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Le National ne veut plus de centrales nucléaires

Le vote du National confirme la stratégie du Conseil fédéral. [Peter Klaunzer]
Le vote du National confirme la stratégie du Conseil fédéral. - [Peter Klaunzer]
Le Conseil national ne veut pas de nouvelles centrales nucléaires en Suisse. Lors de sa session extraordinaire, il a accepté mercredi à une majorité de deux contre un plusieurs motions allant dans le sens du Conseil fédéral, qui souhaite abandonner l'atome progressivement d'ici 2034.

Le texte demande qu'aucune autorisation générale ne soit plus accordée pour la construction de centrales. Les installations nucléaires qui ne sont plus conformes aux exigences de sécurité seront mises à l'arrêt sans délai.

"Le monde après Fukushima n'est plus le même", a relevé Roberto Schmidt (PDC/VS), auteur de la motion sur un abandon progressif du nucléaire. Il entend donner un signal clair à la population et à l'économie, et favoriser une nouvelle poussée d'innovation en Suisse.

Pas de sortie anticipée

Un texte similaire émanant du Parti bourgeois-démocratique (PBD) a recueilli 99 voix contre 54 et 37 abstentions. Le National a encore plus nettement donné son feu vert (108 voix contre 76 et 9 abstentions) à une motion des Verts en faveur de la sortie progressive du nucléaire.

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La Chambre du peuple n'a en revanche pas suivi le groupe socialiste, qui réclamait un abandon anticipé de l'atome. Les centrales de Beznau I et II, construites en 1969 et 1971, auraient dû être fermées tout de suite. A Fukushima, des réacteurs de plus de 40 ans étaient en service, a argumenté en vain Eric Nussbaumer (PS/BL). "Pourquoi attendre 2034 alors qu'une sortie en 2025 est possible", a demandé le Vaudois Roger Nordmann.

Motion UDC repoussée

Par 126 voix contre 64 et deux abstentions, le plénum n'a pas non plus soutenu l'UDC, qui voulait reporter le vote du Parlement. Les démocrates du centre voulaient attendre que le gouvernement mette son projet de loi en consultation et présente ainsi son dispositif dans le détail, mi-2012. Doris Leuthard a critiqué cette volonté de temporiser. On ignore quand une nouvelle technologie verra le jour et si elle sera moins risquée que celle qui est actuellement utilisée dans les centrales, a-t-elle affirmé.

L'électricité une denrée de plus en plus rare. [keystone / jens-ulrich koch]
L'électricité une denrée de plus en plus rare. [keystone / jens-ulrich koch]

Les libéraux-radicaux ne veulent pas bannir à tout jamais l'atome, a de son côté dit leur président, le Tessinois Fulvio Pelli. Ils estiment que les centrales actuelles sont sûres, tout en admettant qu'en cas de catastrophe nucléaire, "les risques seraient considérables". Comme l'UDC, le PLR craint des problèmes d'approvisionnement énergétique et des surcoûts en cas d'abandon de l'atome. Le prix du gaz triplera et celui de l'électricité sera multiplié par 2,5, a estimé Filippo Leutenegger (ZH).

Le PDC a au contraire fait valoir que le prix du nucléaire ne cessera d'augmenter alors que celui du renouvelable reculera. Comme leur ministre et le camp rose-vert, le parti démocrate-chrétien pense que le développement d'énergies renouvelables est une chance pour les entreprises car il aura des retombées positives sur l'emploi.

Droit de recours limité

Pour accélérer les choses, le National a décidé par 98 voix contre 87 de supprimer le droit de recours des associations contre les projets énergétiques. Il a également dit oui à une accélération des procédures d'autorisation d'électricité à partir d'énergies renouvelables.

L'énergie verte injecté dans le réseau ne bénéficiera en revanche pas d'un soutien accru: la levée du couvercle au rachat à prix coûtant du courant vert a été rejetée sur le fil avec la voix prépondérante du président du National Jean-René Germanier (PLR/VS). La Chambre du peuple veut néanmoins remplacer le plafond par des contingents annuels pour les projets prêts à être réalisés.

Le National a aussi adopté une série de motions pour promouvoir les énergies renouvelables. La recherche devra être encouragée et les économies d'énergie récompensées. Les procédures d'autorisation pour le renouvellement des lignes à haute tension et la production d'électricité à partir d'énergie renouvelables devront être simplifiées.  Le Conseil des Etats doit encore se prononcer.


"Préparer la politique des prochaines décennies"

"Le Conseil fédéral ne veut pas arrêter les réacteurs nucléaires de manière prématurée", a rappelé lors des débats la conseillère fédérale Doris Leuthard. L'outil nucléaire suisse a été modernisé et la centrale bernoise de Mühleberg avec sa deuxième enceinte de confinement, par exemple, n'est pas comparable à celle de Fukushima.

Doris Leuthard a rappelé la position du Conseil fédéral. [Peter Schneider]
Doris Leuthard a rappelé la position du Conseil fédéral. [Peter Schneider]

Doris Leuthard a souligné qu'il s'agit de préparer, sur la base des connaissances actuelles, la politique énergétique de ces prochaines décennies. Or, on constate que les coûts de l'électricité d'origine nucléaire tendent à augmenter, alors que ceux des énergies renouvelables baissent avec les années. "A un certain moment, ils vont se croiser", a relevé la ministre de l'énergie. Il y a donc également des raisons économiques à sortir du nucléaire et ce n'est pas seulement une question d'analyse des risques.

Remplacer les 38% que fournit le nucléaire est un "choix ambitieux" pour la ministre de l'énergie. Mais cette voie est réaliste du point de vue politique, économique et technologique. "Je fais confiance à cette Suisse de l'innovation", aux chercheurs et aux industriels qui réalisent toujours de nouvelles percées, a assuré Doris Leuthard.

ats/cab

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