membre d'un gouvernement peut se promener dans les bâtiments de la police, assister aux interventions, procéder à des interrogatoires… Tout cela a quand même une dimension surréaliste pour quelqu'un qui est un magistrat".

Virginie Pilault/Anouk Henry/am

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Comment l'affaire a éclaté

En octobre 2010, la TSR révélait l'existence de cette enquête portant sur les liens troubles unissant l'ex-conseiller d'Etat Frédéric Hainard à ses anciens collègues de la police neuchâteloise. On parlait même de "police parallèle".

Au coeur de ce nouveau scandale se trouvait le célèbre "SSRT", le Service cantonal de surveillance et des relations au travail, censé débusquer le travail au noir ou traquer les fraudeurs à l'aide sociale.

Ce service était, à l'époque, placé sous la tutelle du Département de l’économie, donc conduit de facto par Frédéric Hainard. Il comptait plusieurs anciens policiers dans ses rangs. Récemment, la commission d'enquête parlementaire a même révélé comment Frédéric Hainard avait exercé de fortes pressions pour y faire engager ses ex-collègues.

L'enquête du juge Paychère devait dire si ces actions secrètes avaient été exceptionnelles ou répétées, et proposer d'éventuelles réformes du système qui avait permis ces dysfonctionnements.